Brutails, Jean-Auguste: Les vieilles églises de la Gironde. In-4°, ix-302 p., avec 16 planches et 400 gravures.
(Bordeaux, Feret 1912)
Rezension von Salomon Reinach, Revue Archéologique t. 23 (4e série), 1914-1, S. 308-309
Site officiel de la Revue archéologique
 
Anzahl Wörter: 485 Wörter
 
Zitat für die Online-Version: Les comptes rendus HISTARA.
Link: http://histara.sorbonne.fr/ar.php?cr=843
 
 

J. A. Brutails. Les vieilles églises de la Gironde. Bordeaux, Feret, 1912. In-4°, ix-302 p., avec 16 planches et 400 gravures.


 

 Fruit de vingt-cinq ans de travail, cet ouvrage capital, modèle de statistique archéologique dressée par un historien de l’art, a été justement honoré par l’Institut du Prix Gobert. Comme on ne lit pas beaucoup (et c’est à tort) les discours prononcés par les présidents des Académies aux séances annuelles, je reproduis ici ce que M. Noël Valois a dit de l’œuvre de M. Brutails, en annonçant la haute distinc­tion dont elle était l’objet (14 novembre 1913) :

« L’archiviste, doublé d’un excellent archéologue, a visité, dessiné, photogra­phié, comparé les églises des 554 communes de son département ; sur chacune d’elles, il a constitué un dossier comprenant des pièces d’archives, des notes, des croquis, des plans et des coupes ; puis, de cette longue série de monogra­phies originales, il a cherché à dégager des idées générales, une classification, des lois. On souhaiterait moins de sécheresse peut-être, plus d’harmonie dans les proportions, un ordre parfois plus rationnel ; mais, tel quel, cet immense répertoire, outre qu’il révèle, avec une exactitude impeccable, une quantité de faits nouveaux, rectifie, sur plusieurs points, les théories des archéologues, fait entrevoir, en plein Bordelais, des dérivations de la Saintonge et du Poitou qu’on ne soupçonnait pas, arrache leurs secrets à des monuments dont l’archi­tecture demeurait énigmatique. Il rend un autre genre de services : en faisant connaître aux Girondins les églises de leurs villages, M. Brutails les intéresse à la conservation de ces monuments souvent modestes, toujours vénérables et précieux ; le classement récent d’une série de ces églises voté par le Conseil général de la Gironde peut être considéré comme un des résultats et comme la première récompense des efforts de l’archéologue, qui aurait fait œuvre de sauveur, en même temps qu’œuvre de savant ».

La première partie du livre se compose d’une série de monographies ; la seconde aborde les questions générales et, comme dit l’auteur, « les causes de l’architecture religieuse girondine ». Ces causes sont multiples ; elles ont exercé leur influence tant sur les plans et la construction que sur la décoration des églises. Les conclusions mettent en lumière l’existence d’une école romane que M. Brutails appelle « charentaise — bordelaise », distincte de l’école poite­vine (p. 285). Un fait curieux est la persistance, dans ce pays, des traditions romanes ; une église de style roman (« romane d’intention », p. 274) a été commencée en 1605. On constate aussi des cas très nets de survivances gothiques, par exemple à la cathédrale de Bazas. Il ressort de là, pour les archéologues, une leçon de prudence ; en l’absence d’un texte, la date assignée à une cons­truction d’après le style peut être trop haute de deux siècles et plus.

L’illustration est admirable ; les dessins originaux, reproduits en grand nombre comme les photographies, sont d’une exécution parfaite. Je regrette seulement que les exigences du tirage des similis aient obligé de choisir un papier à la fois brillant et fragile ; les livres illustrés, publiés au début du XXe siècle, auront mauvaise réputation parmi les bibliophiles du XXIe.

S[alomon] R[einach]