Mâle, Émile: L’art religieux de la fin du moyen âge en France. Étude sur l’iconographie du moyen âge et sur ses sources d’inspiration. In-4, xii-558 p., avec 250 gravures.
(Paris, Colin 1908)
Reseña de Salomon Reinach, Revue Archéologique t. 13 (4e série), 1909-1, p. 180
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Émile Mâle. L’art religieux de la fin du moyen âge en France. Étude sur l’iconographie du moyen âge et sur ses sources d’inspiration. Paris, Colin, 1908. In-4, xii-558 p., avec 250 gravures. Prix : 25 francs.


     « Chose étonnante et à laquelle on ne songe guère ; c’est l’esprit franciscain qui a vivifié le drame du moyen âge. Saint François a tout renouvelé autour de lui ; il a fait fleurir le jardin de l’art italien. Un de ses rayons a touché les Mystères. » Ce rayon est le livre mystique du Pseudo-Bonaventure, les Méditations sur la vie de Jésus-Christ, œuvre d’un franciscain italien du XIIIe siècle que quelques manuscrits appellent Joannes de Caulibus. Par ce livre, lu avec passion, accepté avec une crédulité naïve, l’iconographie des Mystères fut transformée et celle de l’art, vers le second tiers du XIVe siècle, se transforma de même ; à l’idéalisme un peu hautain du XIIIe siècle succède alors un réalisme familier, tendre, pathétique surtout, qui fait une grande place à la représentation de la mort, aux souffrances de Jésus et de sa Mère. C’est à établir cette double vérité — l’influence du franciscanisme sur les Mystères et celle du théâtre médiéval sur l’iconographie de la fin du moyen âge — qu’est consacré l’admirable volume de M. Mâle, faisant suite au chef­-d’œuvre qu’il nous a donné il y a dix ans. Cela fait deux chefs-d’œuvre. Et quelle pureté, quelle chaleur de style, quel savoir immense, fruit discrè­tement présenté de longs voyages, de fouilles opiniâtres dans les bibliothèques et les musées ! Bien d’autres ont décrit les monuments de l’art du XIIIe au XVle siècle (car c’est le concile de Trente, M. Mâle l’a montré, qui a mis fin à l’art médiéval) ; personne ne les avait encore compris et sentis comme ce savant doublé d’un artiste, qui s’obstine à chercher l’esprit sous la forme et, trouvant l’esprit, en marque la genèse et les progrès avec une sûreté qui lui est particulière (1).

S[alomon] R[einach]

 

(1) Pour ne pas faire tort à un tel livre par un article trop court, j’ajoute qu’il est rempli de découvertes de détail, quelques-unes tout à fait surprenantes dans leur simplicité et leur évidence. Ainsi personne, avant M. Mâle, n’avait expliqué le choix des Sibylles et des Prophètes dans la décoration de la Sixtine, ni la pré­sence de Jonas dans cet ensemble (voir p. 279, où il aurait fallu citer Spahu et non Sauer).