Saulcy, Ernest de: Etude sur la série des rois inscrits à la salle des ancêtres de Thouthmès III. 1 vol. in-8°
(Metz, F. Blanc 1863)
Compte rendu par P. de H., Revue Archéologique 9, 1864-5, 2e série, p. 309-311
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Etude sur la série des rois inscrits à la salle des ancêtres de Thoutmès III, par M. E. de Saulcy. Metz, F. Blanc, 1863. 1 vol. in-8.


Ægyptische Chronologie. Ein kritischer Versuch von J. Lieblein. Christiania, 1863.1 vol. in 8.


La chronologie égyptienne présente de grands problèmes qui pourront trouver un jour leur solution, grâce aux recherches incessantes des égyptologues, et surtout à la découverte de nouveaux monuments. En atten­dant des documents qui permettent de dissiper entièrement l’obscurité qui plane encore sur les dynasties pharaoniques, nous nous empressons de signaler aux archéologues les travaux récents de deux savants qui ont suivi des voies bien différentes pour arriver au même but. L’un, M. E. de Saulcy, a soumis à un examen très-attentif la célèbre liste de la salle de Karnak, dite des ancêtres de Thoutmès III, conservée maintenant à la Bibliothèque impériale de Paris. Le travail de ce savant a pour objet le classement chronologique des groupes de cartouches royaux qui sont rangés sur le monument dans des séries généalogiques. Pour restituer les noms qui manquent dans la liste de Karnak, M. de Saulcy a eu recours à d’autres monuments, tels que la table d’Abydos, le canon hiératique de Turin, etc., sur lesquels il s’appuie aussi pour corroborer ses vues. A cette occasion, l’auteur nous fait connaître une nouvelle .série de noms royaux encore inédite. Elle consiste en trente-quatre cartouches appartenant à seize rois et à deux reines des XVIIe, XVIIIe et XIXe dynasties, gravés sur une table à libation. Ce monument, qui n’est pas sans importance pour la chronologie égyptienne, fait partie de la collection du docteur Clot-Bey, que possède aujourd’hui le musée de Marseille, et il le livre à la publicité dans deux planches qui accompagnent le Mémoire. Après une étude appro­fondie de ces divers documents, M. de Saulcy arrive à la conclusion que, si l’ordre rigoureux de la succession n’est pas observé dans les listes mo­numentales, on doit au moins y reconnaître une loi qui divise les familles royales par groupes chronologiques ; puis il résume son travail par un canon de toutes les dynasties égyptiennes. En récapitulant la durée des dynasties, il arrive à l’an 4717 pour l’avénement de Ménès, et s’approche ainsi des chiffres proposés par M. Brugsch dans son Histoire d’Égypte.

M. Lieblein commence par examiner, sans les accepter, les différents systèmes chronologiques de Bœck, Bunsen et Lepsius. Il essaie ensuite d’éta­blir un nouveau canon, en prenant pour base les listes de Manéthon telles qu’elles ont été copiées par l’Africain et conservées par le SynceIle, rédac­tion généralement considérée comme la plus pure dans sa forme, la moins altérée, en un mot, la seule bonne. Arrivé à la xxve dynastie, où les dates fournies par les stèles du Sérapeum de Memphis sont en désaccord avec les chiffres de Manéthon, le savant Norwégien n’est pas embarrassé : il les fait concorder en supposant des règnes et fractions·de règnes simultanés ; cet expédient est simple, il peut même toucher à la vérité, mais jusqu’à présent, il est purement hypothétique et ne repose sur aucune donnée certaine. Parmi les identifications de quelques cartouches royaux avec les noms des pharaons de la liste manéthonienne, celle de Thoutmès-Sha­ma-ra avec le Chebron du prêtre Sybennite, semble être la plus heureuse. M. Lieblein termine aussi son travail par un tableau chronologique, mais il arrive à l’an 3893 pour l’avénement du roi Ménès, c’est-à-dire à un an près de la date donnée par M. Lepsius, tandis que, comme nous venons de le dire, M. E. de Saulcy place le même fait à l’an 4717. De semblables divergences dans les résultats des travaux d’hommes également sérieux et érudits nous montrent, que malheureusement, nous sommes encore loin de toucher à la solution des derniers problèmes de la chronologie égyptienne ; c’est ce que M. Brugsch constatait dernièrement dans son précieux recueil intitulé : Zeitschrift für Aegyptische Sprach-und Alterthumskunde (1), en rendant compte d’un autre ouvrage publié aussi en 1863, sur la chrono­logie égyptienne, par M. de Gumpach. L’auteur donne à cette occasion la liste suivante des dates attribuées par les chronologistes modernes à l’avénement de Ménès :

Champollion Figeac.    5867 av. J. C. De Bunsen.      3623 av. J. C.

Lesueur.                      5773    –          De Gumpach.  2785    –

Böckh.                        5702    –          Poole.             2717    –

Brugsch.                      4455    –          Wilkinson.        2330    –

Lepsius.                       3892    –          Palmer.            2224    –

Les arrangements chronologiques des trois premiers savants de cette liste ne sont pas soutenables aujourd’hui, et ceux des derniers, qui re­présentent l’école anglaise, sont restreints sous la pression de l’importance que ces savants attachent à la chronologie sacrée ; car, faire concorder les dates de la Bible avec celles des monuments semble être chose impossible. C’est donc dans les dates intermédiaires qu’il faut chercher la vérité, comme l’ont fait MM. E. de Saulcy et Lieblein.

P. de H.

 

(1) Août 1863, p. 19.