Catalo, Jean - Cazes, Quitterie (dir.): Toulouse au Moyen Âge, 1000 ans d’histoire urbaine. Relié sous jaquette, 272 p., 21,5 x 29, quadrichromie, ISBN 978-2-86266-630-3, 45 €
(Loubatières, Portet-sur-Garonne 2010)
 
Compte rendu par Thomas Creissen, Université François Rabelais de Tours
 
Nombre de mots : 3531 mots
Publié en ligne le 2018-05-30
Citation: Histara les comptes rendus (ISSN 2100-0700).
Lien: http://histara.sorbonne.fr/cr.php?cr=1497
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          Cet ouvrage dresse un panorama de la ville de Toulouse au cours d’un long Moyen Âge : de l’établissement de la capitale des Wisigoths en 418 aux environs de 1480. Le propos se fonde sur le résultat des fouilles archéologiques préventives réalisées dans les années 1990-2000, mais aussi sur une reprise des sources textuelles.

 

          L’avant-propos insiste sur le caractère pluridisciplinaire de l’équipe : archéologues, historien, historiens de l’art, géographe et cartographe. Au total, huit personnes ont contribué à sa rédaction. La disparité des profils permet de fournir une vision plus complète et plus complexe du sujet. Il est indéniable que le caractère polyphonique de l’ouvrage en constitue l’une des richesses. Il en explique aussi certaines faiblesses : il manque parfois un véritable travail d’harmonisation. Le texte est émaillé de quelques incohérences ou approximations. Par exemple, il est plusieurs fois fait allusion au grand fossé entourant Saint-Sernin dont la datation oscille entre les VIe et Xe siècle chez certains (p. 37), mais qui est indiqué comme existant au VIe siècle dans une autre contribution (p. 40). Enfin, le lectorat n’étant pas exclusivement constitué de spécialistes de Toulouse, quelques évidences auraient mérité d’être rappelées, quelques précisions apportées. Un exemple encore : la plupart des plans présentés ont pour trame de fond le « cadastre de 1550 », un document constamment évoqué mais qui n’est jamais vraiment présenté.

 

         L’introduction de Gérard Pradalié propose un bilan historiographique des recherches consacrées à Toulouse. Elle est agrémentée de quelques belles représentations. Hélas, très certainement du fait des contraintes éditoriales, celles-ci restent bien petites, un « reproche » qui vaut malheureusement pour l’essentiel de l’ouvrage.

 

         Viennent ensuite 5 chapitres chronologiques qui présentent tous une architecture à peu près similaire : ils débutent par une introduction historique de G. Pradalié, toujours claire et concise, et se terminent par une partie consacrée au « monde des morts » rédigée par Didier Paya. 

 

         Le premier chapitre (p. 13-40) s’intitule « De la ville antique à la ville médiévale, six siècles de gestation ». Dans son introduction historique, G. Pradalié ne peut qu’insister sur l’indigence des sources textuelles : entre le Ve siècle et la fin de la période carolingienne, les données sont quasi inexistantes, ce qui ne fait que souligner l’importance des recherches archéologiques. L’évolution historique est brossée à grands traits : imposition du pouvoir Wisigoth, contrôle Franc à partir de 508, conquête carolingienne et intégration à l’Empire avant l’affirmation d’une autonomie comtale.

 

         Vient ensuite une présentation de la ville antique et de ses principaux aménagements rédigée par Quitterie Cazes. Le terme de la période est marqué par la construction des premières églises : le groupe épiscopal probablement ; l’église Saint-Sernin et Saint-Pierre-des-Cuisines plus certainement. La datation de l’église de la Daurade est plus problématique : érigée vers 400, elle est soit antérieure à l’arrivée des Wisigoths, soit contemporaine. Dans cette seconde hypothèse, elle pourrait avoir été « leur » église (p. 21). Q. Cazes et Jean-Luc Boudartchouk évoquent ensuite la «capitale des Goths », c’est-à-dire la ville du Ve siècle. La période est marquée par une réelle vitalité urbaine : non seulement Toulouse continue d’être entretenue, mais de nouveaux bâtiments sont construits, parmi lesquels des monuments prestigieux. Entre 1988 et 1989, d’imposants vestiges ont été repérés dans l’angle nord-ouest de la ville Antique. L’ensemble, couvrant une surface de 4 ou 5 hectares, est identifié au palais des rois goths, évoqué dans une lettre de Sidoine Apolinaire en 455. Il s’agit d’un monument assez exceptionnel, sur lequel les informations restent en vérité bien ténues (cette publication, assez ancienne, ne peut intégrer les découvertes intervenues en 2011). À cette même période est associée un grand monument situé au nord de Saint-Pierre-des-Cuisines, une église qui connaît alors quelques transformations. Les mêmes auteurs s’intéressent ensuite à la ville mérovingienne, bien mal documentée : les principaux édifices religieux sont maintenus et un nouveau construit à l’emplacement du martyr de Saturnin. Deux cartes permettent simplement de comparer la répartition des mobiliers goth et franc (fig. 20). La dernière grande période évoquée ici est celle qui va de la « conquête » carolingienne à l’avènement de la ville comtale. Tout d’abord, J. Catalo évoque la réorganisation du système défensif dont les fouilles de la Cité judiciaire permettent de se faire une meilleure idée. Une vaste portion d’un grand fossé creusé en avant de la porte Narbonnaise est alors creusé (fig. 23). Il a été repéré en plusieurs autres endroits et paraît antérieur aux dernières décennies du IXe siècle. L’ensemble paraît lié aux conflits qui accompagnent la conquête carolingienne. Puis, quelques pages sont consacrées aux évolutions du parcellaire, mais le propos est particulièrement difficile à suivre et sort très largement du cadre chronologique de ce chapitre. Q. Cazes, J.-L. Boudartchouk et Henri Molet évoquent ensuite les églises. Là-encore, le propos comme les illustrations sont un peu confus. On relèvera toutefois que la période est marquée par la pratique systématique du remploi : les éléments sont récupérés tels quels, sans retaille, et noyés dans un abondant mortier. Ce chapitre se conclut par la contribution que D. Paya consacre à la question des morts. Il s’intéresse naturellement à la répartition des cimetières mais aussi à la question de l’apparition des morts dans la ville et à une possible identification des lieux d’inhumations destinés aux goths puis aux francs. Cette partie n’est pas toujours très claire et il manque une carte.

 

         Le second chapitre s’intitule « La ville double (1050-1190) » (p. 41-92). L’introduction campe de manière concise et précise les grandes évolutions d’une période pour laquelle les sources écrites  - en particulier ecclésiastiques - commencent à se faire beaucoup plus nombreuses. L’Église est alors en pleine refondation et Toulouse constitue la « plaque tournante de la Réforme dans la région », p. 41. Dans ce mouvement, l’évêque Isarn de Lavaur a joué un rôle fondamental : il s’appuie sur le monastère de Moissac, dépendance de Cluny, pour promouvoir la réforme des monastères : la Daurade (1077) puis Saint-Sernin (1082) lui sont rattachées (ce qui a été à l’origine d’un long conflit se soldant par une indépendance retrouvée dans le second cas). L’époque est également caractérisée par l’affirmation d’un « bourg » indépendant autour de Saint-Sernin, donnant ainsi naissance à une nouvelle « ville » adossée à celle de l’Antiquité. Un conflit politique complexe qui voit les Aquitains s’immiscer dans les affaires locales intervient. En 1123, Alfonse-Jourdain, le « comte bon », prend le pouvoir et jouera un rôle important dans le nouvel essor de la ville. Enfin, vers le milieu du XIIe siècle, un embryon de municipalité est attesté : 6 représentants – les futurs capitouls – sont nommés pour la cité, six autres pour le bourg. Ces derniers, alors que les Aquitains menacent de reprendre la ville, réclameront la protection du roi de France dans la seconde moitié du XIIe siècle.

 

         Le portrait général de la ville est dressé par Q. Cazes et H. Molet. Une géographie des pouvoirs se met en place : à l’est, le pôle religieux principal, la cathédrale ;  au sud, le pouvoir comtal, avec le château Narbonnais implanté dans la porte antique éponyme (première mention entre 1107 et 1109) ; enfin, au nord, à la jonction entre la ville antique et le bourg, s’affirme le lieu du pouvoir communal. De nouveaux pôles religieux font leur apparition (établissement hospitalier, chapelles, église de la Dalbade) et des paroisses urbaines sont instituées, ce qui marque les débuts d’un long conflit relatif aux droits de sépultures. Des sauvetés, c’est-à-dire des territoires bénéficiant d’une fiscalité avantageuse, sont créées. Les premières pourraient avoir été fondées par Alfonse-Jourdain. Ces privilèges seront ensuite accordés à un territoire beaucoup plus grand, le dex, dont l’emprise est clairement restituée (fig. 35).

 

         La partie suivante, consacrée au bourg Saint-Sernin, est rédigée par J. Catalo et G. Pradalié. Elle consacre la montée en puissance de ce nouvel espace, progressivement enclos par une muraille – rapidement élargie - qui englobe le fossé défensif circonscrivant Saint-Sernin. Un joli plan (fig. 37) permet de mieux visualiser cette évolution.

 

         La contribution consacrée au château comtal est rédigée par J. Catalo et H. Molet. Les fouilles ont permis de mieux comprendre le processus de transformation de l’ancienne porte romaine en forteresse et de mettre en évidence un complexe système de fossés défensifs (fig. 38). C’est sur des sceaux du XIIe siècle ainsi que sur un joli plan de 1778 (fig. 41) que se fondent les restitutions proposées, mais la démonstration n’est pas toujours facile à suivre.

 

         La partie suivante, claire et bien rédigée, est consacrée à l’habitat urbain, principalement illustré à travers l’exemple de l’Hôtel des Maurand (J. Catalo, Anne-Laure Napoléone). Celui-ci est constitué de deux ailes perpendiculaires donnant sur rue, d’une tour d’angle et était certainement agrémenté de cours au revers. Les tours devaient être une constante des habitats seigneuriaux. Replacées dans le contexte régional, les demeures de Toulouse paraissent se distinguer par leur caractère monumental (p. 69).

 

         La partie consacrée aux établissements religieux est rédigée par Q. Cazes et H. Molet. On assiste à un vaste élan de reconstruction. Il est notamment impulsé par l’évêque réformateur Isarn de Lavaur, à l’origine de la reconstruction du quartier épiscopal. En effet, une nouvelle cathédrale est mise en chantier à peu près en même temps qu’est lancée la construction de Saint-Sernin de Toulouse. Sur ce chantier, les bâtisseurs font preuve d’une parfaite maîtrise de techniques de mise en œuvre jusqu’alors absentes de Toulouse : ouvriers et concepteurs viennent manifestement d’ailleurs (p. 72). Sur ce chantier, la sculpture occupe une grande place et Q. Cazes insiste à juste raison sur l’influence des œuvres antiques. Dans ce survol, chaque édifice est présenté de manière très concise. On regrettera l’absence d’un propos synthétique : diffusion du voûtement, prolifération de la sculpture, multiplication des cloîtres, des clochers…

 

         La partie consacrée aux aires d’inhumation est, quant à elle, rédigée par D. Paya. Ce dernier essaye de dresser une rapide typologie des sépultures de cette période charnière à partir des découvertes archéologiques. Surtout, il revient sur les querelles de droits de sépulture liées à l’apparition des paroisses urbaines mais aussi sur l’émergence d’aires d’inhumations dissociées de toute église, non liées à des nécropoles antiques, dont le statut pose question. Elles sont rapprochées de découvertes faites à Limoges, Rodez, Grenoble, Poitiers ou Bourges. Le chapitre se termine par l’étude monographique d’un moulon – un îlot – récemment fouillé aux abords de la Dalbade (Laurent Macé et Nelly Pousthomis). La partie est intéressante, mais elle déborde largement du cadre chronologique imparti à ce chapitre et ne trouve pas vraiment sa place dans l’économie de l’ouvrage.

 

         Le troisième chapitre (p. 93-133) est consacrée à la « Ville unifiée (1190-1271) ». G. Pradalié met en exergue les principaux évènements : la crise cathare, amorcée dès le second quart du 12e siècle, connaît alors ses plus forts développements qui aboutissent à la première croisade en 1209. Les comtes de Toulouse étant accusés de protéger les hérétiques, la ville est assiégée à trois reprises. Finalement, la ville cède et la capitulation de Meaux est signée en 1229. Dès lors, les représentants du pouvoir royal sont de plus en plus présents dans les affaires de Toulouse. L’époque est aussi marquée par l’apparition des ordres mendiants : en 1215, Dominique de Guzman fonde son ordre dans la ville. Les Franciscains comme des ordres moins célèbres s’y implantent peu après. Ceci sera source de nombreuses tensions avec le pouvoir épiscopal. Enfin, les Capitouls continuent de jouer un rôle dans l’administration d’une ville désormais réunifiée. Tout ceci est parfaitement synthétisé dans un plan général de la ville (fig. 64).

 

         Le portrait général de la ville est brossé par J. Catalo et H. Molet : aménagement de nouvelles fortifications, construction d’un nouveau pont, de moulins, émergence des ordres mendiants et autres établissements charitables, tous points qui sont ensuite développés. Les mêmes auteurs consacrent plusieurs pages bien articulées aux remparts et fossés. De nouvelles portes sont aménagées et le creusement de fossés permet d’organiser de nouveaux espaces entre l’ancienne ligne défensive et la nouvelle, les « lices ». La partie consacrée aux ordres mendiants, rédigée par J. Catalo, est particulièrement intéressante. Elle souligne les nombreux conflits territoriaux et économiques suscités par l’apparition de ces nouveaux acteurs religieux. Les seconds se cristallisent autour des droits d’inhumation. L’auteur revient également sur l’apparente originalité de l’implantation de certains établissements mendiants, en cœur de ville quand ils occupent généralement les faubourgs. Mais en vérité, l’intérieur de la ville fortifiée était alors ponctué de zones désertées, des sortes de faubourgs intra-muros où se trouvent ces établissements.

 

          Ensuite, la question des établissements charitables, présents à l’intérieur comme à l’extérieur de la ville, est abordée par Q. Cazes et H. Molet, établissements sur lesquels les données autres que textuelles sont pratiquement absentes : on ne sait rien, ou presque, de leur architecture (p. 124). H. Molet et D. Paya consacrent, pour leur part, quelques pages aux léproseries dans une partie plus décousue. Le second termine ce chapitre par la présentation des aires funéraires. Il met en lumière un processus de régularisation des inhumations, désormais réalisées dans des cimetières dont certains sont strictement délimités : la fouille du cimetière situé en avant du Château narbonnais a montré qu’au cours de cette période sont construits des caveaux circonscrivant l’ensemble. Or, ces derniers n’ont pas été réalisés au cas par cas, mais ressortissent à une seule et même phase édilitaire : ils répondent à un projet planifié visant à clore le cimetière. Un document de 1331 atteste d’ailleurs qu’une clé était nécessaire pour pouvoir y pénétrer (p. 129).

 

         Le quatrième chapitre (p. 135-170) se focalise sur la « Ville royale (1271-1350) ». G. Pradalié évoque le processus de prise de contrôle par le pouvoir royal, lequel s’est toujours efforcé de ménager les susceptibilités locales tout en affermissant sa mainmise. C’est une période de pleine prospérité pour Toulouse, qui compte environ 35 000 habitants. Ceci se traduit par un fort dynamisme architectural évoqué par J. Catalo et H. Molet. De nombreuses églises sont construites ou reconstruites et de nombreux quartiers anciens se développent – les barris – tandis que certaines zones sont nouvellement loties – les bastita (p. 137). Grâce à une abondante documentation, les auteurs parviennent à restituer un plan d’une extraordinaire précision pour la ville de 1335 (fig. 85). Ainsi, les différents quartiers, les principaux monuments, les rues sont localisés sur ce document. Un plan très didactique permet de comprendre la genèse des barris et bastita (fig. 86). Les premiers correspondant à un développement « classique » fait d’une juxtaposition d’initiatives individuelles. Les seconds sont de véritables projets de lotissement parrainés par des institutions ou des particuliers. Quelques pages sont consacrées à la bastide de Prignac, récemment fouillée.

 

         Puis, H. Molet s’intéresse au développement du quartier Saint-Cyprien, situé de l’autre côté de la Garonne. Après un premier essor lié à la construction du pont de la Daurade (1123-1131) et à l’installation d’établissements charitables, le quartier connaît un nouvel élan à partir du second quart du XIIIe siècle. Paradoxalement, ce développement est sans doute à l’origine de sa ruine rapide :  l’aménagement de la Garonne et de ses abords explique probablement l’impact des crues qui en 1410 puis 1430 ravagent ce faubourg.

 

         J. Catalo et H. Molet reviennent ensuite sur les transformations du palais royal et de ses abords. Le développement de l’administration royale justifie des travaux de grande ampleur qui sont ici très clairement présentés grâce à une documentation de grande qualité qui accorde toute sa place aux découvertes archéologiques récentes.

 

         Une fois encore, D. Paya revient sur les querelles de droits d’inhumation et sur la question des cimetières fermés. Il relève également les paradoxes qui traversent cette période. À côté d’un discours qui prône une égalité dans la mort, la réalité illustre un mouvement de distinction dans la mort : multiplication des monuments funéraires et des enfeus, inhumations dans ou à proximité des églises.

 

         Enfin, le cinquième et dernier chapitre (p. 171-221) évoque « Une ville en difficulté (1350-1480) ». G. Pradalié commence par énumérer les catastrophes naturelles et politiques qui affectent Toulouse : mauvaises récoltes, peste, crues, guerre de Cent Ans, Jacquerie… La période est plutôt sombre. Si les universités se développent, l’activité artisanale recule. Le pouvoir royal, malgré quelques tentatives de révoltes, assied définitivement son autorité sur la ville : en 1467, le Parlement est temporairement transféré à Montpellier. La monarchie fait bien comprendre qu’elle est désormais l’entière maîtresse de la cité.

 

         Dans son portrait général, J. Catalo montre bien que si la période n’est pas propice à la construction en apparence, elle est en fait marquée par un mouvement de redéfinition de l’espace urbain au gré des nombreux achats et ventes, l’infortune des uns servant les intérêts des autres.

 

         Dans les pages suivantes, J. Catalo et Anne-Laure Napoléone s’arrêtent sur l’habitat urbain des XIVe et XVe siècle : hôtels, maison, bordes... À partir de la documentation textuelle comme de quelques exemples ils donnent une image précise de la forme comme de l’aménagement et du fonctionnement de ces bâtiments. Avant le XVIe siècle, ceux-ci n’ont généralement pas plus de deux étages. Ils sont profondément fondés et constitués de murs épais parfois faits de briques et de galets liés à la terre, mais généralement en terre (90 % des murs de façade selon le cadastre de 1550, p. 191). Quelques relevés, plans et restitutions agrémentent utilement cette très bonne présentation.

 

         À partir des matrices du cadastre de 1478 et de la documentation fiscale, J. Catalo et H. Molet s’essayent ensuite à différentes propositions de restitution du capitoulat de la Dalbade. Les résultats sont là encore impressionnants et la documentation graphique de grande qualité.

 

         J. Catalo et Catherine Boccacino consacrent quelques pages à la question de l’eau et aux jardins. Jusqu’au XIIIe siècle, l’héritage antique est prépondérant dans la gestion de l’eau. Par la suite, les déchets et eaux usés sont généralement stockés dans des fosses dépotoirs creusées en fond de jardin, tandis que de nombreux puits fleurissent un peu partout. Certains sont à noria, les vestiges de l’un d’eux ayant été retrouvés dans le quartier Saint-Étienne. Dans la partie réservée aux jardins, on regrettera l’absence d’une véritable synthèse portant sur la nature des productions urbaines.

 

         Dans le contexte de la Guerre de Cent Ans, de nombreuses transformations sont apportées aux fortifications (J. Catalo et H. Molet). L’entretien du système est imparti aux consuls. Les murailles se trouvent rehaussées par endroit, réparées ailleurs ; de nouvelles portes sont percées ; les fossés s’avèrent régulièrement curés… Quelques jolies représentations anciennes (en particulier la fig. 122) viennent illustrer cette partie, certains éléments des fortifications n’ayant été démantelés qu’entre les XVIIIe et XIXe siècles.

 

         Dans sa dernière contribution dédiée aux lieux d’inhumation, D. Paya relève l’existence d’évolutions profondes dans les mentalités. Avant le XIIIe siècle, les réductions sont systématiques en cas de recoupement de sépulture ; elles disparaissent ensuite. Les contenants se raréfient avec le temps au profit des linceuls : ceci traduirait un nouveau rapport au corps rattaché à la spiritualité mendiante qui insiste sur la primauté de l’âme (p. 216). Pour ce qui est des marquages, les tombes les plus simples étaient surmontées de croix, généralement en bois, parfois en pierre ; un monument funéraire surmontait les plus riches. L’auteur insiste aussi sur l’existence de différents tarifs au sein d’un même cimetière en fonction des emplacements. Pour les impécunieux pouvaient exister des cimetières spécifiques : ceux de la paroisse de la Dalbade se faisaient enterrer de l’autre côté de la Garonne.

 

         La conclusion générale, écrite à plusieurs voix, insiste sur le fait que, jusqu’à l’essor de l’économie du pastel au début de la période moderne, la ville médiévale se contente avant tout d’hériter et de digérer la ville antique, ce qui est, à vrai dire, assez réducteur au regard de la complexité des mutations exposées au fil de l’ouvrage.

 

         Suivent deux annexes. La première liste les barris et bastides attestés en 1335 (p. 225-227). La seconde, très utile, liste les 41 opérations archéologiques médiévales réalisées à Toulouse dans les années 1990-2000. À chacune est consacrée une brève notice (p. 228-239). L’ouvrage se termine par la bibliographie (p. 238-249), les notes (p. 250-269) et la table des matières (p. 269-271).

 

         En définitive, il s’agit dans l’ensemble d’un ouvrage de qualité - bien qu’assez inégal - permettant de se faire une idée assez précise de l’évolution de Toulouse au cours de la longue période envisagée.

 

 

Sommaire

 

Avant-Propos (p. 3-4) :

Jean Catalo, Quitterie Cazes, Gérard Pradalié

 

Introduction (p. 5-12) 

Gérard Pradalié

 

Chapitre I - De la ville antique à la ville médiévale, six siècles de gestation (p. 13-40) : 

Gérard Pradalié, Quitterie Cazes, Jean-Luc Boudartchouk, Jean Catalo, Henri Mollet, Didier Paya

 

Chapitre II – La ville double (1050-1190) (p. 41-92)

Gérard Pradalié, Quitterie Cazes, Henri Mollet, Jean Catalo, Didier Paya, Anne-Laure Napoléone, Didier Paya, Laurent Macé, Nelly Pousthomis

 

Chapitre III – La ville unifiée (1190-1271) (p. 93-134)

Gérard Pradalié, Jean Catalo, Henri Mollet, Quitterie Cazes, Didier Paya

 

Chapitre IV – La ville royale (1271-1350) (p. 135-170)

Gérard Pradalié, Jean Catalo, Henri Mollet, Didier Paya

 

Chapitre V – Une ville en difficulté (1350-1480) (p. 171-222)

Gérard Pradalié, Jean Catalo, Anne-Laure Napoléone, Henri Mollet, Catherine Boccacino, Didier Paya

 

Conclusion générale (p. 222-224) 

Jean Catalo, Quitterie Cazes, Gérard Pradalié