Al-Dbiyat, Mohamed - Mouton, Michel (dir. ): Stratégies d’acquisition de l’eau et société au Moyen-Orient depuis l’antiquité, 222 pages, ISBN 978-2-35159-150-5, 45 euros.
(Institut Français du Proche-Orient, Beyrouth 2009)
 
Rezension von Christophe Nicolle, CNRS (Collège de France)
 
Anzahl Wörter : 3474 Wörter
Online publiziert am 2013-12-13
Zitat: Histara les comptes rendus (ISSN 2100-0700).
Link: http://histara.sorbonne.fr/cr.php?cr=1064
Bestellen Sie dieses Buch
 
 

 

          L’ouvrage regroupe douze contributions sur le thème de l’acquisition de l’eau au Moyen-Orient. Présentées selon un ordre chronologique, elles couvrent de manière inégale une très longue période depuis le IIIe millénaire av. n. è. jusqu’à l’époque actuelle avec des exemples provenant principalement de Syrie mais aussi de régions variées (Mésopotamie, Turkménistan, Yémen, Jordanie). Pour une raison inconnue, les éditeurs ne précisent pas l’origine et la finalité de ce projet éditorial. Il s’agit en fait de la publication de communications présentées lors d’une table ronde "composée majoritairement d’archéologues" (p. 13) qui s’est tenue à l’Institut français du Proche-Orient à Damas en 2004. Cette origine explique la forte représentation des études portant sur les zones steppiques à tendance aride du Levant. La diversité des exemples étudiés peut donner à l’ouvrage une impression d’hétérogénéité. Toutefois, sa partie introductive fournit de manière habile le lien qui peut sembler lui manquer. M. Mouton (p. 7-10) souligne quelques-unes des caractéristiques récurrentes des cas présentés tel que la pérennité et l’aspect cumulatif des aménagements liés au captage et au stockage de l’eau. Il y a aussi le lien de solidarité autour d’un intérêt collectif qui permet de gérer les aménagements de manière communautaire et détermine des territoires, mais ce qui n’empêche pas souvent les conflits et parfois la confiscation du réseau au profit de pouvoirs centralisateurs. Par ailleurs, l’acquisition de l’eau peut revêtir une dimension symbolique et avoir un rôle sacré, civique ou être un élément dans des politiques de valorisation sociale et de prestige politique. Il s’agit de considérations très générales voire intemporelles. Comme B. Lafont le souligne (p. 12), les grandes études comme celle menée en son temps par K. A. Wittvogel sur les "civilisations hydrauliques" sont depuis les années 80 remplacées par des études régionales tenant compte des spécificités des terroirs. À ce propos, c’est  bien l’importante spécificité des terroirs dans les modes d’acquisition de l’eau et la variété  de l’organisation sociale qui ressort de ces articles dont l’intérêt est par ailleurs indéniable. Plus qu’une synthèse, l’ouvrage doit donc être envisagé comme un état de la question des recherches en la matière par la communauté archéologique française travaillant sur quatre zones géographiques différentes, une sorte de mise à jour d’un colloque qui s’était tenu sur le même thème à Damas dix-sept ans auparavant (cf. B. Geyer (éd.) 1990, Techniques et pratiques hydro-agricoles traditionnelles en domaine irrigué, approche pluridisciplinaire des modes de culture avant la motorisation en Syrie. Actes du colloque de Damas 27 juin-1er juillet 1987, B.A.H., Paris).

 

          Le cas des grandes vallées fluviales est abordé par B. Laffont (p. 11-23) qui souligne,  avec l’exemple de Mari sur le Moyen-Euphrate, la difficulté à dater des systèmes de canaux souvent repris à différentes époques. Chaque archéologue tend à attribuer à la période qu’il étudie ces réalisations. Pour la Basse-Mésopotamie, les textes documentent les conflits entre cités que pouvaient engendrer le contrôle des canaux et un accaparement de l’eau. Par ailleurs, on constate dès le IIIe millénaire (IIIe Dynastie d’Ur) des épisodes de très forte centralisation administrative de la gestion de l’eau par un pouvoir étatique.

 

          Un autre exemple d’irrigation fluviale est présenté par l’archéologue O. Lecomte (p. 69-77) dans la vallée fluviale du Dehistan, une région au climat semi-désertique de l’Hyrcanie (actuel Turkménistan) traversée par le fleuve Atrek. Quatre grandes périodes d’occupation y ont été reconnues. La plus ancienne (XIVe-Ve s. av. J.-C.) voit l’arrivée d’une population maîtrisant les techniques de l’irrigation fluviale. Cette société de type proto-étatique vit dans un réseau d’établissement peu hiérarchisé et non urbain. Composée de confédérations tribales, sa gestion du réseau d’irrigation est supposée être de type communautaire et interdépendante. À la période sassanide, conjointement à un abandon de la partie sud de la plaine, il y a un développement considérable de ce réseau d’irrigation vers le nord-ouest. Une position en limite hiérarchisée de l’empire sassanide pourrait expliquer cette réorganisation qui entraîna une surcharge de travail du fait de l’allongement du réseau d’irrigation alors contrôlé par les élites locales habitant des bourgs fortifiés et agissant sous le contrôle des rois sassanides. Au VIIIe siècle apr. J.-C., la domination arabe marque le début d’une nouvelle phase de développement. Profitant du potentiel agricole permis par le réseau d’irrigation en place depuis plus d’un millénaire et du passage d’une importante voie commerciale entre l’Asie centrale et le nord-est iranien qui désenclave la région, la population s’accroît considérablement avec pour la première fois la création de véritables villes comme celle de Misrian (210 ha).

 

          Avec la présentation de la région semi-aride des Basses-Terres du Yémen (M. Mouton, p. 79-95), on passe à une irrigation à partir de cours d’eau saisonniers qui prend place dans une série de vallées longues de 100 à 150 km pour une largeur moyenne de 5 km. Un système d’irrigation y a été construit au fil du temps, sans doute au tournant des IVe-IIIe millénaires. Selon un mouvement d’amont en aval, plusieurs phases d’occupation et d’organisation sont proposées. Dans une première étape, le développement du système d’irrigation se fait à partir des wadis secondaires dont le faible débit de l’eau était capté par des digues en terre et distribué par des murets de dérivation et des bassins répartiteurs irriguant ainsi des surfaces de culture réduites. Les populations seraient ensuite descendues en aval où les flux saisonniers sont plus faibles mais les surfaces agricoles plus importantes. L’auteur envisage un système de gestion communautaire fondé sur la réciprocité et la cohésion des groupes conscients de leurs intérêts communs puisque ce sont les populations installées en tête de wadis qui contrôlent le débit de l’eau de la vallée et que toute nouvelle installation en aval doit se faire avec leurs accords. Une troisième phase correspond à un développement maximal de ces réseaux d’irrigation dont l’ampleur nécessite alors un processus de délégation d’une gestion de l’eau (instauration de "maitres des eaux") devenu de ce fait trop complexe sans que l’on puisse véritablement parler de centralisation.

 

          Trois autres articles exposent les résultats d’une vaste prospection réalisée sous la direction de B. Geyer sur une superficie de 10.000 km² dans la frange Ouest de la Badya al-Sham. Dans une région a priori peu propice à l’homme du fait d’une aridité climatique, pas moins de 1000 sites ont été répertoriés avec six grandes périodes d’occupation (Néolithique, Bronze, Hellénistique, Romaine, Byzantine et actuelle) (p. 25-43). Lors de ces périodes, des groupes d’hommes ont su exploiter les caractéristiques du milieu naturel pour utiliser l’eau de pluie. À la période néolithique, il s’agit de simples mares aménagées en de petites réserves d’eau temporaires mais suffisantes pour des groupes de passage (chasseurs ou pasteurs). La période du Bronze ancien IV est une première phase de mise en culture de cette zone aride liée par une capacité acquise à creuser avec des outils en métal des puits dans le socle basaltique. Cette expansion humaine vers l’est correspond à la création de petits établissements où se mêlent sédentaires et pasteurs mobiles, dont la petite ville de Tell Rawda, caractéristique avec son plan circulaire et actuellement fouillée par une mission franco-syrienne. La période byzantine qui représente une autre période importante d’occupation voit la généralisation de l’usage de la citerne. La nature des installations de cette époque permet de reconstituer, selon une graduation ouest-est, différentes approches de l’acquisition et de l’utilisation des ressources en eau, allant pour les zones ouest les plus favorables d’une culture céréalière fluviale à la zone la plus à l’est où seul un élevage extensif est possible.

 

          M. Al-Dbiyat (p. 179-187) prolonge cette étude d’une zone abandonnée à la suite des invasions mongoles de la fin du XIIIe siècle et réoccupée seulement dans la seconde moitié du XIXe siècle par un mouvement de fixation de population de minorités encouragé par le pouvoir ottoman. Ainsi en 1848, l’ancienne ville de Salamya est réoccupée et les anciens aménagements d’approvisionnements en eau de l’époque byzantine réutilisés. Une enquête ethnographique auprès des anciens a permis à l’auteur de comprendre les modalités de répartition de ces nouvelles terres entre les différentes familles. L’eau fournie par les qanats était gérée par un contrôleur nommé par la collectivité puis par la municipalité de la ville contre le paiement d’une taxe. L’équilibre environnemental entre les ressources en eau disponible et son utilisation a été rompu par l’introduction de la culture du coton dans les années cinquante, qui a entrainé une baisse drastique du niveau des nappes phréatiques et le recours à des puits avec pompage mécanique, asséchés à leur tour. R. Jaubert et ses collègues (p. 189-200) analysent une étude réalisée en 2000 par la Banque mondiale sur cette question de la surexploitation des eaux souterraines (de 30 puits dans les années cinquante, on est passé à 5500 en 2000). L’enquête fournit de nombreux chiffres et renseignements sur l’utilisation de l’eau et laisse transparaître une situation moins dramatique et surtout plus contrastée d’un village à l’autre que ne le laisse supposer le rapport de la Banque mondiale et rend critiquables pour les auteurs les solutions parfois extrêmes proposées, qui ne tiennent pas compte des particularités et des enjeux locaux.

 

          Une autre zone de la Badya étudiée est la région du Hauran en Syrie du Sud. Sur l’épanchement basaltique du Leja (environ 450 km²), une étude des ressources et des aménagements s’appuyant sur une analyse spatiale de la microtopographie a permis de mettre en évidence un réseau de rivières souterraines (F. Braemer et G. Davtian, p. 45-68). Il alimente une nappe phréatique à laquelle il est possible d’accéder par des étangs, des sources ou des puits. S’y ajoute la collecte des eaux de ruissellement avec un stockage dans des citernes. Les différentes techniques utilisées pour capter, stocker et distribuer l’eau ont été soigneusement analysées et sont présentées et illustrées par quelques exemples qui montrent l’excellente adaptation des populations nomades ou sédentaires aux conditions particulières du relief basaltique. La variété des techniques mobilisées signale la variété culturelle et des modes de vie des groupes qui se sont succédés dans la région. Les aménagements profitent aussi bien à des petits groupes de nomades qu’à des groupes de sédentaires numériquement importants qui habitent à partir du Bronze ancien II dans des établissements parfois puissamment fortifiés. Le niveau technique des aménagements est variable. Les plus simples aménagent le territoire sur de courtes distances et desservent un village ou un hameau. Les plus complexes traversent plusieurs bassins-versants et alimentent plusieurs villages. Certaines de ces techniques sont plus tardives que d’autres, comme les barrages sur les wadis qui n’apparaissent pas avant la période romaine. Cette diversité et la variabilité de la sophistication des systèmes d’acquisition de l’eau révèlent la pluralité, parfois simultanée, des stratégies de contrôle et d’utilisation.

 

          La ville voisine de Bosra a fait l’objet d’une étude pour la période classique (J.-M. Dentzer et al., p. 107-132). Son approvisionnement en eau provient pour partie d’une source pérenne contigüe, mais aussi d’un système de collecte d’eau sur le vaste bassin-versant du Djebel al-’Arab installé à une date indéterminée (possiblement dès le IVe millénaire). En amont et à une altitude supérieure à la ville, des sources et des tronçons de wadis sont aménagés, des canaux de dérivation sont installés, des petits barrages sont construits. Le système servait tout aussi bien à alimenter la population en eau qu’à permettre une irrigation de certaines zones agricoles. À ce dispositif simple et efficace fut adjoint, à une période ultérieure, un réseau de canaux de jonction et de dérivation destinés à renforcer le débit de certains wadis et à alimenter également les zones rurales. Des inscriptions tardives entre 295-365 de n. è. témoignent que de tels aménagements étaient alors le fait de communautés rurales et de notables villageois. Dès la seconde moitié du Ier siècle av. n. è., on note la réalisation de travaux d’aménagement de plus grande ampleur (construction d’un très grand réservoir datée par des inscriptions nabatéennes). La tendance s’est apparemment amplifiée en 106 de notre ère quand la ville, devenue la capitale de la "province d’Arabie", a été transformée par plusieurs programmes de construction et d’urbanisme. Les auteurs associent à un besoin d’eau supplémentaire la construction d’aqueducs documentés par les textes et proposent d’y voir le passage d’un système saisonnier de niveau local intégré à un système pérenne d’un niveau suprarégional relevant de l’État. Notons que la fouille restreinte d’un tronçon de l’un de ces aqueducs n’a cependant révélé qu’une utilisation plus tardive du dispositif dans un système de meunerie à la période byzantine (Ve siècle) puis aux époques omeyyade et ayyoubide-mamelouk.

 

          Les auteurs font une comparaison avec Pétra (Jordanie du Sud) où trois gradations similaires de la gestion de l’eau sont mises en évidence. L’exposé est complété par P. Gentelle (p. 133-148) qui s’intéresse principalement à l’aménagement du terroir dans un rayon d’une vingtaine de km alentour de Pétra dont il souligne l’importance pour le développement de la ville. Selon lui, une première étape voit l’installation des Edomites dès le Xe siècle av. n. è. qui construisent les premières maisons et commencent à épierrer des champs. Le système de l’eau est de dimensions restreintes. La récupération des eaux de pluie se fait par des rigoles creusées dans la roche. Une échelle familiale ou tribale de fonctionnement est supposée. La deuxième étape identifiée est celle de l’arrivée des Nabatéens au IVe siècle av. n. è. Ils aménagent les pentes avec des murets, construisant des barrages dans des petites gorges, associés à des réservoirs. Ces aménagements sont de dimensions et d’emprise modestes. Ils sont selon lui le fait d’une utilisation de l’eau dans un cadre familial élargi ou clanique qui semble relever d’un système rural où l’on pratique sans doute une agriculture céréalière pluviale. Quant au début du IIe siècle, Pétra devient une ville, ce réseau ne suffit plus et la puissance publique (un souverain nabatéen ou romain) met alors en place un nouveau système de captage des sources lointaines et de l’eau du wadi Musa et un réseau de canalisations (parfois creusées, parfois en conduits de terre cuite) convergeant vers le centre de la ville. Au VIe siècle apr. J.-C., la région, frappée par la crise climatique qui affecte l’ensemble du Moyen-Orient, est abandonnée, entraînant la ruine de la plupart des aménagements susmentionnés.

 

          Plus à l’est, dans la Badya, D. Genequand (p. 157-177) montre comment les califes omeyyades ont parfois développé une politique de l’eau dans un souci d’affirmation de leur pouvoir, notamment avec les fameux "châteaux du désert". Sur la trentaine d’exemples connus depuis le secteur de Palmyre jusqu’à Aqaba, il en étudie plus particulièrement quatre qui illustrent des facettes différentes d’une même politique d’aménagement de la zone steppique. Autour d’un palais plus ou moins somptueux et auquel peuvent être adjoints d’autres bâtiments comme des bains, des mosquées et quelques habitations, une vaste zone est aménagée pour amener de l’eau à partir de crues de wadis ou de sources pérennes par le biais de grands barrages ou d’aqueducs pouvant atteindre 27 km de long et la stocker dans de vastes réservoirs. Cette eau sert aussi à irriguer une zone agricole plus ou moins grande. L’auteur reprend l’hypothèse de H. Gaube ("Die syrischen Wüstenschlösser. Einige wirtschaftliche und politische Gesichtspunkte zu ihrer Entstehung", ZDPV 95/2, p. 182-209, 1979) qui voit dans ces "châteaux" des lieux de rencontre saisonniers entre les Omeyyades et les grandes tribus de la steppe syrienne, principal support du califat. Ces lieux servaient à monumentaliser tant par la richesse de l’architecture palatiale que par la capacité à aménager un terroir aride, la magnificence, l’autorité et la puissance des commanditaires.

 

          Un autre ensemble régional spécifique est constitué par les "villes mortes" de Syrie du nord, un ensemble de villages antiques implantés dans des collines calcaires sur environ 2000 km² (M. Abdulkarim et al., p. 149-156). Il y a là, en surface, les témoignages d’une culture rurale qui a su exploiter les ressources pluviales. L’étude du village de Sergilla, a permis de reconstituer les différentes phases des installations. Les premières maisons ont été construites en tenant compte du relief fortement impacté par des phénomènes de karstification et installé dans le lit d’un wadi tari durant le IIe siècle apr. J.-C. Une seconde phase intervient au Ve siècle avec la construction, en périphérie du village, de grands bâtiments en pierre de taille accompagnés d’aménagements hydrauliques (puits, conduits karstiques, citernes) visant à un système domestique autarcique. À cet ensemble villageois de réseaux individuels se juxtapose un système à l’échelle du village pour les activités agricoles avec un captage des résurgences par un réseau de canaux entaillés et de grandes citernes permettant d’une part l’irrigation de cultures par gravitation et d’autre part la fabrication de l’huile d’olive et du vin, les principales ressources de la région. Une gestion collective de l’eau se constate aussi dans la gestion des risques d’inondation avec la construction d’une grande citerne dotée de vannes immédiatement en amont du village.

 

          Enfin, la dimension symbolique de l’acquisition de l’eau est abordée par J.-B. Yon (p. 97-106) dans l’exploitation de la source d’Efqa, une des principales ressources en eau de l’oasis de Palmyre. Les témoignages écrits et iconographiques dénotent trois niveaux d’appréhension. Pour la gestion de l’eau à destination de l’irrigation de l’oasis et des champs environnants, la source était contrôlée par les grandes familles de Palmyre. Au niveau religieux et symbolique, il apparaît qu’elle servait à définir l’identité civique de Palmyre. On note le rôle prééminent du dieu des sources Iaribôl et l’importance des fonctions rattachées à sa gestion et son entretien, choisies par ce dieu. Ainsi, la fonction des épimélètes ou « chefs de source » a pu constituer une dimension de charge religieuse honorifique. L’existence possible d’un sanctuaire autour de la source à des fins de guérison est envisagée sans réelle certitude. Toutefois, des dépôts votifs à un autre dieu anonyme signalent que la source jouait un rôle important dans la vie religieuse des catégories plus humbles de la population de Palmyre. Enfin, à cette sphère du religieux vient se surimposer un contrôle par les autorités impériales au moyen de taxes sur l’usage de l’eau.

 

          Il s’agit donc d’un ouvrage majeur qui fait le point sur l’avancée des recherches régionales sur la question de l’acquisition et de la gestion de l’eau dans le Moyen-Orient. Les résultats présentés sont issus le plus souvent de données de première main et s’appuient sur une documentation graphique de qualité. Cependant, hormis les régularités signalées en introduction, il est difficile d’en proposer une synthèse, d’autant plus que l’on constate qu’à une variété des terroirs correspond une diversité des solutions. On notera, comme le font plusieurs contributeurs, qu’il n’est plus possible de faire correspondre, de manière automatique, à un niveau de développement de ces systèmes, une forme d’organisation sociale. En outre, me semble-t-il, contrairement à ce qui est écrit dans le texte en rabat de couverture, si les stratégies d’acquisition de l’eau peuvent changer les modes de vie, il n’y a pas là d’exemple où elles bouleversent les structures de la société.

 

Sommaire

  • Quelques réflexions finales en forme d’introduction, p. 7-10
    Michel Mouton
     
  • I. Eau, pouvoir et société dans l’Orient ancien : approches théoriques, travaux de terrain et documentation écrite, p. 11-23
    Bertrand Lafont
     
  • II. Pratiques d‘acquisition de l‘eau et modalités de peuplement dans les Marges arides de la Syrie du nord, p. 25-43 
    Bernard Geyer 
     
  • III. L’eau du Hauran : captages et gestion depuis le Bronze ancien, p. 45-68 
    Frank Braemer et Gourguen Davtian
     
  • IV. Origine des cultures agricoles du Dehistan (Sud-Ouest Turkménistan). Mise en œuvre et gestion de l’irrigation de l’âge du Fer à la période islamique, p. 69-77
    Olivier Lecomte
     
  • V. L’eau en partage : territorialité, réseaux d’irrigation et formation des sociétés antiques dans les Basses-Terres du Yémen, p. 79-95 
    Michel Mouton
     
  • VI. La gestion de l’eau à Palmyre : l’exemple de la source Efqa, p. 97-106 
    Jean-Baptiste Yon 
     
  • VII. Techniques et systèmes d’acquisition de l’eau à Bosra : initiatives de groupes et pouvoirs politiques, p. 107-132
    Jean-Marie Dentzer, Jacques Leblanc et Arnaud Chevalier 
     
  • VIII. Aménagement du territoire agricole de la ville Pétra : la terre et l’eau, p. 133-148 
    Pierre Gentelle 
     
  • IX. La gestion de l’eau dans un village des campagnes de la Syrie du Nord, p. 149-156 
    Mamoun Abdulkarim et Gérard Charpentier 
     
  • X. Économie de production, affirmation du pouvoir et dolce vita : aspects de la politique de l’eau sous les Omeyyades au Bilad al-Sham, p. 157-177
    Denis Genequand 
     
  • XI. Eau et peuplement dans les Marges arides : le cas de la région de Salamya en Syrie centrale, p. 179-187 
    Mohamed al-Dbiyat 
     
  • XII. Exploitation des eaux souterraines en Syrie centrale : enjeux politiques et réalités locales , p. 189-200
    Ronald Jaubert, Mohamed al-Dbiyat, Françoise Debaine et François Zwahlen