Petrucci, R.: La philosophie de la nature dans l’art d’Extrême-Orient. In-4, iv-160 p., avec 4 gravures en couleurs et 10 planches.
(Paris, Laurens 1911)
Compte rendu par Salomon Reinach, Revue Archéologique t. 17 (4e série), 1911-1, p. 470
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R. Petrucci. La philosophie de la nature dans l’art d’Extrême-Orient. In-4, iv-160 p., avec 4 gravures en couleurs et 10 planches. Paris, Laurens, s, d. [1911].


Dans l’Anthologie de la littérature japonaise publiée par M. Revon, j’ai noté cette stance d’Hagoromo ; « Sur la montagne haute de dix mille lieues, les nuages tout à coup ont surgi ; mais, par la lune brillante, la pluie est enfin chassée. Le temps est splendide dans le brouillard du matin, les vagues agitées viennent à la plaine des pins, au paysage de printemps. Dans la plaine du ciel, la lune demeure. Ce paysage, qui ravit l’âme, est sous les yeux du pauvre pêcheur. » Voilà bien l’attitude de l’Extrême[-]Oriental devant la nature : il lui donne toujours le pas sur l’homme ; il ne fait pas de celui-ci, comme les Grecs, le centre des choses, mais plutôt leur miroir, leur témoin ému. « A la base de leur civilisation tout entière, écrit M. Petrucci, nous trouvons une conception de la relativité des choses, retentissant aussi bien sur leurs cadres sociaux, leur structure psychologique, leurs idées philosophiques ou religieuses, que sur l’ensemble de leur art ». C’est ce dernier point que l’auteur développe, dans une langue toujours expressive, avec une connaissance personnelle et étendue des arts de l[‘]Extrême-Orient. Mais il n’a pas considéré la suite des œuvres indépendamment de leur contenu intellectuel ; au contraire, il a cherché à en pénétrer la signification profonde en insistant sur les philosophies dont l’art s’inspire, doctrines chinoises, taoisme [sic], confucianisme, bouddhisme, shinto japonais (1). On pardonnera volontiers à l’auteur d’être enthousiaste de son sujet ; mais quelque « jugement de valeur » qu’on porte sur l’art de l’Extrême-Orient, comparé à celui de la Grèce et de la Renaissance, M. Petrucci est désormais un de ceux qui auront contribué le plus efficacement à le faire connaître, à en démêler les idées directrices, les origines et l’évolution (2).

S[alomon] R[einach]

 

(1) « L’art a prêté aux plus vastes conceptions du génie philosophique l’émouvant commentaire des œuvres pleines de voluptés et de magnificences. C’est pourquoi, dépassant les limites de l’Extrême-Asie, son génie rayonne sur les grandes civilisations de la terre. Il a crée [sic] des images et des idées que rien ne peut abolir ; il participe de cette loi d’éternité qui s’attache au travail séculaire des hommes et que la fervente imagination des anciens âges attribuait aux dieux. » (P. 151.)

 (2) On lira aussi avec profit le compte rendu très étudié que M. Chavannes a publié de cet ouvrage dans la Gazette des Beaux-Arts d’avril 1911.