Mastronuzzi, Giovanni: Il luogo di culto di Monte Papalucio ad Oria. 1. La fase arcaica. pp. 336, 21x30, ill. col. e b/n., bross.
ISBN 9788872286951 Prezzo € 50.00
(Edipuglia, Bari 2013)
 
Recensione di Arianna Esposito, Université de Bourgogne
 
Numero di parole: 932 parole
Pubblicato on line il 2014-12-10
Histara les comptes rendus (ISSN 2100-0700).
Link: http://histara.sorbonne.fr/cr.php?cr=1964
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          Au cours du VIe siècle av. J.-C., une transformation générale de l’occupation du territoire affecte la région messapienne qui s’organise de manière hiérarchique autour de quelques centres majeurs : Cavallino, Oria, Ugento. À Oria, sur les pentes d’une colline orientale (Monte Papalucio), en marge de l’habitat, s’établit alors, dès le milieu du VIe siècle av. J.-C., un lieu de culte dédié à Déméter.

 

         Le sanctuaire de Monte Papalucio est un point de référence incontournable pour comprendre la dynamique de l’interaction culturelle entre Grecs et autochtones en Italie du Sud ; il a fait l’objet d’études systématiques menées par l’Université du Salento en collaboration avec la Soprintendenza per i Beni Archeologici della Puglia, sous la direction de Francesco D’Andria, de 1978 à 1982. En 2002, de nouveaux sondages et des vérifications stratigraphiques ont été entrepris dans le cadre d’un projet muséal de mise en valeur du parc archéologique (p. 13).  Initiée en 2002 à la suite des dernières opérations, cette publication s’inscrit dans le prolongement  de la thèse de doctorat de Giovanni Mastronuzzi portant sur les lieux de culte indigènes d’Italie méridionale (voir : G. Mastronuzzi, Repertorio dei contesti cultuali indigeni in Italia meridionale, vol. I, Etàarcaica [Beni Archeologici - Conoscenza e Tecnologie 4], Bari 2005).

 

         L’étude stratigraphique a permis à l’auteur de reconstituer les principaux aspects de la zone sacrée du point de vue de l’organisation spatiale et de l’articulation du rituel. En particulier, l’examen du mobilier, par la distinction entre les ustensiles et les offrandes, l’a conduit à proposer une identification des différentes étapes du rite.

 

         La lecture de l’ouvrage est stimulante par sa démarche novatrice. Dans la continuité des entreprises éditoriales coordonnées par Francesco D’Andria et dans le but de renouveler les études sur la Grande Grèce grâce à des méthodes de recherche innovantes, l’auteur met en œuvre une approche interdisciplinaire : elle aborde notamment les données archéologiques en termes anthropologiques. G. Mastronuzzi recourt ainsi à l’anthropologie culturelle et à l’histoire des religions (p. 13-14, chap. IV) et son analyse emprunte des méthodes et des protocoles propres aux sciences dites dures, avec l’archéométrie, la bioarchéologie ou la palynologie.

 

         L’A. présente de manière organisée et claire une documentation archéologique complexe. Après un premier chapitre visant à dresser un tableau le plus complet possible de l’histoire de la recherche archéologique à Oria (p. 15-30), depuis la Préhistoire jusqu’au XVe s. ap. J.-C. – tâche relativement malaisée en raison de la continuité d’occupation du centre – le deuxième chapitre se concentre sur le lieu de culte de Monte Papalucio (p. 31-61). Pour chaque phase, G. Mastronuzzi propose des analyses ponctuelles (p. 55 sq.), articulées par périodes circonscrites dont la synthèse est fournie à la fin (p. 61). En outre, l’A. a pris soin de rehausser chaque sous-partie par une conclusion synthétique appropriée. Le cadre ainsi esquissé est à la fois complet et accessible.

 

         L’étude des artefacts couvre la partie la plus importante du volume. Ainsi le chapitre trois, axé autour des contextes et des mobiliers (p. 63-220), s’organise par séries en distinguant les vestiges mis au jour dans les dépôts votifs et dans les terrassements. Il offre donc un vaste catalogue typologique, appuyé sur des documents graphiques et photographiques généralement de très bonne qualité. Une analyse finale (p. 199 sq.) souligne, entre autres, la forte prépondérance de la céramique (la coroplathie compte toutefois 660 pièces, dont environ la moitié est en très mauvais état de conservation : p. 205-208) et, parmi les céramiques, la récurrence du skyphos (fig. 143) dans la série messapienne décorée et figurée.

 

         Pour cette classe locale en particulier, G. Mastronuzzi, s’éloigne de l’interprétation avancée par L. Todisco (p. 203) qui envisageait cette production comme étant destinée à une clientèle modeste. Le débat sur ce point se fonde à la fois sur les décorations et sur la comparaison avec d’autres établissements contemporains.

 

         Dans le dernier chapitre, le lieu de culte de Monte Papalucio est envisagé de manière globale : l’A. considère tout d’abord sa place dans le contexte de l’habitat d’Oria (p. 221-223), puis son organisation spatiale (p. 223-225) pour enfin aborder la description des cultes et rituels dédiés à la divinité, Déméter (p. 225 s.) : la libation, le sacrifice, le rituel de cuisson de la viande, la consommation du repas, la consommation de boissons alcoolisées, l’offrande. Des comparaisons utiles sont établies avec d’autres contextes cultuels, indigènes (Francavilla Marittima notamment), mais également grecs, et en premier lieu avec le sanctuaire de Déméter et Koré à Corinthe ou avec l’Héraion de Samos.

 

         L’ouvrage est complété par un dossier d’annexes et d’index. La bibliographie de l’auteur est très complète et très précise.

 

         Avec ce beau livre, G. Mastronuzzi offre au public un catalogue raisonné du mobilier attesté dans le sanctuaire de Monte Papalucio. Il fait aussi œuvre d’historien en s’attachant à replacer les grandes phases de développement du sanctuaire dans leur contexte régional et « international ». Le vaste chapitre consacré à la documentation matérielle est d’une utilité considérable. La culture matérielle est étudiée en tenant compte des données stratigraphiques et contextuelles afin de dresser un tableau sociologique de la fréquentation de ce lieu de culte et une analyse précise des manifestations du culte. La donnée archéologique est toujours abordée au prisme de l’interprétation historique dont témoignent les observations finales qui donnent la mesure d’un travail d’envergure.

 

         Cet ouvrage est une contribution majeure à l’histoire de la Messapie antique comme à l’histoire de la religion indigène et de ses contacts avec la culture grecque. En fournissant un catalogue approfondi et fort utile, notamment en ce qui concerne la céramique locale, et en stimulant les recherches futures, l’ouvrage s’affiche ainsi comme une référence incontournable pour les chercheurs intéressés par l’interaction culturelle entre Grecs et autochtones en Italie du Sud.