Stansbury-O’Donnell, Mark D. : Looking at Greek Art. Paperback, 300 p., 82 b/w illus., 253 x 215 mm, ISBN: 9780521125574, £19.99
(Cambridge University Press, Cambridge 2011)
 
Rezension von Isabelle Algrain, Université libre de Bruxelles
 
Anzahl Wörter : 919 Wörter
Online publiziert am 2011-09-13
Zitat: Histara les comptes rendus (ISSN 2100-0700).
Link: http://histara.sorbonne.fr/cr.php?cr=1347
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          L’ouvrage de Mark D. Stansbury-O’Donnell a pour ambition de présenter au lecteur les différentes manières de « regarder » et d’analyser les oeuvres et objets de l’Antiquité grecque. Comme l’expose l’auteur, le livre cible principalement deux types de public : d’une part les étudiants en histoire de l’art et archéologie et d’autre part un public d’amateurs confronté à des oeuvres d’art grecques au sein des institutions muséales. L’ouvrage, divisé en cinq chapitres, présente au lecteur une grande diversité de questionnements que l’on peut se poser face à une oeuvre grecque et les méthodes qui, combinées ou employées seules, permettent d’y apporter des éléments de réponses. Afin de permettre une meilleure compréhension des différentes approches théoriques, l’auteur emploie un grand nombre d’exemples très bien choisis afin de les soumettre aux méthodes d’analyse exposées. Il reprend par ailleurs trois oeuvres emblématiques comme exemples récurrents tout au long de l’ouvrage - la frise du trésor de Siphnos, un miroir en bronze argien et une coupe à figure rouge de Douris. Ces derniers permettent de montrer au lecteur la pertinence d’une pluridisciplinarité des approches dans l’analyse des oeuvres grecques.

 

          Dans un chapitre introductif intitulé « Study and Presentation of Greek Art », l’auteur rappelle que les modes actuels de présentation de l’art grec - principalement dans un espace muséal ou dans les livres d’art - influencent notre manière de les appréhender. L’observateur reste un interprète non objectif dont les questionnements différeront en fonction de l’environnement dans lequel est présenté une oeuvre donnée.

 

          Dans le chapitre 2, « Description and Visual Analysis », l’auteur s’intéresse aux premiers questionnements d’un observateur face à une œuvre grecque, qui portent principalement sur le style, la chronologie de l’objet et son auteur. La première étape de ce processus d’identification est la description qui, comme le rappelle très justement l’auteur, ne peut jamais être entièrement objective en raison du contexte de présentation de l’oeuvre et du spectateur qui l’observe. Mark D. Stansbury-O’Donnell envisage par la suite une approche par la comparaison avec d’autres objets similaires pour identifier la pièce, la dater et l’attribuer.

 

          Le chapitre 3, intitulé « Meaning », s’intéresse à l’interprétation et à la signification des images. A côté d’une analyse plus conventionnelle basée sur une étude iconographique, l’auteur présente également d’autres approches qui permettent de combler les limitations de l’iconographie, comme la sémiotique, l’analyse structurale, la théorie de l’information et la répétition, l’herméneutique, le post-structuralisme et la réception par le spectateur. Les différentes approches théoriques présentées dans ce chapitre sont autant d’approches qui permettent de définir les personnages représentés, la signification de l’image pour un spectateur antique, les liens entre image et source textuelle ou encore les principes ou les idéologies qui sous-tendent la représentation. L’emploi d’une série de tableaux tout au long du chapitre expliquant les termes techniques spécifiques à chacune des théories exposées représente une aide précieuse pour le lecteur.

 

          Le chapitre suivant est dévolu au contexte de production et d’utilisation des objets. Plusieurs cas d’études sont utilisés pour mettre en lumière les théories économiques marxistes, en association avec une analyse politique. L’auteur expose par après les différents contextes, publics ou privés, dans lesquels on peut rencontrer une oeuvre antique et sa signification au sein de ces contextes. Il présente par ailleurs des approches plus anthropologiques par le biais de la théorie de l’agentivité d’Alfred Gell, de la ritual analysis et de la biographie sociale des objets. Les méthodes d’étude exposées ici doivent essentiellement permettre à l’étudiant ou à l’amateur éclairé de mieux appréhender le milieu culturel et social dans lequel s’intègre un objet, sa valeur pour son propriétaire mais également la manière dont il participe à l’économie de son époque.

 

          Le dernier chapitre, intitulé « Identity », envisage les différentes personnes en contact avec un objet et la manière dont celui-ci peut être perçu en fonction de leur appartenance sociale, sexuelle, ethnique ou géographique. Cette partie débute par un exposé succinct des théories de Sigmund Freud et de Jacques Lacan telles qu’elles peuvent être adaptées à l’art. Il envisage par la suite différents types d’approches relatifs à l’identité comme par exemple les gender studies, le féminisme ou les études sur la diffusion culturelle. Conscient qu’il n’existe pas de procédure spécifique et définie pour procéder à ce type d’analyse, l’auteur présente un grand nombre de cas qui sont analysés par le biais d’une approche pluridisciplinaire, combinant les diverses méthodologies exposées jusque là.

 

          Le livre se termine sur une brève conclusion présentant Pausanias comme un des premiers à avoir envisagé de multiples questionnements face à un objet d’art. On trouve également un glossaire qui reprend les termes techniques utilisés pour expliquer les méthodes d’analyse présentées tout au long de l’ouvrage.

 

          En conclusion, on pourra souligner l’apport important de ce livre qui comble un vide dans la bibliographie puisqu’il regroupe pour la première fois les méthodes et les théories uniquement propres à l’art grec. De nombreux exemples viennent éclairer de manière judicieuse les exposés théoriques. On regrettera toutefois que la bibliographie ne comprenne pas les références aux travaux de personnages importants cités dans le livre, comme par exemple ceux de Sigmund Freud, Karl Marx ou Jacques Lacan. Ceci est un peu paradoxal puisque cette publication s’adresse avant tout à un public d’étudiants et d’amateurs sans doute peu familier avec ces références. Ces quelques remarques n’enlèvent rien à la valeur de cet ouvrage qui a le mérite d’offrir à l’étudiant un manuel théorique savamment construit présentant les différentes méthodes d’analyse employées pour appréhender et comprendre les oeuvres d’art grecques.