Dangibeaud, Ch.: La mosaïque de Lescar est-elle romaine ? Étude d’archéologie et de folklore. Extrait de la Revue de Saintonge et d’Aunis, 1903.
( 1903)
Compte rendu par Joseph Déchelette, Revue Archéologique t. 3 (4e série), 1904-1, p. 185-186
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Ch. Dangibeaud. La mosaïque de Lescar est-elle romaine ? Étude d’archéologie et de folklore. Extrait de la Revue de Saintonge et d’Aunis, 1903.


          Il s’agit de la mosaïque de la cathédrale de Lescar, près de Pau, qui a fait l’objet de divers travaux et controverses (voir notamment un article de M. Paul Raymond dans cette Revue, 1866, I, p. 305 et pl. IX). Est-elle romaine ou romane ? Les avis sont partagés. M. Enlart, dans son nouveau Manuel d’archéologie (I, p. 708), la tient pour une imitation grossière d’un modèle romain. C’est, semble-t-il, M. Palustre qui, le premier, parmi les archéologues connus, a défendu l’hypothèse d’une origine antique. On avait découvert sur la mosaïque le mot AVFIO. Palustre y vit un nom d’ouvrier romain suivi du sigle d’Officina, hypothèse entièrement inacceptable car les mosaïques se font sur place et non pas dans un atelier, comme les produits céramiques ; d’ailleurs, comme l’observe M. Dangibeaud, les caractères épigraphiques appartiennent au moyen âge. Sur ce point, il ne saurait y avoir aucune hésitation. La mosaïque est romane.

          Reste à déterminer un détail inexpliqué du sujet. Il s’agit de scènes de chasse où figure un sagittaire dont la jambe droite, coupée au-dessous du genou, s’appuie sur la fourche d’une jambe de bois, nettement figurée. Cette représentation imprévue a naturellement provoqué bien des commentaires. M. Dangibeaud tente à son tour d’expliquer l’énigme. II ne me semble pas qu’il y soit entièrement parvenu, en s’appuyant sur certaines légendes superstitieuses. Mais il a eu le mérite de signaler trois fois le même homme à la jambe de bois sur les façades et les chapiteaux des églises de la Charente. Ces rapprochements sont fort curieux. C’est ainsi que sur un chapiteau de l’église de Colombier, on voit « un homme amputé comme celui de Lescar, la jambe repliée passée dans une fourche en bois, perçant avec un grand couteau le cou d’un animal hideux, tandis que de la main gauche il s’apprête à lui lancer un gros caillou et qu’il lui assène sur ses longues dents un violent coup de pilon ».

          Je ne puis admettre avec l’auteur que cette figuration se soit retrouvée sur des monuments antiques de la Gaule romaine. Le fragment de poterie sigillé qu’il reproduit page 17 n’a rien de commun avec l’invalide charcutais. D’ailleurs, il ne faut jamais chercher sur les vases rouges de la Gaule des représentations de légendes indigènes. On ne trouve pas le moindre élément gaulois dans cet art d’importation.

                                               J[oseph] D[échelette]