Barguet, Paul (augmenté par Alain Arnaudiès): Le temple d’Amon-Rê à Karnak (réédition revue et augmentée d’ un DVD par Alain Arnaudiès). ISBN :978-2-7247-0424-2. 35 Euros
(Institut français d’archéologie orientale du Caire [IFAO] 2007)
 
Recensione di Caroline Dorion-Peyronnet, Musée départemental des Antiquités de Rouen
 
Numero di parole: 1667 parole
Pubblicato on line il 2008-11-29
Histara les comptes rendus (ISSN 2100-0700).
Link: http://histara.sorbonne.fr/cr.php?cr=164
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Cet ouvrage est la publication de la thèse de doctorat ès-lettres de Paul Barguet, soutenue à la Faculté des Lettres de Paris en juin 1958. Elle a été publiée dans la série des RAPH (Recherches d’archéologie, de philologie et d’histoire, tome XXI) par l’Institut français d’archéologie orientale (IFAO) en 1962.  Le travail de Barguet, inédit en son genre pour l’époque, a alors fait l’objet d’un compte rendu par Jean Sainte Fare Garnot, « rapporteur de thèse » (Revue d’Égyptologie, XV, 1963, 129-131) ainsi que d’un bref résumé en anglais par John Gwyn Griffiths dans l’Annual Egyptological Bibliography (AEB, 1962, n°62049a).

Le travail de Paul Barguet est un ouvrage fondamental, incontournable sur l’un des plus importants sites égyptiens, le temple d’Amon-Rê de Karnak, tant du point de vue topographique qu’historique. C’est la somme de quatre années de travail passées, entre 1947 et 1951, sur le site de Karnak, alors qu’il était pensionnaire à l’IFAO. Dans son compte rendu de 1963, Jean Sainte Fare Garnot le décrit comme une « description explicative » du temple d’Amon-Rê de Karnak, un « itinéraire dressé par un connaisseur, avec toutes les garanties désirables ».

Dans la préface (pp. VII – XIV), l’auteur présente l’état du temple dans les années cinquante. Il rédige ensuite un historique succinct de la recherche archéologique en mentionnant comme il se doit les publications afférentes jusqu’à l’année 1958, année de soutenance de sa thèse. Il présente enfin la problématique de son travail : une étude du développement du temple dans l’espace, l’ordonnancement de ses différentes parties et leurs rôles respectifs.

Les pages suivantes (pp. XV-XIX) présentent les abréviations bibliographiques, relativement limitées pour un travail de cette envergure, divisées entre périodiques et collections puis ouvrages et articles (67 références).

En introduction (pp. 1-25), Paul Barguet discute du nom antique du site et de son origine avant de passer à une présentation topographique de l’ensemble du site de Karnak et des différents monuments qui s’y dressent. Enfin, il évoque l’histoire et les origines de la triade adorée à Karnak : Amon, Mout et Khonsou.

L’ouvrage se divise en deux sections de taille inégale.
La première partie de l’étude (pp. 29-280) est consacrée à la description topographique des différentes parties du temple, comprenant les abords extérieurs du temple (chapitre I : murs d’enceinte, dromos, tribune et débarcadère), les constructions en avant du temple proprement dit (chapitre II : le 1
er pylône, la grande cour, le 2e pylône, la grande salle hypostyle, le 3e pylône), le temple proprement dit (chapitre III : le 4e pylône, la salle hypostyle entre les 4e et 5e pylônes, le 5e pylône, le 6e pylône et sa cour péristyle, les salles d’Hatchepsout, la « Cour du Moyen Empire »), l’Akh-menou (chapitre IV : temple de régénération de Thoutmosis III), les sanctuaires orientaux (chapitre V : de Thoutmosis III et le « temple d’Amon qui écoute les prières »), et l’allée des processions (chapitre VI) qui correspond au second axe du temple (dit royal) s’étendant entre l’entrée sud et le 10e pylône et la « Cour de la cachette », en arrière du 7e pylône.
La deuxième partie (pp. 283-340) constitue un « essai d’interprétation ». L’auteur aborde, d’une part, le rôle et la signification des parties originales du temple (à savoir l’Akh-menou puis les sanctuaires orientaux) et, d’autre part, de l’ensemble du temple d’Amon-Rê de Karnak en évoquant la structure propre de ce temple, son ordonnancement général et son aspect cosmique.

L’ouvrage est complété par une importante série d’indices (pp. 343-365), divisée en huit thématiques : noms des monuments, index archéologiques, index des scènes et cérémonies, index des titres rituels, index des noms royaux et des divines adoratrices, index des noms de particuliers, index des noms de divinités et de leurs épithètes et index des noms de lieux.
Les planches photographiques sont nombreuses (42 planches composées de 102 photographies noir et blanc et de quatre dessins). Elles sont néanmoins de qualité assez médiocre dans l’ensemble, et de format réduit, mais d’un grand intérêt au regard de la documentation photographique existante sur Karnak à la fin des années cinquante.
La version numérique corrige le problème de la taille réduite des photographies sur la version papier en offrant la possibilité de zoomer sur les clichés. Néanmoins, la piètre qualité originale des photographies ne permet pas de les agrandir beaucoup.

L’ouvrage reste toujours la source de référence pour l’étude du temple d’Amon-Rê de Karnak. Au moment de sa réédition, la question de la mise à jour de l’ouvrage a été évoquée, il a été convenu que celle-ci ne pourrait être réellement entreprise qu’après la publication des nombreux travaux encore en cours. Le choix s’est donc porté sur une « mise à jour » au moyen d’une édition multimédia présentée comme un « nouvel outil adapté aux exigences de la recherche ».

Concernant la réédition, aux quelques commentaires rédigés par Jean Sainte Fare Garnot relatifs d’abord à certaines interprétations concernant l’Akh-menou et le « rite de la montée royale », puis à la bibliographie et aux illustrations, à la philologie et enfin à la transcription, il n’y a rien à rajouter, l’IFAO ayant réédité le texte avec les illustrations dans sa version originale (excepté les deux plans dépliants du site, sur lesquels nous aurons l’occasion de revenir). Par ailleurs, la réédition de l’IFAO est accompagnée d’un DVD comprenant une version multimédia du texte original donnant accès à la presque intégralité de la documentation photographique et bibliographique de l’ouvrage. Plus de 1000 clichés de l’auteur ont pu être ajoutés à l’ouvrage et plus de 200 références bibliographiques numérisées et intégrées dans une bibliothèque virtuelle. À ces compléments iconographique et bibliographique, la nouvelle édition ajoute trois index supplémentaires, complétant la très riche liste déjà établie par Paul Barguet : à savoir un index des matériaux, un index des musées et des collections et enfin un index des textes cités. C’est maintenant à cette version multimédia que notre compte rendu va s’intéresser.

Le DVD offre une petite animation « mode d’emploi » qui permet de présenter les fonctionnalités de la version numérique. Cette version multimédia du texte original (au format Portable Document Format - PDF) permet d’accéder à l’aide des signets à une section spécifique du texte et grâce à un simple clic à presque l’ensemble des références bibliographiques évoquées en note de bas de page (1356 notes recensées) ainsi qu’à une très riche documentation photographique issue du fonds documentaire personnel de Paul Barguet. Cette documentation quasiment inédite, réintégrée au texte, est matérialisée par un « carré » hypertexte grisé, positionné dans la marge droite.
Le document PDF permet également de faire une recherche exhaustive dans l’ensemble du texte, ce qui est une fonctionnalité particulièrement utile. Dans ce cas, on peut réellement s’interroger sur la nécessité des index complémentaires évoqués plus haut, qui ne sont disponibles que dans la version multimédia.

La navigabilité de l’ensemble est parfois compliquée (notamment entre les images et le texte). Les « lacunes » déjà pointées par Jean Sainte Fare Garnot n’ont pas toujours été prises en compte. Ainsi, concernant les remarques philologiques, il aurait été assez simple dans la version numérique (l’on comprend que la version papier du texte original ne soit pas modifiée) de créer un lien hypertexte vers un document indépendant : la traduction quand les textes ne sont pas traduits et un relevé des textes hiéroglyphiques quand ceux-ci sont traduits par Barguet dans le corps du texte.

Concernant la bibliographie, les remarques faites par J. Sainte Fare Garnot ont été partiellement suivies puisque l’article de Pierre Lacau, « L’or dans l’architecture égyptienne », ASAE 53, 1953, pp. 221-250 a été intégré à la bibliographie complémentaire disponible sur le DVD, mais pas les références du même auteur concernant la Chapelle Rouge d’Hatchepsout dans les Annuaires du Collège de France, 40
e et 41e années.
Même si cet ouvrage se veut avant tout un ouvrage scientifique, destiné aux chercheurs, l’absence d’une bibliographie plus générale sur le temple d’Amon-Rê de Karnak, ouvrages de base ou études plus spécifiques, est dommageable. Le choix semble cependant délibéré d’avoir exclu de la bibliographie complémentaire tout livre au profit des articles de revue, même si cette « annexe bibliographique » ignore notamment la série des Cahiers de Karnak faisant suite à la revue Kêmi. La mise à jour de la bibliographie est souvent l’une des premières étapes quand on édite une version « revue et augmentée » d’un ouvrage antérieur. Cette recherche bibliographie aurait permis de mettre à jour et de compléter le travail de Paul Barguet.

Concernant les illustrations, les plans dépliants du domaine d’Amon-Rê de Karnak ont été supprimés de la réédition papier : c’est assez regrettable, surtout quand il y est fait référence au cœur du texte (par exemple p. 29) et c’est particulièrement appréciable lorsque l’on doit suivre la description topographique d’un site qui n’est pas nécessairement familier au lecteur. Néanmoins ce manque est comblé dans la version numérique, où l’on retrouve les deux plans auxquels on accède au moyen d’un lien hypertexte interne.
En outre, les photographies (ou les documents PDF si rapportant) ne sont jamais identifiées, exception faite des planches originales de la version de 1962 et des liens photographiques réintégrés dans le texte (de la version numérique) quand on arrive à identifier la photographie en question. En effet, les « icônes hypertextes » qui enrichissement la version numérique ne donnent pas une image de la photographie ou une « info-bulle » avec le numéro de cliché, ce qui oblige à une recherche assez fastidieuse.

En conclusion, malgré les quelques réserves évoquées concernant cette nouvelle édition, l’ouvrage de Paul Barguet reste un ouvrage incontournable pour l’étude du temple d’Amon-Rê à Karnak. Saluons aussi cette belle initiative de l’IFAO pour la réédition d’un ouvrage depuis longtemps épuisé. La version numérique permet une recherche rapide et la bibliothèque virtuelle est un véritable atout pour la communauté égyptologique internationale. On regrette cependant le fait que la très riche documentation photographique ajoutée n’ait pas fait l’objet d’un travail d’identification plus poussé qui se limite au simple classement d’une partie sous divers thèmes (Aménophis I, blocs épars, addenda etc.) ou à une réinsertion dans le texte original de Paul Barguet.