Rossi, Giovanni Battista di: Bulletino di archeologia cristiana, 1
(Roma, Tipografia Salviucci 1863)
Reviewed by Edmond Le Blant, Revue Archéologique 7, 1863-4, 2e série, p. 436-437
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Number of words: 758 words
 
To quote the online version: Les comptes rendus HISTARA.
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Bulletino di archeologia cristiana, del cav. Giovanni Battista di Rossi.


Nous faire connaître chaque mois les antiquités chrétiennes découvertes dans le sol de la ville sainte, enregistrer, pour ainsi dire, dès l’heure de l’apparition ce que les catacombes révèlent de plus précieux pour l’his­toire de la religion, pour celle des lettres et des arts, c’est le but que M. le chevalier de Rossi se propose et que son activité sait atteindre. S’il ’n’est point ailleurs qu’à Rome une terre assez féconde en souvenirs pour se prêter à une telle entreprise, il est de même peu d’esprits doués d’assez de mouvement, peu d’intelligences assez promptes pour aborder le nou­veau travail que s’impose l’antiquaire romain. Vivre au milieu des trésors historiques dont il dispose, c’est voir grandir ses forces, et le chevalier de Rossi saura suffire à ses immenses tâches. Une découverte importante pour la topographie romaine marque l’apparition du nouveau Bulletin ; c’est la détermination d’un sanctuaire souterrain dont on ignorait la vraie place. L’épitaphe d’un fidèle recommandé au patronage de saint Janvier et de ses compagnons, a permis de rendre à l’une des cryptes du cimetière de Prétextat, son nom perdu depuis des siècles.

La tombe de Licentius, ami de saint Augustin et de saint Paulin de Nole, vient d’être retrouvée auprès de la basilique de Saint-Laurent. On ne savait si ce personnage, pour la conversion duquel ces deux illustres pères avaient fait tant d’efforts, était mort chrétien. Son épitaphe l’atteste.

L’histoire littéraire n’est pas moins bien servie par la fécondité du sol romain. Voici l’inscription d’un orateur nommé Flavius Magnus. C’est un inconnu ; mais la légende funéraire nous dit son talent, sa renommée. Le sénat l’a comblé d’honneurs, récompensant à la fois sa droiture et l’élo­quence incomparable qui le plaçait au rang des maîtres anciens. Il est mort en 425. C’est un chrétien, mais du temps où plus d’un esprit, flottant encore, ne savait accepter ni répudier entièrement les vieilles croyances. Aussi l’inscription qui vante longuement les mérites de Magnus ne dit rien de sa foi. Le monogramme du Christ, gravé sur la tombe, en témoigne seul.

Les inscriptions monumentales placées autrefois par saint Damase aux sépultures des saints, ont fourni au savant chevalier, pour les questions topographiques, d’importantes indications, dont nul avant lui n’avait su faire usage. Quelques fragments viennent de lui rendre une part de l’in­scription commémorative, dédiée par l’illustre pontife à saint Janvier. Ils concourent à déterminer la place exacte de l’hypogée qui portait le nom de ce martyr.

Le dernier Bulletin est consacré à la basilique de Saint-Clément, dont une note antérieure décrivait curieusement les peintures. Un traité composé en 392 atteste l’antique existence de ce sanctuaire. M. le chevalier de Rossi en trouve d’autres preuves dans une petite plaque de bronze, autrefois attachée au cou d’un esclave. Le maître qui prie qu’on le lui ramène, s’il vient à s’échapper, se nomme Victor ; c’est un acolyte de la basilique de Saint-Clément, A DOMINICV CLEMENTIS. Or cette plaque est antique, comme l’attestent cette expression et la présence du mono­gramme Constantinien X, que la croix devait remplacer de bonne heure sur les objets usuels. L’age reculé de la célèbre basilique se montre encore par d’autres détails et surtout dans de vieilles substructions, que les fouilles viennent de faire reconnaître.

L’époque byzantine est aussi représentée dans les découvertes nouvelles. On a trouvé, dans l’Agro Verano, un corps embaumé, enveloppé d’étoffes et recouvert d’une couche de plâtre. Sur la poitrine du fidèle reposait une croix d’or niellée, destinée à le défendre contre les attaques du malin. Une légende gravée sur ce bijou atteste la croyance à sa vertu : CRVX EST VITA MIHI MORS INIMICE TIBI. L’Inimicus est l’être acharné à la perte des hommes, celui qui cherche à noyer le voyageur, à le précipiter du haut d’une roche, celui qui fait que les morts, pleins d’angoisses, s’écrient du fond de leurs tombes : libera nos a malo ! Grégoire de Tours l’appelle de même l’ennemi. La croix toute-puissante a ici de plus un auxiliaire. Si l’on divise l’anneau qui sert à le suspendre, on trouve une cavité profonde qui servait à renfermer des reliques, comme nous l’apprend Anastase le bibliothécaire. C’est là une preuve importante et nouvelle de l’usage d’ensevelir avec ces saints objets.

Je viens d’analyser en quelques lignes quatre fascicules riches de ren­seignements inédits et inspirés par la méthode nouvelle qui doit diriger maintenant dans l’étude des monuments chrétiens. Chaque détail s’y relie à une idée d’ensemble ; si précieux qu’il puisse être, sa valeur s’en aug­mente. Les amis des recherches sérieuses voudront suivre dans ce cu­rieux travail le développement d’un système qui doit replacer sur sa vraie base l’histoire de l’Église primitive. Edmond Le Blant.