Gerstenberg, Kurt: Deutsche Sondergotik. In-8, 1910 p., avec 16 planches et 13 figures dans le texte.
(Munich, Delphin-Verlag 1914)
Compte rendu par Salomon Reinach, Revue Archéologique t. 24 (4e série), 1914-2, p. 165-166
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Kurt Gerstenberg. Deutsche Sondergotik. Munich, Delphin-Verlag, 1914. In-8, 1910 p., avec 16 planches et 13 figures dans le texte.


 

 C’est en 1843 seulement que Mertens, suivant l’exemple de Didron, affirma, dans une Revue viennoise, l’origine française du prétendu style gothique. On essaya pourtant de contenter l’amour-propre germanique en revendiquant pour l’Allemagne le développement de ce style. Mais une connaissance plus approfondie des monu­ments et de leurs dates a fait aussi justice de cette prétention. Reste la décadence gothique, généralement fait maltraitée par les critiques d’art. C’est un tort, nous dit-on, une grave injustice. « De même que les formes gothiques ont été créées comme l’expression de la race française, les formes du gothique tardif ont été modifiées dans le sens du caractère germanique. » On constate des changements analogues, dûs aux caractères ethniques, dans le gothique anglais et italien. « De cette transformation du style gothique sur le sol allemand naquit un nouveau style, qui contraste vivement avec le gothique français... Ce n’est pas que les mots isolés diffèrent, mais la syntaxe est autre ». Les désignations de gothique tardif et de flamboyant sont également impropres : le nouveau style doit s’appeler Sondergothik (gothique dissident)... « Même la Renaissance n’y met point fin, car l’esprit gothique continue à agir ; il n’y a, qu’une interruption apparente dans l’emploi de certaines formes. » Dehio a eu raison d’annexer au gothique tardif toute la Renaissance allemande ; il a aussi signalé en Allemagne, vers 1580, un renouveau complet du sentiment gothique des formes. » On voit la thèse de l’auteur qui, malgré l’abus fait du mot race, peste de la science comme de la politique, mérite d’autant plus un examen sérieux que les faits essentiels dont elle s’autorise ne sont méconnus de personne. Il serait non moins facile de montrer que le « rococo allemand » et le « Louis XV liégeois » diffèrent, par suite des différences de milieux, des styles français qu’ils imitent et déforment ; on montrerait aussi que les ouvriers allemands vivant à Paris, auxquels on doit les chefs-d’œuvre du style Louis XVI, sont devenus, dans le milieu parisien, tout autre chose que des Allemands. Mais il y a loin de là à dire, par exemple (p. 112) ; « La mouvement [sic] dans l’art et dans le langage sert d’expression à un caractère fondamental et intime de l’esprit germanique » (p. 177) ou à qualifier le gothique dissident de « style racial » (p. 115). Il faudrait laisser aux journalistes de pareils propos, qui dissimulent des phénomènes complexes sous des mots vagues.

S[alomon] R[einach]