Grandmaison, Ch. L.: Procès-verbal du pillage par les Huguenots des reliques et joyaux de Saint­-Martin de Tours en mai et juin 1562, in-8°
(Tours, imprimerie Mame et Cie 1863)
Compte rendu par A. V., Revue Archéologique 10, 1864-5, 2e série, p. 415-416
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Procès-verbal du pillage par les Huguenots des reliques et joyaux de Saint­-Martin de Tours, en mai et juin 1562, publié pour la première fois par M. Ch. L. Grandmaison, archiviste du département d’Indre-et-Loire, membre de la Société des Bibliophiles de Touraine. Tours, imprimerie de Mame et Comp., 1863, in-8.


Les archéologues de Tours et du département d’Indre-et-Loire ont formé depuis quelques années, indépendamment de la Société archéologique, une seconde compagnie sous le titre de Bibliophiles de Touraine. Les deux sociétés, composées en partie des mêmes membres, marchent d’un parfait accord, comme deux sœurs exemptes de jalousie et de rivalité. Toutes deux publient parallèlement. La Société archéologique a produit des volumes, déjà nombreux et estimés, des mémoires, parmi lesquels se trouvent des œuvres d’assez longue haleine. Ainsi nous citerons, dans ce genre, le Cartulaire de Corméry, dû à la veine infatigable de M. l’abbé Bourassé, comme aussi le Catalogue de Dom Housseau qu’achève, en ce ce [sic] moment, un habile paléographe, employé aux manuscrits de la Bibliothèque impériale, M. E. Mabille.

De son côté, la Société des bibliophiles imprime ou réimprime des textes rares et suivis. Le procès-verbal de 1562 appartient à cette deuxième catégorie de publication et méritait d’y prendre place à tous égards. Ce curieux document intéresse vivement et à deux points de vue bien éloi­gnés l’un de l’autre ; il suscite, à la lecture, deux sentiments fort distincts.

Le premier est un sentiment moral, philosophique ou religieux. Il a, pour objet, le spectacle d’une exécution ou auto-da-fé d’œuvres d’art, faite par des iconoclastes, par des soldats, ayant à leur tête des sectaires. Nous ne ferons, quant à nous, qu’une réflexion sur ce point ; c’est que l’idée qui nous anime, nous archéologues d’aujourd’hui, manquait, à peu près également des deux parts, à l’époque de ce pillage. Ce qui, en 1562, pas­sionnait, d’un côté, les catholiques pour défendre et conserver ces ri­chesses, de l’autre, les protestants pour les piller et les détruire, – c’était la religion interprétée, ici et là, dans le sens le plus opposé.

Aujourd’hui, bien loin de là (et nous arrivons ainsi au deuxième aspect ci-dessus annoncé), tous les archéologues, même de communions religieuses différentes, s’accordent à regretter, sous ce rapport, les monu­ments curieux, si fatalement détruits à cette époque de discordes civiles.

Le procès-verbal de 1562, malheureusement, ne contient qu’un inven­taire très-sec et très-succint de ces objets d’art, sur lesquels nous·vou­drions trouver des développements d’autant plus descriptifs et d’autant plus étendus, que leur destruction nous empêche de nous en faire une idée réelle et directe (1).

M. Grandmaison s’est attaché autant que possible à combler cette lacune, dans une introduction substantielle et intéressante qu’il a placée en tête de cet opuscule. Le savant archiviste d’Indre-et-Loire a mis à contribution pour cet effet les rares notions qu’il recueille patiemment sur un pays jadis si riche en monuments ainsi qu’en textes historiques, et que le temps, non moins que les révolutions ont singulièrement appauvri sous ce double rapport. Ces considérations ne donnent que plus de prix à la nouvelle publication de MM. les Bibliophiles de Touraine.

A. V.

(1) Les principaux monuments qui décoraient la célèbre église de Saint-Martin de Tours et qui furent monnayés, en 1562, par les ordres de Louis de Bourbon, prince de Condé, chef des protestants, consistaient dans les objets ci-après énumérés :

1° La châsse ou tombeau de saint Martin, œuvre d’or, d’argent et de joaillerie. Cette châsse avait été restaurée à neuf par Charles VII, de 1430 à 1453, et enrichie par Louis XI.

2° La statue en argent de ce dernier prieuré, exécuté vers 1465.

3° Le chef de saint Martin, sa mitre, etc.

4° Une coupe dite de Charlemagne.

5° Un modèle ou représentation en orfévrerie du château de Montils, plus connu sous le nom de Plessis-lès-Tours.

6° Une effigie semblable du château de la Guerche en Bretagne. – Une multitude d’autres objets d’un très-grand prix, quoique d’un intérêt inférieur par rapport à ceux qui précèdent, composaient les splendides trésors de cette collégiale.