Biadego, G.: Pisanus Pictor. Extr. des Atti del reale Instituto Veneto di scienze, lettere ed arti, 1907-1908, 2e partie, p. 837-59. In-8, 23 p.
( 1908)
Compte rendu par Louis Caillet, Revue Archéologique t. 12 (4e série), 1908-2, p. 322-324
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G. BIADEGO. Pisanus Pictor. (Extr. des Atti del reale Instituto Veneto di scienze, lettere ed arti, 1907-1908, 2e partie, p. 837-59). In-8, 23 p.


       Sous ce titre, M. Giuseppe Biadego vient de publier une brochure qui bouleverse tout ce que l’on croyait savoir sur la chronologie et le nom du célèbre peintre Pisanello. Jusqu’ici, on admettait qu’il se nommait Vittor Pisanello, qu’il était né en 1380 et qu’il était mort après 1450, en 1451 suivant les uns, en 1455 suivant les autres. Or, ce sont là autant d’erreurs (la date de sa mort exceptée). Le grand peintre vénitien se nommait en réalité Antonio Pisano ; il naquit à Vérone en 1397 et mourut au mois d’octobre 1455. C’est ce que nous apprend M. Biadego par des documents irréfutables. En ce qui concerne la forme de son nom, il n’y a pas le moindre doute : il a signé Pisanus dans la seule lettre autographe que nous possédions de lui (28 juin 1431), qui est écrite à Philippe Marie Visconti. Deux de ses tableaux authentiques, conservés l’un à Londres, l’autre à Vérone, portent le nom de Pisano. C’est sous ce nom, d’ailleurs, que le désignaient ses contemporains. La forme Pisanello se trouve cependant dans un sauf conduit d’Eugène IV, du 26 juillet 1432, et dans un privilège d’Alphonse Ier, de 1449. On peut admettre que ce diminutif était la forme familière de son nom.

     Quant à son prénom et à la date de sa naissance, nous les connaissons maintenant par un document des Archives de Vérone de 1433, découvert par l’auteur et qui est à vrai dire la raison d’être de sa brochure. Nous le transcrivons en entier :

Dona Isabella uxor condam Filipi de Hostilia. 70 ann.

Antonius Pisanus pictor ejus filius 36 ann.

Camila ejus filia                  4 ann.

Johannes ejus famulus        14 ann.

Richa ejus famula               15 ann.

Antonius pictor (dictus) pisanus, cette forme se trouve encore dans un document du 21 novembre 1442 : c’est avec raison que M. Biadego, combinant ces deux pièces avec d’autres, restitue au célèbre peintre italien son véritable nom et nous renseigne sur sa famille.

       Sa mère se nommait Isabella (di Nicola), et son père) Bartolomeo da Pisa (c’était un drapier, fils d’Enrico Pisano). Il avait une sœur nommée Bona, mariée à Bartolomeo dalla Levata, et une fille de 4 ans appelée Camilla. La date de sa naissance est suffisamment attestée par ce document qui lui donne 36 ans en 1433 : notre artiste est donc né en 1397, et non en 1380, comme on l’a répété par erreur jusqu’ici. Quant à celle de sa mort, M, B., par l’ingénieux rapprochement de, deux textes, établit qu’elle doit être placée en octobre 1455. Si nous consultons, en effet, le testament de Bartolomeo della Levata, du 14 juillet 1455, nous voyons qu’à cette date Pisano et feue sa mère lui devaient encore diverses sommes empruntées depuis le 16 novembre 1434 usque in pre­sentem diem, ce qui le suppose encore en vie à cette date. En second lieu, nous apprenons par une lettre de Charles de Médicis à Jean de Médicis, écrite de Rome le 31 octobre 1455, qu’à cette date il était déjà mort : Io avevo a questi di comprate circha di 30 medaglie di ariento, multo buone da uno garzone del Pisanello che mori a questi di.

       A la fin de ce travail se trouvent cinq pièces justificatives écrites en latin (pour la plus grande partie). Ce sont des documents de 1438 et de 1442 ; les deux plus intéressants sont le testament d’Isabelle et celui de Bartolomeo dalla Lavata.

       Nous ne terminerons pas ce compte rendu sans rappeler, comme l’a déjà fait à l’Académie des Inscriptions M. Salomon Reinach, que la découverte de la date exacte de la naissance de Pisano autorise à penser que l’auteur des Belles Heures du duc de Berri, conservées à Chantilly, a inspiré le peintre italien au lieu d’avoir été inspiré par lui. Les ressemblances des deux œuvres avaient été notées, et M. Durrieu penchait pour l’imitation de l’œuvre française par le peintre italien ; la découverte de M. Biadego confirme cette thèse.

                                                                              Louis Caillet