Audouin-Rouzeau, Fr. - Beyries, S. (dir.): Le travail du cuir, de la Préhistoire à nos jours. Actes des Rencontres d’Antibes, 18-20 octobre 2001, Ed. APDCA, Antibes 2002, 496 p.
(Ed. APDCA, Antibes 2002)
Compte rendu par Michel Feugère, Instrumentum, 2003-17, p. 33
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Sous la direction de Fr. Audouin-Rouzeau et S. Beyries : Le travail du cuir, de la Préhistoire à nos jours. Actes des Rencontres d’Antibes, 18-20 octobre 2001, , Ed. APDCA, Antibes 2002, 496 p.


La bibliographie archéologique sur le travail du cuir est si indigente, en particulier en langue française, que la publication de ce fort volume est déjà, en soi, un événement. Il, s’agit des Actes des XXIIe Rencontres Internationales d’Archéologie et d’Histoire d’Antibes, fort opportunément consacrées, en 2001, au travail du cuir, “presque absent des investigations archéologiques ou historiques” malgré son omniprésence dans les sociétés anciennes ou traditionnelles. Trente communications explorent donc pour nous les différents aspects de cette activité, depuis les temps les plus reculés jusqu’à l’aube du XXe siècle.

C’est peu dire que cet inventaire révèle, à travers l’extrême variété des usages du cuir, toute l’importance de cet artisanat presque oublié de nos jours. La qualité des produits de substitution que nous employons aujourd’hui masque à notre perception la place que prenait autrefois la peau animale sous ses différents aspects, cuir dur ou souple, peau, fourrure, parchemin … Comme le notent les éditeurs, l’histoire de l’artisanat du cuir reste largement à écrire, et nous sommes bien loin d’approcher non seulement sa place dans les cultures anciennes, mais aussi le statut des artisans et même les différentes étapes de la chaîne opératoire.

Faisant largement appel à l’ethnographie, l’anthropologie ou encore l’histoire récente, les communications explorent très largement des aspects novateurs, que ce soit sur le plan des techniques ou des implications socio-culturelles du travail du cuir, de l’acquisition de la matière première jusqu’à son traitement et à ses usages. Immergés dans ce contexte stimulant, les archéologues ne sont pas égaux devant la documentation ; mais la splendeur de certains vestiges, quand les contextes en permettent la conservation, doit inciter à la prudence. Que nous disposions ou non de restes matériels, le travail du cuir devait, partout, jouer un rôle de premier plan dans l’exploitation des ressources animales et la culture matérielle.

Si les vestiges matériels du travail du cuir antique sont rares, du moins sous nos latitudes, les installations de travail et les outils le sont tout autant, mais pour des raisons différentes ; une partie de l’outillage est si simple que sa reconnaissance est, déjà, une étape essentielle ; quant aux infrastructures liées au travail du cuir (bassins, aires de traitement …), leur attribution à cet artisanat va rarement de soi. Aussi faut-il que les cuves, dolia, amphores décolletées et autres installations, soient systématiquement interrogées sur les sites, pour que l’on ait une chance de voir apparaître dans les provinces occidentales, notamment, les ateliers qui nous manquent aujourd’hui.

Dans cette démarche salutaire, les quelques cas abordés dans le cadre de ce volume montrent à la fois les limites des approches actuelles et le vaste potentiel de cette recherche. Trop longtemps, l’artisanat n’a été abordé qu’à partir des produits conservés, laissant dans l’ombre tous les matériaux organiques sans autre raison que la commodité des archéologues. Il est temps de repenser l’étude des ressources, celle des contextes productifs, celle des sites de consommation, en y intégrant, autant que faire se peut, cette dimension oubliée. La démarche exemplaire développée par les organisateurs de ce colloque et les éditeurs de ces Actes, en ce qui concerne le cuir, doit nous y inciter