Winter, Franz: Die antiken Terrakotten im Auftrag des archæologischen Instituts des deutschen Reichs. Band III. Die Typen der figuerlichen Terrakotten. 1 vol. grand in-4° en deux parties reliées séparément.
(Berlin, Spemann 1903)
Compte rendu par Georges Perrot, Revue Archéologique t. 5 (4e série), 1905-1, p. 147-151
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Die antiken Terrakotten im Auftrag des archæologischen Instituts des deutschen Reichs, herausgegeben von Bernhard Kekule von Stradonitz. Band III. Die Typen der figuerlichen Terrakotten, bearbeitet von Franz Winter. 1 vol. grand in-4° en deux parties reliées séparément. Berlin, Spemann, 1903.


 

          L’Institut archéologique allemand a entrepris, on le sait, la publication d’un grand recueil des terres cuites grecques, groupées par région, et elle en a confié la direction au savant conservateur du Musée des antiques de Berlin, le professeur Kekulé von Stradonitz. Ce Corpus sera-t-il jamais achevé ? Il est permis d’en douter.

          Depuis vingt-cinq ans, deux volumes seulement en ont paru, les terres cuites de Sicile, éditées par M. Kékulé lui-même, et celles de Pompéï, par M. Von Rohden. Le projet n’est pourtant pas abandonnée [sic]. Avec les ressources qu’il possède en argent, en documents classés dans ses archives et en collaborateurs bien préparés à une tâche de ce genre, l’Institut continue à réunir, pour l’exécution du grand projet qu’il a ainsi en vue, des notes, des photographies et des dessins.

          Au cours de cette préparation, il avait paru utile que les érudits attachés à ce travail eussent une collection d’esquisses où les figurines de diverse origine seraient rangées par ordre de types. Ils auraient ainsi plus de facilité pour disposer leurs matériaux et pour adopter un plan commun. D’un groupe à l’autre, les comparaisons deviendraient plus aisées. L’idée était juste; elle fut appliquée avec la suite et la persévérance que l’érudition allemande porte dans toutes ses entreprises. L’apparat que l’on avait ainsi commencé à former allait toujours grossissant. On finit par se demander s’il ne convenait pas de ne le point garder dans les cartons de l’Institut, où seuls quelques prévilégiés [sic] étaient admis à en tirer parti, s’il n’y aurait pas avantage à en faire profiter tous ceux qui s’intéressaient à l’histoire de l’art antique. C’est ainsi que naquit la pensée de le mettre à la disposition du public dans les conditions où il nous est aujourd’hui offert, sous les auspices de l’Institut, par l’éditeur Speman. On choisit, pour procurer l’édition, M. Franz Winter, un archéologue d’une compétence indiscutée, qui, pendant les années qu’il avait passées à l’Antiquarium du Musée de Berlin, s’était tout particulièrement familiarisé avec cette sorte de monuments. Une fois cette décision prise, l’éditeur désigné, soucieux de ne laisser échapper aucun des types que créa jadis l’imagination du modeleur grec, entreprit à cette fin de nombreux voyages d’étude. On trouvera dans la préface la liste des collections publiques et privées qu’il a visitées à cet effet, depuis celles de Londres et de Paris jusqu’à celles d’Athènes, de Smyrne et de Constantinople. Habile à manier le crayon, il rapporta de ces visites des centaines d’esquisses. C’est d’après celles-ci et d’après les clichés et les croquis que lui ont fournis nombre d’auxiliatres [sic] bénévoles, comme aussi d’après les recueils où ont déjà été figurées maintes séries de terres cuites, qu’il a exécuté lui-même presque tous les dessins à la plume que contiennent ces deux volumes, dessins qui ont été reproduits par la simili-gravure. Sauf avis contraire et par exception, ils sont tous à l’échelle du tiers de la grandeur réelle. Pas n’est besoin de dire qu’ils ne prétendent pas, ainsi réduits, à reproduire toutes les finesses de leurs modèles. Ce que s’est proposé le dessinateur et ce à quoi il a vraiment réussi, c’est à rendre avec exactitude le mouvement de la figure et les attributs qui la définissent. A force de s’exercer à ce métier, M. Winter y a acquis assez de dextérité pour que l’on retrouve, dans ces croquis, presque toujours, le caractère même du style des originaux. Ce mérite est surtout sensible dans les images qu’il donne des figurines archaïques. Celles-ci sont plus simples de facture que celles qui datent du cinquième et du quatrième siècle ; un trait franc et quelques ombres discrètes suffisent mieux à en représenter l’allure et la physionomie. Quand vient le tour des charmantes figurines de Myrina et de Tanagre, l’imperfection du procédé abréviatif frappe davantage ; il ne donne qu’une idée très insuffisante de l’élégance et de la grâce de ces minuscules chefs-d’œuvre.

          Le plan de l’ouvrage est facile à résumer. Dans la préface, M. Winter explique de quelles pensées est née l’entreprise dont la responsabilité lui a été confiée et comment il s’est acquitté de sa tâche. Vient ensuite un long chapitre intitulé : Die Fundstellen, les « lieux de découverte », les provenances (pages i-cxxx). Les divisions, cela va de soi, en sont géographiques. Il commence par la péninsule hellénique pour finir par la Sicile et l’Italie. C’est là que se trouvent, très brièvement exposées, les seules considérations générales que ce livre renferme. Chaque série que constituent les trouvailles faites dans tel ou tel site est caractérisée en quelques mots. Suivent des renvois aux figures qui la représentent dans le recueil, avec l’indication des pages et des numéros.

          Après cette sorte d’introduction, plus rien que le recueil même des figures, qui comporte trois grandes sections :

          I. Types de caractère primitif et leurs dérivés ;

          II. Types archaïques et leur développement ;

          III. Types plus récents.

          Chaque section se partage en un certain nombre de chapitres. Voici, par exemple, la liste de ceux entre lesquels se divise la seconde section, celle qui est consacrée à l’art archaïque :

          1. Figures féminines debout et trônantes. Groupe oriental ;

          2. Figures féminines debout et trônantes. Groupe occidental ;

          3. Figures féminines avec enfants ;

          4. Hydrophores et figures apparentées ;

          5. Nikès ;

          6. Figures féminines sur des animaux ;

          7. Poupées ;

          8. Figures viriles debout et assises ;

          9. Figures couchées ;

          10. Caricatures et figures difformes, Silènes, Pans, singes et figures analogues ;

          11. Hermès (piliers surmontés d’une image) ;

          12. Bustes et demi-figures.

       Dans l’intérieur de chaque chapitre, les figures sont classées, autant que possible, par ordre de dates et par ordre de régions ; mais, étant donnée, pour presque toutes les figurines, le manque d’une date certaine et, pour beaucoup, l’incertitude de la provenance, cet ordre ne pouvait être très rigoureusement observé. Il y a pourtant abus, ce me semble, quand l’auteur, sous prétexte de compléter une série, de suivre un type dans son développement graduel, dépasse trop visiblement les limites qu’il a lui-même fixées à chacune de ses sections. Malgré l’excuse générale présentée à cet effet dans la préface, nous ne pouvons nous défendre de quelque surprise lorsque, dans la section dite de l’archaïsme, nous rencontrons une figurine qui appartient sans aucun doute au IVe siècle, comme celle qui est évidemment une libre imitation de l’Aphrodite ἐπιτραγία que Scopas avait sculptée pour Elis (1).

          Il reste à indiquer la disposition adoptée pour la présentation des images. Chacune des larges pages de l’in-quarto est divisée en deux parties, dans le sens de sa hauteur. La partie supérieure du champ est réservée aux figures. Celles-ci y sont distribuées, d’après leur forme, de manière à ce qu’il y ait aussi peu de place perdue qu’il est possible ; elles sont pourtant séparées les unes des autres par assez de blanc pour qu’il n’y ait pas apparence d’encombrement. On en compte de cinq à dix, suivant leur grandeur, dans chaque page. Chaque figure a son numéro. Ces numéros sont reportés au bas de la page, et, sous chacun d’eux, on trouve l’indication très précise de la provenance, certaine ou vraisemblable, et, en tout cas, soit du Musée soit de la collection particulière dont fait partie la figurine ou, quand elle a été empruntée à une publication antérieure, de l’ouvrage où elle a été reproduite. A cette mention initiale s’ajoute l’énumération des répliques du même type qui se rencontrent soit dans d’autres galeries, soit dans d’autres recueils de monuments. Enfin, sous la rubrique ähnlich, « semblable », on a la liste des variantes connues du même type, de celles qui s’en rapprochent le plus.

          Dans leur brièveté, ces notes supposent de minutieux et méthodiques inventaires, dressés avec une admirable patience soit dans les cabinets de terres cuites publics ou privés, soit dans les bibliothèques. Il semble peu probable que quoi que ce soit d’important ait pu échapper à la diligente curiosité de l’auteur. Qu’il me permette seulement de lui signaler un oubli qui m’étonne. Dans le chapitre de l’introduction qui concerne Tanagra, il n’a pas cité la thèse latine d’Haussoullier, Quomodo sepulcra Tanagræi decoraverint (8°, 1884). Il y aurait trouvé plus de détails peut-être que dans le Δελτον et dans un mémoire de Rayet sur les fouilles de Tanagra, sur la disposition et l’âge des sépultures, sur la manière dont y sont rangés, suivant les différentes époques, les vases et les figurines.

          Ces figurines sont les seuls monuments modelés dans l’argile que comprenne le recueil. L’auteur prévient, dans sa préface, qu’il s’est astreint à laisser de côté les ornements d’architecture tirés de cette matière, les figures où celle-ci est employée à façonner des statues de grandeur naturelle, enfin les représentations votives de parties du corps humain, d’édifices et de meubles. Il n’a pas non plus fait entrer dans son recueil les masques, ni ces figures d’animaux qui ont presque toujours un caractère votif. Parmi les vases à reliefs, il n’a reproduit que ceux où, comme dans le vase de Cléomène, au Louvre, la forme, dans son ensemble, se rapproche de celle d’une statuette.

          Malgré les restrictions que s’est ainsi imposées M. Winter, son ouvrage renferme un nombre de figures très supérieur à celui que peuvent offrir à l’archéologue tous les autres recueils où ont été publiés des monuments de ce genre. Je ne sais pourquoi l’auteur ne donne nulle part — l’ignore-t-il lui-même ? — le chiffre total des images que contiennent ces deux gros volumes ; mais, par un calcul très simple, en prenant sept comme moyenne du nombre des figures qui sont réunies dans chaque page, on arrive à constater que, dans les 727 pages consacrées à ces représentations, il y a environ cinq mille dessins.

          A la fin de chaque volume, plusieurs pages d’additions et de corrections témoignent du soin avec lequel l’auteur s’est tenu au courant des trouvailles et des publications nouvelles pendant toute la durée de l’impression. Celle-ci, commencée en 1898, n’a été terminée qu’en 1903.

          Par l’analyse que nous avons présentée de ce beau livre, on peut juger du profit que les archéologues sont appelés à tirer de la possession et du maniement de ce recueil. L’Institut allemand a été bien inspiré en patronnant cette entreprise et en choisissant M. Winter pour la mener à bonne fin. L’ouvrage n’a qu’un défaut, son prix très élevé, qui est de 80 mark. Beaucoup de travailleurs seront arrêtés par ce prix ; bien à regret, ils devront renoncer à acquérir ce précieux instrument de comparaison et de recherche. Je ne critique pas le plan adopté. Il n’y a rien dans ces pages qui soit inutile. J’affirme pourtant que l’Institut, M. Winter et l’éditeur rendraient à nos études un service signalé s’ils consentaient à nous donner de ce grand ouvrage un abrégé qui serait conçu à peu près sur le plan de ces Répertoires des vases peints et de la statuaire grecque et romaine que nous devons à M. Salomon Reinach ; il ne devrait guère coûter davantage. Voici comment je comprendrais cette editio minor. Le format serait, autant que possible, l’in-octavo. Le chapitre préliminaire, intitulé : Die Fundstellen serait conservé ; il serait mis à jour ; il pourrait même, au besoin, être augmenté, sur quelques points, par une définition plus développée de certaines séries particulièrement intéressantes. Pour ce qui est du corps même de l’ouvrage, du recueil des figures, on aurait à faire là des changements plus importants, des sacrifices nécessaires. Toutes les images seraient peut-être à garder ; il ne semble pas y en avoir là deux qui soient issues du même moule ou que, du moins, au sortir de la matrice, le doigt et l’ébauchoir du modeleur n’ait pas différenciées par quelque variante introduite dans les attributs ou dans les détails de rajustement ; mais c’est sur le texte qui remplit le bas des pages que devraient surtout porter les réductions à opérer. De ce texte, on ne devrait laisser subsister que la note qui concerne la figurine reproduite. On en retrancherait toutes les indications relatives à des statuettes sensiblement pareilles et, à plus forte raison, toutes celles qui sont là groupées sous la mention ähnlich.

         Des données qui ont été groupées dans cet ouvrage par un considérable et méritoire effort, on garderait donc ainsi tout l’essentiel, la partie graphique, la collection des types méthodiquement classés, avec ce qu’il est indispensable de savoir sur la provenance des pièces par lesquelles chacun d’eux serait représenté ; mais, grâce à l’allégement du texte, aux suppressions qui y seraient résolument pratiquées, on pourrait réaliser sur les frais d’impression une notable économie, qui fournirait le moyen de mettre cet abrégé à la portée d’un bien plus grand nombre d’étudiants et de savants. Ceux qui voudraient étudier de très près cette catégorie de monuments consulteraient dans les bibliothèques le recueil complet et utiliseraient la masse énorme des renseignements qui y sont rassemblés ; mais ceux qui ne cherchent dans l’étude des figurines d’argile qu’une matière à d’utiles rapprochements avec les œuvres du grand art auraient ainsi sur leur table de travail un répertoire d’un usage commode qui leur faciliterait les recherches et les comparaisons suggestives. Par son activité constante et si bien réglée, l’Institut archéologique allemand contribue trop efficacement au progrès de nos études pour que nous ne nous sentions pas autorisé à lui recommander l’idée que nous venons d’exposer, à prier son conseil de la prendre en sérieuse considération.

G[eorges] P[errot]

(1) T. I, p. 164, fig. 2. Cf. Collignon, Histoire de la sculpture grecque, t. II, p. 234-235, fig. 115 et 116. Nous pourrions multiplier ce genre d’observations. Citons seulement, comme dépaysées là où elles apparaissent, les figures suivantes : p. 185, 4 et 5 ; 195, 4 ; p. 204, 5 ; p. 255, 2, 7 ; etc., etc.