Blanchet, A.: Traité des monnaies gauloises. Gr. in-8, v-650 p., avec 4 planches et de nombreuses vignettes.
(Paris, Leroux 1905)
Compte rendu par Salomon Reinach, Revue Archéologique t. 6 (4e série), 1905-2, p. 183-184
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A. Blanchet. Traité des monnaies gauloises. Paris, Leroux, 1905. Gr. in-8, v-650 p., avec 4 planches et de nombreuses vignettes.


          Nous possédons un bel atlas de monnaies gauloises et un bon catalogue des monnaies gauloises de la Bibliothèque Nationale. Le livre de doctrine, l’« Eckhel » nous faisait défaut ; il faut remercier et féliciter M. Blanchet de nous l’avoir donné.

          L’auteur a réparti sa vaste matière en 21 chapitres ; sans en transcrire les intitulés, on peut faire comprendre la disposition méthodique qu’il a adoptée. Après un historique des études relatives à la numismatique gauloise, M. Blanchet aborde les origines du monnayage (lingots, anneaux et rouelles) ; il s’occupe de la matière des monnaies, c’est-à-dire des métaux, puis de leur fabrication et de leur poids. Un chapitre est consacré aux légendes monétaires, un autre aux types, un troisième aux prototypes grecs et romains, les deux suivants aux imitations celtiques des monnaies macédoniennes et massaliètes. La géographie numismatique, qui comprend les chapitres X-XX, commence par la vallée du Rhône, continue par le sud-ouest, l’ouest, le nord-ouest, le nord, le nord-est, l’est et le centre, les colonies romaines, l’Europe centrale, la Bretagne insulaire. Enfin, M. Blanchet étudie, en se fondant sur des statistiques très complètes qu’il a réunies patiemment depuis des années, la circulation des monnaies gauloises. Trois appendices concernent les trésors de monnaies, les Musées qui possèdent des monnaies celtiques et les prix actuels de ces monnaies.

          Parmi tant de choses intéressantes, je signalerai particulièrement à nos lecteurs le chapitre sur les types des monnaies celtiques (p. 151). C’est un sujet sur lequel on a beaucoup déraisonné ; Bertrand lui-même, si prudent en d’autres matières, a écrit des phrases singulières sur le prétendu symbolisme des monnaies gauloises (1). M. Blanchet a exposé la question avec beaucoup de réserve et de bon sens. Je le trouve même timide lorsqu’il écrit (p. 153). « Il est probable que Charles Robert a eu raison de repousser l’hypothèse d’après laquelle Ogmius aurait été figuré sur les monnaies. » Cette hypothèse est une folie ; Ogmius est un petit dieu allobroge, nullement panceltique, qu’on n’aurait jamais dû chercher sur des monnaies armoricaines. P. 160, il est impossible que le « celt de bronze » paraisse sur des monnaies celtiques, car il n’y avait plus de celts de bronze depuis trois cents ans au moins quand on commença à frapper des monnaies en Gaule. Je ne crois pas non plus que la chronologie permette de rapprocher les armes figurées sur les monnaies gauloises de celles des nécropoles de Hallstatt et même de la Marne. P. 165, je lis ; « le sanglier... cet animal, dont les troupeaux étaient sans doute une des richesses de la Gaule... » Lapsus inoffensif, mais qui fait sourire. A la p. suivante, je m’insurge encore contre un probablement ; « Le lion... ne vivait probablement pas sur notre sol, à l’époque où le monnayage fut introduit. » Il est prouvé à l’évidence que le dernier lion avait disparu depuis au moins cinq mille, sinon depuis dix mille ans ou davantage. Pour l’oiseau figuré sur le dos du quadrupède, je ne crois pas que ce soit « un détail explicable par l’histoire naturelle », mais une imitation des types grecs où un oiseau vole au-dessus des chevaux d’un char. P. 173, une phrase très sage et qu’on voudrait inscrire en gros caractères partout ou [sic] se réunissent des archéologues : « Avant de reconnaître une signification mythologique à un type monétaire gaulois, il faut être sûr qu’on ne peut trouver une explication par l’étude de la filiation des types. » Le livre de M. Blanchet, destiné à servir pendant longtemps de guide aux numismatistes, ne rendra pas seulement service par les informations si copieuses qu’il leur apporte, mais par les scrupules tout scientifiques dont il leur donne le modèle et le conseil.

                                                             S[alomon] R[einach]

(1) Bertrand m’avait offert de publier avec lui un ouvrage sur la Religion des

Gaulois ; un des motifs qui m’ont fait repousser cette proposition, d’ailleurs séduisante, c’est que je ne pouvais m’accommoder de ses tendances symbolistes.