Engel, Arthur - Serrure, Raymond: Traité de numismatique du moyen âge. Tome troisième. Gr. in-8° de 1015 pages (p. 945 à 1959 et fig. 1456 à 1968).
(Paris, E. Leroux 1905)
Compte rendu par Adrien Blanchet, Revue Archéologique t. 7 (4e série), 1906-1, p. 364-365
Site officiel de la Revue archéologique
Lien avec l'édition numérique de ce livre
 
Nombre de mots : 808 mots
 
Citation de la version en ligne : Les comptes rendus HISTARA.
Lien : http://histara.sorbonne.fr/ar.php?cr=1312
 
 

Engel (Arthur) et Serrure (Raymond). Traité de numismatique du moyen âge. Tome troisième. Paris, E. Leroux, 1905, gr. in-8° de 1015 pages (p. 945 à 1959 et fig. 1456 à 1968).


          La rédaction de ce troisième volume (1) a été retardée par la mort de R. Serrure, de sorte que l’ouvrage entier a paru en quinze années. Il s’ensuit nécessairement que toutes les parties de l’ouvrage ne sont pas également conformes à l’état actuel de la science.

          Le volume comprend d’abord l’étude des monnaies royales de France depuis Louis IX jusqu’à Louis XII. Il était évidemment difficile de traiter une matière aussi considérable en quarante-cinq pages. Mais il me paraît que l’ouvrage ne tient pas compte suffisamment des progrès remarquables qui ont été réalisés depuis quinze ans dans le classement chronologique des monnaies royales. Par exemple, la florette de Charles VI méritait bien une mention d’une page pour ses vingt-huit émissions qui ont inondé la France. Remarquons que les monnaies d’Henri V et Henri VI, rois d’Angleterre, sont classées dans la série royale française et que, d’autre part, les pièces frappées par les rois de France, en Italie (Gènes, Savone, Pise, Naples, etc.) sont aussi classées dans la même série : logiquement, l’un des deux classements est à réformer. En traçant l’histoire des monnaies frappées dans les anciennes provinces correspondant au territoire de la France actuelle, il serait préférable de s’abstenir de parler de fiefs, car il est souvent difficile de préciser les relations des divers princes avec le roi de France. On devrait cependant poser en principe que le monnayage de l’or constitue une preuve d’indépendance. Il faut rayer le chapitre Duché d’Orléans, car la pièce du duc Charles fut frappée à Asti. D’autre part, si l’on peut admettre le Béarn parmi les fiefs français, on ne saurait en faire autant pour le royaume de Navarre. Pour le Béarn, il faudrait préciser le sens du mot Forcas ; la grande pièce d’or de Gaston X, pesant 19 grammes, ne peut être appelée un essai, mais elle est plutôt un multiple de l’écu d’or ou simplement une médaille.

          Dans le chapitre troisième les auteurs ont suivi une méthode meilleure en groupant les états de l’ancien royaume d’Arles, puis, dans le quatrième, la Lorraine et les Trois-Évêchés. Le chapitre concernant les Pays-Bas méridionaux comprend 75 pages ; celui des Pays-Bas septentrionaux et celui des Pays-Bas sous les maisons de Bourgogne et d’Autriche sont condensés en 38 pages. Il en résulte que cette région tient dans le livre une place double de celle accordée aux monnaies royales françaises, et l’on peut croire qu’il faut voir dans ce fait une marque de la préférence d’un des auteurs pour les séries de son pays.

          Les autres divisions de l’ouvrage comprennent les Iles Britanniques, les empereurs d’Allemagne, le Bas-Rhin et la Mosellane, le Haut-Rhin, l’Alsace et la Suisse, la Souabe et la Bavière, l’Allemagne centrale, la Westphalie, la Basse-Saxe, le Brandebourg et la Poméranie, l’Autriche, la Bohême avec la Lusace, la Silésie et la Moravie, la Hongrie et la Slavonie, la Pologne, les pays de l’Ordre teutonique et de l’Ordre de Livonie, les pays Scandinaves, l’Espagne et le Portugal, l’Italie, la Russie avec les pays slaves du Sud et la Roumanie ; puis l’empire byzantin et l’Orient latin, l’Arménie et la Géorgie. Enfin deux chapitres, qui sont plutôt des appendices, concernent les contremarques et diverses monnaies très répandues, comme l’esterlin, le gros tournois, le florin d’or.

          Il faut avoir traité soi-même une semblable matière pour savoir combien sont nombreuses et difficiles à classer les monnaies de tous ces pays si divers. On ne s’étonnera donc pas que les érudits étrangers trouvent des lacunes et des erreurs dans les parties concernant leur propre pays. Mais ils s’empresseront de reconnaître que l’ouvrage de MM. Engel et Serrure est un guide indispensable à tous les historiens aussi bien qu’aux numismatistes.

          La bibliographie a peut-être été trop simplifiée dans cette troisième partie. Par exemple, pour le Luxembourg, il est nécessaire de connaître les travaux de Van Werveke et de M. Alvin ; pour l’Écosse, l’ouvrage de Burns (The coinage of Scotland, 1887) est à citer au premier rang. Pour les autres pays de l’Europe, les sources indiquées dans le tome II ne suffisent pas non plus pour le tome III. A propos de l’Espagne, disons que la grande pièce d’or portant le buste de Pierre le Cruel a été fabriquée, non pas sous le règne d’Henri III de Castille, mais plus probablement au XVIe siècle, par des orfèvres de Prague. On en connaît des exemplaires en argent et elle fait partie d’une série dans laquelle on remarque une médaille de Charlemagne, une de Charles-Quint et une autre d’Elisabeth de Hongrie. 

          M. Engel doit se réjouir d’avoit [sic] mené à bien l’œuvre qu’il avait entreprise. Nous le félicitons de la constance dont il a fait preuve en parcourant une route si longue, à travers des champs si vastes et souvent mal défrichés.

                                                             A[drien] B[lanchet]

(1) Voy. dans la Rev. arch., 1891, I, 126, et 1894, II, 142, les comptes-rendus des deux premiers volumes.