Le Brun-Dalbanne: Recherches sur l’histoire et le symbolisme de quelques émaux du trésor de la cathédrale de Troyes
Broch. grand in-8 de 59 pages, VII planches.
(Troyes, Dufour-Bouquot 1862)
Reviewed by A. B., Revue Archéologique 7, 1863-4, 2e série, p. 439-440
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Recherches sur l’histoire et le symbolisme de quelques émaux du trésor de la cathédrale de Troyes, par M. Le Brun-Dalbanne. Troyes; 1862. Broch. grand in-8 de 59 pages, VII planches.


Ou sait combien les émaux cloisonnés sont rares : M. de Laborde, vou­lant donner le catalogue des émaux cloisonnés qu’on peut étudier dans les musées et trésors d’églises de l’Europe, ne cite pas, dit M. Le Brun-Dalbanne, plus de quinze pièces ou monuments de valeur, dont huit seulement ont une réelle importance, à savoir : l’autel d’or de Saint-Ambroise de Milan ; le rétable dit la palla d’oro de Saint-Marc de Venise ; la châsse de Notre-Dame d’Aix-la-Chapelle ; la châsse des rois mages de Cologne ; le calice de Saint-Remi de Reims ; la couronne, l’épée et les gants de Charlemagne du trésor impérial de Vienne. C’est donc avoir rendu service à la science que d’avoir publié les quatre émaux cloisonnés encore inédits que possédait le trésor de la cathédrale de Troyes. Mais ce n’est là que la plus minime portion du travail de M. Le Brun-Dalbanne. Le trésor de la cathédrale de Troyes possède, en effet, outre les quatre émaux cloisonnés que nous venons de citer : 1° de très-beaux émaux champlevés ; 2° une châsse à émaux peints du plus grand intérêt, la châsse de Saint-Loup.

M. Le Brun-Dalbanne encadre l’étude de ces pièces d’émaillerie du trésor de Troyes dans une histoire abrégée et très-claire de l’émaillerie ; il nous indique les divers procédés des artistes aux différentes époques de l’art et explique ensuite avec détail les sujets des émaux qu’il s’est donné la tâche de faire connaître au public. Ce sont, suivant l’auteur, outre plu­sieurs émaux provenant des tombeaux des comtes de Champagne, Henri 1er et Thibaut III, 1° un Saint-Pierre au ciel ; 2° la veuve de Sarepfa et le prophète Élie ; 3° un épisode de la dixième plaie d’Égypte ; 4° Moïse faisant jaillir l’eau du rocher ; 5° le prophète Joël annonçant le libérateur ; 6° les deux espions envoyés à Jéricho par Josué ; 7° la Loi nouvelle et la Loi an­cienne personnifiées (ces émaux accompagnaient le Christ en croix) ; 8° sur un reliquaire ayant appartenu à l’église de Villemaur : en bas, la terre et le sacrifice sanglant de la croix ; en haut, le ciel et le second avénement du Christ.

Mais c’est surtout la châsse de Saint-Loup que M. Le Brun-Dalbanne étudie avec détail. Il ne nous donne pas seulement l’histoire et la description du monument, il se demande s’il n’est pas possible de découvrir le nom de l’artiste auquel on doit ce chef-d’œuvre, et par d’heureux rappro­chements, il arrive à conclure que cet artiste doit être le fameux Léonard Pénicaud dit par abréviation, Nardon, de Limoges. Cet artiste avait trente ans à l’époque où l’abbé de Saint-Loup fit exécuter le reliquaire. Il était donc dans toute la force de l’âge et du talent. Si les œuvres que nous possédons de lui ont une grande analogie avec la châsse de Saint-Loup pour le travail et la manière, n’y aura-t·il pas quelque raison de lui attribuer cette remarquable pièce d’un -art dont il était alors un des plus célèbres représentants ? ainsi raisonne M. Le Brun-Dalbanne. Puis il rap­proche de la châsse de Saint-Loup un émail du musée de Cluny, n° 2029, émail signé du nom de Nardon Pénicaud ; un autre, n° 999 ; un troisième, du musée Sauvageot, n° 1116, et plusieurs autres du musée du Louvre. Après quoi il conclut que la châsse de Saint-Loup est tout entière de Nardon Pénicaud et qu’elle est même l’œuvre principale de ce grand maître.

C’est aux maîtres d’aujourd’hui à décider la question. Nous nous décla­rons incompétents, mais nous ne craignons pas de dire en finissant que la brochure de M. Le Brun-Dalbanne est à la fois intéressante et instruc­tive, et qu’elle augmente le nombre des travaux très-estimables qui se font depuis quelque temps en province. A. B.