Huelsen, Chr.: La Pianta di Roma dell’ Anonimo Einsidlense. In-4°, 48 p. avec 5 planches et 8 figures. — La Roma Antica di Ciriaco d’Ancona. ln-4°, 51 p., avec 18 planches et 30 figures.
(Rome, Loescher 1907)
Compte rendu par A.-J. Reinach, Revue Archéologique t. 12 (4e série), 1908-2, p. 147-148
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Chr. Huelsen. La Pianta di Roma dell’ Anonimo Einsidlense. Rome, Loescher, 1907. In-4°, 48 p. avec 5 planches et 8 figures. — La Roma Antica di Ciriaco d’Ancona. Rome, Loescher, 1907.  ln-4°, 51 p., avec 18 planches et 30 figures.


      Dans la Topographie der Stadt Rom im Alterthum, que M. Huelsen a si brillamment achevée, H. Jordan avait fait une large place à l’histoire des sources spéciales de la topographie romaine. Toute détaillée que soit cette partie de son œuvre, elle n’aurait pas moins besoin d’être refondue que la topographie même. Les deux récents mémoires de M. Huelsen n’en apportent pas seulement une nouvelle preuve ; ils permettent d’espérer que le secrétaire de l’Institut allemand songe à nous donner cette réédition.

         I. Jordan, puis Lanciani, dans une dissertation insérée au t. I des Monumenti dei Lincei, ont publié et commenté un itinéraire de Rome conservé par un ms. du VIe  s. du monastère suisse d’Einsiedeln. En donnant pour la première fois une reproduction photographique des huit feuillets de ce texte, M. H. n’a pas prétendu en refaire le commentaire; il s’est proposé seulement de rechercher la nature exacte de cet anonymum Einsidlense. De la comparaison d’un fragment d’itinéraire compris dans une Sylloge d’inscriptions romaines qui précède l’anonymum et qui permet d’en placer la rédaction au monastère de Reichenau, il résulte que l’anonymum n’est pas un itinéraire original, reproduisant les légendes d’un plan de Rome au XIIIe s., mais l’épitome, souvent tronqué et confus, d’un véritable itinéraire, qui indiquait, en outre du nom des monuments, leurs principales curiosités. Cet itinéraire original était annexé à un plan que M. H. a cherché à reconstituer sur une planche qui imite à s’y méprendre les mappemondes de l’époque. Il n’y avait pas là que jeu d’érudit, puisque ce plan de Rome serait le seul qui viendrait se placer entre le plan constantinien (dérivé des plans gravés plusieurs fois depuis Auguste jusqu’aux Sévères sur des carrés de marbre où le midi est au haut et où la Via Appia-Flaminiaforme cardo), et les plans elliptiques du XIIIe s., comme celui que M. H. extrait pour la première fois d’une mappemonde de la Bibliothèque de Hanovre, où la partie supérieure est dirigée vers l’Orient. Le plan suivi par l’original de l’itinéraire d’Einsiedeln serait orienté de même ; mais, étant circulaire, la Via Lateranensis (de Saint-Pierre au Latran) le diviserait longitudinalement en deux moitiés égales, l’umbilicus marquant le centre de ce cercle.

          II. Les historiens de Rome ont maintes fois déploré la perte des dessins et descriptions que Cyriaque d’Ancône aurait faits, incredibili diligentia sua à en croire ses amis, pendant ses séjours à Rome, en 1425, en 1441, vers 1450 surtout. C’est une partie au moins de ces esquisses que M. H. croit avoir retrouvée dans 18 dessins à la plume qui font partie d’un ms. que son auteur, le médecin Jean Marcanova de Padoue, dédia en 1465 à Malatesta Novello, seigneur de Cesena. Ce prince étant mort avant la remise de l’ouvrage, il fut donné par Marcanova aux chanoines de Saint-Jean de Padoue ; c’est de leur librairie qu’il a fini par arriver en 1803 à la Bibliothèque Palatine de Modène (Xl, G. 2), où Mommsen, Henzen, de Rossi et bien d’autres en ont examiné la partie épigraphique, mais sans jamais prendre en considération les dessins de Rome. Cependant, une rapide comparaison suffit à montrer que ces dessins sont du même style que ceux qui accompagnent les inscriptions. Or, que ces inscriptions dérivent du recueil de Cyriaque, c’est ce que Mommsen a prouvé pour Vérone, Ziebarth pour Ravenne, Bormann pour Ariminum, etc. ; non seulement les dessins rappellent ceux que Cyriaque a laissés pour la Grèce, mais on y retrouve la même ignorance des lois de l’architecture, le même goût pour les détails pittoresques, le même style dans les légendes, plus ou moins authentiques, dont les monuments sont chargés ; enfin, l’on peut prouver que l’auteur des dessins a travaillé à Rome entre 1447 et 1453, ce qui est bien le cas pour Cyriaque. De tous ces indices, s’il résulte qu’on se trouve bien en présence de copies des esquisses romaines de l’épigraphiste d’Ancône, il faut reconnaître qu’elles sont bien loin de répondre aux espérances qu’on avait conçues. Ce qu’elles perdent ainsi en valeur iconographique, elles le gagnent, d’ailleurs, en intérêt artistique et il y aura lieu désormais d’en tenir compte dans l’étude des architectures pseudo-classiques dont les Mantegna, les Ghirlandajo, les Gozzoli encadrent leurs tableaux.

                                                                       A. J. Reinach