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Rezension von Delphine Burlot, INHA Anzahl Wörter : 3616 Wörter Online publiziert am 2014-01-16 Zitat: Histara les comptes rendus (ISSN 2100-0700). Link: http://histara.sorbonne.fr/cr.php?cr=2026 Bestellen Sie dieses Buch
Le présent ouvrage est issu de trois journées d’études organisées en 2009 et 2010 par l’université de Paris Ouest Nanterre-La Défense, l’Institut Royal du Patrimoine Artistique (IRPA-KIK) de Bruxelles et le Centre de Recherche et de Restauration des Musées de France (C2RMF). Deux autres journées ont été organisées par la suite, la première, portant sur Le faux, l’authentique et le restaurateur s’est tenue à l’IRPA en juin 2012 et la seconde portant sur l’art contemporain a eu lieu à l’INHA en octobre 2013. Conçu comme la publication d’actes de colloque, le livre offre un panel très diversifié des recherches qui se font actuellement dans le domaine de la restauration et de son histoire, en France et en Belgique.
L’histoire de la restauration est une discipline relativement jeune qui s’est considérablement développée ces dernières années. Comme le rappelle Erma Hermens dans un article publié récemment (E. Hermens, « Technical art History : the synergy of art, conservation and science », dans Art History and Visual Studies in Europe, Rampley M., Lenain T. et Locher H. dirs, Leiden Boston, 2012, p. 151-165), rechercher l’histoire matérielle d’un objet, essayer de comprendre le passage du temps sur l’œuvre d’art ne peut se faire qu’avec l’implication de différents acteurs, l’historien d’art, le restaurateur et le scientifique et peut s’élargir à d’autres domaines comme l’économie, la sociologie, l’anthropologie et l’esthétique. Cette recherche aboutit à une compréhension holistique de l’œuvre, une nouvelle perception dont découleront les choix de restauration.
L’intérêt que suscite cette discipline se reflète dans le nombre croissant de thèses touchant à la restauration, à la matérialité des œuvres et à l’histoire de la restauration, citons par exemple les thèses publiées de Pascal Labreuche (Paris, capitale de la toile à peindre, Paris, CTHS-INHA, 2010) et de Noémie Etienne (La restauration des peintures à Paris 1750-1815, Rennes, PUR, 2012). Le séminaire de Master II de Brigitte Bourgeois et Clémence Raynaud à l’école du Louvre a motivé la réalisation de plusieurs mémoires d’étudiants sur le sujet. Nombreuses sont les publications touchant l’histoire de la restauration parues ces dernières années et plusieurs revues y sont largement consacrées, la revue Technè dirigée par Brigitte Bourgeois et la revue électronique CéROArt dirigée par Muriel Verbeeck-Boutin. Ces revues font paraître des articles novateurs, des études de cas et des comptes-rendus d’ouvrages. Enfin les colloques consacrés à l’histoire de la restauration se multiplient, parfois à l’instigation de jeunes chercheurs comme ce fut le cas avec la journée d’études organisée par Noémie Etienne et Léonie Hénault (Histoire à l’atelier : restaurer les œuvres d’art, Lyon, PUL, 2012).
Devant le développement des études sur la matérialité des œuvres d’art, l’histoire de l’art, l’histoire de l’archéologie et l’histoire sociale de l’art ne peuvent plus ignorer cette discipline que les anglo-saxons nomment parfois la « Technical Art History » (voir l’article de Hermens précédemment cité). Ainsi, des numéros spéciaux de revues d’histoire de l’art ou de sciences sociales ont été entièrement consacrés à l’étude de la matérialité des œuvres d’art (voir Les formes de l’expertise artistique en Europe (xive-xviiie siècle), Revue de Synthèse, Paris, 132, 1, 2011) ou l’histoire de la restauration (sous la direction d’Olivier Bonfait, Restauration : quels enjeux pour l’histoire de l’art ?, Histoire de l’art, 68, 2011).
C’est précisément le rapport entre perception de l’œuvre et restauration qui est étudié dans le présent ouvrage. Comme l’indiquent en introduction Pierre-Yves Kairis, Béatrice Sarrazin et François Trémolières, le point de départ de l’étude est la reconnaissance de l’œuvre d’art en tant que telle, qui, selon les mots de Brandi, est la condition nécessaire et préalable à la restauration. Le second point développé dans ce livre est la reconnaissance critique de l’œuvre : la médiation obligée de la restauration dans le rapport avec l’œuvre a pour conséquence la modification du jugement qui lui est porté. Les quarante contributeurs de ce livre sont des restaurateurs, des historiens d’art et des scientifiques, qui parlent à une, deux ou plusieurs voix selon les cas étudiés. La pertinence de ces collaborations est mise en évidence par l’intérêt des articles proposés et renforce le précepte d’interdisciplinarité, essentiel dans le domaine de la restauration et défendu par Ségolène Bergeon dans ses ouvrages et articles publiés depuis les années 1980.
L’ouvrage est divisé en trois grandes parties, la première et la dernière présentant des études plus transversales sur l’histoire de la restauration et sa théorie, tandis que la seconde partie est consacrée à des études concrètes de cas de restauration.
La première partie réunit des contributions concernant l’histoire de la restauration, illustrées de nombreuses études de cas. Dans le premier article, Brigitte Bourgeois réfléchit aux hiatus qui ont existé entre la reconnaissance de la polychromie des marbres et les pratiques de leur restauration. L’idéal de blancheur qui prévalait à l’époque Baroque n’a pas forcément conduit à une généralisation des nettoyages drastiques des sculptures. L’auteur montre également comment les méthodes d’examen et d’analyses scientifiques actuels permettent d’aller au-delà de ce que l’œil seul perçoit. Aujourd’hui, la restauration de la sculpture grecque passe par la dé-restauration mentale vis-à-vis du blanc, l’étude préliminaire des œuvres est donc essentielle. Noémie Etienne s’intéresse aux réflexions qui ont eu lieu à la fin du xviiie siècle au sujet des vernis à Naples et à Paris. Elle montre dans cet article comment le choix des matériaux de la restauration entrainent des réflexions critiques portant sur l’esthétique et la perception des peintures et souligne justement à quel point « l’étude de la restauration assouplit, voire annihile, la ligne de séparation simpliste (…) entre théorie et pratique des œuvres d’art ». Geneviève Bresc-Bautier décrit les restaurations effectuées par Alexandre Lenoir pour le musée des Monuments français. Elle étudie des monuments « restaurés » ou plutôt composés par Lenoir, qui n’hésitait pas à allier des fragments de provenances diverses et des matériaux différents (marbre, pierre et plâtre). Cette conception de la restauration fut très vite démodée et des dé-restaurations furent rapidement entreprises. Aujourd’hui, les réflexions nouvelles sur le statut des adjonctions postérieures sur les œuvres engagent à ne pas les éliminer systématiquement, de façon à conserver le témoignage d’une pratique de restauration et de mise en valeur propre à cette période. Delphine Steyaert s’est intéressée à l’histoire des restaurations néo-gothiques pratiquées en Belgique entre 1863 et 1913, par la Gilde de Saint-Thomas et de Saint-Luc. Cette association d’artistes et de restaurateurs prônait un retour à l’art gothique dans les églises. Ils justifiaient les restaurations qu’ils pratiquaient, souvent très invasives, par leur foi catholique, car elle leur permettait, selon eux, de retrouver l’état original de l’œuvre. Ils se sont souvent opposés à la commission royale des monuments qui préconisait des restaurations plus respectueuses de l’original. L’auteur montre dans cet article comment, au xixe siècle, restauration et création néo-gothique sont étroitement imbriquées. Dans l’article qui suit, Emmanuelle Mercier revient sur la perception de la polychromie depuis la fin du xixe siècle jusqu’à aujourd’hui. Deux phases se succèdent : tout d’abord, les repeints néo-gothiques du xixe siècle contribuent, dans les années 1930, à un désintérêt pour la polychromie, conséquence de la gêne éprouvée par l’historien devant des restaurations abusives. À partir des années 1960, l’étude de la polychromie devient une véritable discipline scientifique. Elle permet de comprendre la succession des repeints et d’établir un meilleur diagnostic en vue du traitement de l’œuvre. La pertinence de ces études, parfois critiquées pour leur coût et le temps qu’elles requièrent, n’est pas à remettre en question, tant elles apportent pour la recherche en histoire de l’art et en histoire de la restauration.
La seconde partie de l’ouvrage concerne l’étude des œuvres, elle porte comme sous-titre « connaissance matérielle et reconnaissance critique » et présente divers cas concrets. Benoît Mille et Dominique Robcis détaillent les problèmes posés lors de la restauration des grands bronzes antiques. Il s’agit d’un moment privilégié pour effectuer une étude approfondie de l’œuvre qui permettra une bonne compréhension de son mode de fabrication et orientera les choix d’intervention. Les auteurs indiquent qu’il est important lors de la restauration de laisser visibles (ou de remettre au jour) des « indices technologiques » permettant de comprendre la mise en œuvre de l’objet. Myriam Serck-Dewaide se penche sur les techniques d’imitation illusionniste des matériaux dans les décors baroques. À travers différents exemples, elle montre comment l’usage du marbre véritable a coexisté avec la réalisation de décors d’imitation (faux-marbre, faux-bois). Georges Brunel, Michel Hochmann et Anne Lepage présentent ensuite la restauration de la Cène du Tintoret de l’église Saint François-Xavier à Paris. L’étude historique, technique et scientifique a permis de comprendre l’élaboration de l’œuvre et de voir la particularité de la technique du peintre. Elle a orienté les choix de restauration et l’intervention a consisté à éliminer d’anciens repeints pour mettre au jour la couche picturale originale. Les auteurs soulignent à quel point les chantiers de restauration sont riches en enseignement pour l’historien. L’article d’Hélène Dubois concerne les reprises réalisées par Rubens et apporte de nombreux éclairages sur la méthode de ce peintre. L’auteur souligne qu’il faut distinguer les « reprises d’expression », assez grossières, localisées sur les visages, des « reprises de finition » concernant des zones plus larges. Enfin le peintre cherchait à améliorer la vue d’ensemble de la composition par la réalisation de vifs rehauts. L’étude rend compte de la fougue du maître, déjà reconnue de son vivant. L’article suivant, écrit à plusieurs mains par Hélène Bonneau-Garcia, Isabelle Cabillic, Élisabeth Grall, Agnès Malpel, Juliette Mertens et Sigrid Mirabaud, décrit l’étude et la restauration réalisées sur la crucifixion de Jordaens conservée au musée des Beaux-Arts de Rennes. Différents prélèvements de couche picturale ont permis de comprendre la technique picturale, de déterminer les limites entre la matière originale et les repeints et enfin de faire la distinction entre la composition finale et une composition sous-jacente. L’étude a orienté les choix d’intervention. Pierre Curie, Florence Delteil et Isabelle Leegenhoek posent la question de l’intervention sur un tableau dont la couche picturale est très lacunaire et très usée, qu’ils qualifient « d’intouchable ». Abraham et Melchisédech de Rubens au musée des Beaux-Arts de Caen a été considérablement altéré par deux transpositions et l’intervention récente a consisté à réintégrer un grand nombre de motifs disparus, comme les mains de certains personnages, en modulant le degré de réintégration suivant les zones à retoucher. Frédéric Cousinié étudie le Christ mort de Philippe de Champaigne, conservé au musée du Louvre. Il développe plusieurs hypothèses sur le style et la technique du peintre, qui cherche à imiter Titien. Il explore également l’iconographie du tableau et tente de comprendre le lieu où se déroule la scène représentée. Il indique que des analyses techniques permettraient de valider ou non ses hypothèses. Anne Le Pas de Sécheval revient sur l’étude et la restauration de plusieurs œuvres de Charles Le Brun. Ces travaux ont permis de dégager de nouvelles informations sur la technique du peintre et notamment de redonner au Christ au linceul sa véritable iconographie, puisqu’il s’agit en réalité d’une pietà. L’auteur souligne qu’une meilleure compréhension des enjeux esthétiques peut être faite grâce au travail conjoint de l’historien d’art et du restaurateur. Morwena Joly, Élisabeth Martin et Nathalie Volle présentent un bilan de l’étude de peintures de Watteau menée conjointement au Louvre et dans les musées de Berlin. Elles soulignent notamment le choix par Watteau de l’indigo pour peindre les couleurs bleues et détaillent les apports de nouvelles techniques d’imagerie développées récemment au C2RMF.
Le retour de la chasse de Diane de Boucher faisait partie d’un ensemble de quatre dessus-de-porte, qui ont tous été démontés et vendus sur le marché de l’art. Leur format original chantourné a été transformé de façon à les présenter comme des tableaux rectangulaires. Dans cet article, José de Los Llanos montre le dilemme que présente la restauration d’un tableau ainsi modifié et développe les raisons du choix d’intervention qui a été adopté, à savoir la présentation de l’œuvre dans son nouveau format rectangulaire, mais avec une nette délimitation de la forme chantournée d’origine. Eléna Duprez et Bertrand Rondot présentent le cas de la restauration du décor de lambris du cabinet des fables de l’hôtel Dangé. Ce décor a subi deux transformations qui ont considérablement modifié son aspect et la restauration pouvait difficilement rétablir un état originel. Il a été décidé de présenter une partie du décor dans un état « xviiie transformé » et de conserver l’état du xixe siècle pour le reste. La muséographie permet au visiteur de considérer l’un ou l’autre état, ou bien les deux ensemble. Dans la seconde partie de l’article, Susanna Caviglia revient sur les décors d’hôtels réalisés par Natoire et tente de distinguer les notions d’arts décoratifs et de peinture telles qu’on les entendait au xviiie siècle. Claire Barbillon et Catherine Chevillot, par l’étude de la Tuerie d’Auguste Préault, s’intéressent à l’emploi de patines colorées dans les sculptures en bronze au xixe siècle. Si ces traitements ne cherchent pas à reproduire la couleur naturelle du sujet représenté, elles renforcent cependant les contrastes des clairs-obscurs ainsi que la différence entre les creux et les saillies. La sculpture utilise la polychromie non pas comme imitation mais pour souligner les effets de la lumière sur ses formes. Gilles Barabant et Pauline Helou-de la Grandière, étudiant un tableau de Soulages, s’interrogent sur le problème posé par les préparations industrielles des toiles à peindre. Elles provoquent en effet des altérations irréversibles, notamment d’importants soulèvements de couche picturale. Soulages est intervenu sur ces altérations, réalisant ainsi une « autorestauration ». L’altération est cependant toujours active et les auteurs se demandent comment refixer la couche picturale et comment intervenir sur les ajouts postérieurs du peintre.
Enfin la troisième partie de l’ouvrage, plus théorique, examine les rapports entre histoire de l’art et théorie de la restauration. Catheline Périer-D’Ieteren, en appuyant sa réflexion sur trois études de cas, montre comment depuis les années 1970 le diagnostic des historiens d’art a changé sur les œuvres à l’aune des éléments apportés par le regard des restaurateurs et les résultats des analyses menées par les scientifiques. Elle rappelle ainsi l’importance d’une réflexion interdisciplinaire dans la compréhension des œuvres d’art. Etienne Jollet revient sur les bipolarités sur lesquelles s’appuie Brandi pour bâtir sa Théorie de la restauration, bipolarités qui vont s’associer pour reconstituer l’unité potentielle de l’œuvre d’art. Il montre que cette approche s’inscrit dans la tradition du double regard, dont les origines remontent au xviie siècle. François Trémolières poursuit la réflexion sur l’œuvre de Brandi en s’interrogeant sur le défaut de jugement produit par le faux en art. En effet, pour Brandi, avant toute restauration doit intervenir la reconnaissance de l’œuvre, impossible ou prise en défaut s’il s’agit d’une falsification. L’obsession du faux, qui est celle du métier de restaurateur, se retrouve dans l’attitude de Brandi vis-à-vis des réintégrations, attitude difficilement applicable en pratique, ce qui pose la question du rapport entre théorie et pratique. Michel Lefftz rappelle le rapport particulier que l’homme entretient avec la statue cultuelle. La folie destructrice des périodes iconoclastes laisse place à la tentative de prolongation de la vie de l’œuvre, même fortement dégradée. Ces interventions ne sont pas sans conséquences sur les sculptures, qui changent d’iconographie ou de forme suivant les adaptations qui en sont faites. Béatrice Sarrazin s’interroge sur la possibilité et la pertinence de restaurer une peinture sur toile ruinée. Le choix à adopter devant un tableau qui a perdu une grande partie de son intégrité est difficile et pose la question de l’acte de restaurer, qui n’est jamais neutre. Quelles sont les limites acceptables d’une intervention, et plus particulièrement d’une réintégration, et comment éviter la falsification ?
L’apport essentiel des études de la matérialité en histoire de l’art se dégage de la lecture de l’ensemble des articles présentés dans l’ouvrage. Très richement illustré par de nombreuses photographies en couleur, bien que de taille souvent petite, le livre ravira les historiens d’art, les scientifiques, les restaurateurs et les archéologues. Si la succession des sujets traités est parfois un peu disparate, à cause du choix de classement opéré par les auteurs, certains articles sont liés entre eux, par la thématique du sujet (la polychromie : Bourgeois / Barbillon et Chevillot), le type d’œuvre étudié (la peinture flamande : Bonneau-Garcia, Cabillic, Grall, Malpel, Mertens, Mirabaud / Curie, Delteil, Leegenhoek), la période traitée (les restaurations néo-gothiques en Belgique : Steyaert / Mercier) ou le rapport entre la théorie et la pratique (Etienne / Trémolières).
L’ouvrage a plusieurs points forts : tout d’abord, la révélation de la technique artistique grâce à une étude croisée des documents historiques et de la matérialité des œuvres est très éclairante et se retrouve dans tous les articles présentant des cas concrets. La mise en lumière des éléments qui ont orienté les choix des restaurateurs, par le passé (première partie de l’ouvrage) et aujourd’hui (seconde partie) montre la transformation du regard sur les œuvres et les modifications des traitements. Un effet miroir se dessine à la lecture du livre, car les controverses sur les partis-pris de restauration adoptés autrefois laissent présager la possibilité d’un changement de goût, qui dans quelques décennies fera peut-être éliminer les choix de restauration actuels (Bresc-Bautier). Car la restauration est en perpétuelle évolution, elle est tributaire du développement des théories (Etienne), et l’histoire de la restauration, soulignant les erreurs du passé, montre que celles-ci sont la conséquence d’une mode à une époque qui voyait dans ces choix un ultime progrès. Il est frappant de constater combien les peintres-restaurateurs de la Gilde de Saint-Luc et Saint-Thomas étaient convaincus de restaurer « à l’identique », pensant abolir la distance temporelle les séparant des artistes dont ils repeignaient les œuvres (Steyaert). Or, les études critiques et théoriques sur la culture visuelle et matérielle ont mis en évidence l’existence d’un regard contemporain sur le passé, qui participe à l’expertise, c’est-à-dire à la reconnaissance de l’œuvre, thème sous-jacent à l’ouvrage discuté ici et bien exposé dans les études théoriques (Jollet ; Trémolières).
On peut regretter l’hétérogénéité des articles dans le recours à l’analyse des matériaux au sein des études de cas (paradoxalement inexistante dans deux articles), ou la condensation en un article d’un trop grand nombre d’informations de ce fait trop peu développées. Cependant, La restauration des peintures et des sculptures est d’une lecture agréable et enrichissante, et met le lecteur en appétit, lui donnant envie d’aller voir les recherches plus approfondies que certains des contributeurs ont publiées depuis. Enfin l’ouvrage a le mérite de rappeler l’importance et la nécessité des études préalables à toute intervention, que celle-ci soit poussée ou minimale.
Table des Matières
Préfaces de Bernadette Madeuf, Thierry Dufrêne, Marie Lavandier et Christina Ceulemans, p. 9-15. Pierre-Yves Kairis, Béatrice Sarrazin et François Trémolières. Introduction : la restauration, connaissance et reconnaissance de l’œuvre d’art, p. 17-21.
Première partie : Histoire de la restauration Brigitte Bourgeois. Marbre blanc, taches de couleur. Polychromie et restauration de la sculpture grecque, p. 25-42. Noémie Étienne. Fenêtre ou miroir ? Quand le vernis définit le tableau (1750-1800), p. 43-52. Geneviève Bresc-Bautier. Les « restaurations » d’Alexandre Lenoir au musée des Monuments français, p. 53-66. Delphine Steyaert. La restauration de la sculpture médiévale vue par la Gilde de Saint-Thomas et de Saint-Luc (1863-1913), p. 67-84. Emmanuelle Mercier. La polychromie en tant que « version » de la sculpture. Lecture et restauration de la statuaire mosane médiévale, p. 85-97.
Deuxième partie : Etude des œuvres. Connaissance matérielle et reconnaissance critique Benoît Mille et Dominique Robcis. Le cas des grands bronzes antiques. Etudier pour restaurer ou restaurer pour étudier ? p. 101-115. Myriam Serck-Dewaide. Identification des techniques et des matériaux de l’illusion baroque, p. 117-133. Georges Brunel, Michel Hochmann et Anne Lepage. Tintoret : la Cène de l’église Saint-François-Xavier à Paris, p. 135-150. Hélène Dubois. Confrontation du Connoisseurship et de l’approche technique autour de Rubens. Reprises de finition et reprises d’expression dans les peintures monumentales rubéniennes, p. 151-171. Hélène Bonneau-Garcia, Isabelle Cabillic, Élisabeth Grall, Agnès Malpel, Juliette Mertens et Sigrid Mirabaud. La restauration de la Crucifixion de Jordaens du musée des Beaux-Arts de Rennes. Enjeux historique, esthétique et scientifique, p. 173-186. Pierre Curie, Florence Delteil et Isabelle Leegenhoek. Restaurer un tableau « intouchable » : Abraham et Melchisédech de Rubens au musée des Beaux-Arts de Caen, p. 187-205. Frédéric Cousinié. Le Christ mort de Philippe de Champaigne. Le lieu, l’art et la manière, p. 207-223. Anne Le Pas de Sécheval. Autour de quelques tableaux de chevalet de Charles le Brun. Réflexions et interrogations, p. 225-242. Morwena Joly, Élisabeth Martin et Nathalie Volle. À propos des recherches sur la technique de Watteau et des peintres des Fêtes galantes. Bilan et perspectives, p. 243-257. José de Los Llanos. La restauration d’un dessus-de-porte de François Boucher. Le retour de la chasse de Diane du musée Cognacq-Jay. Problématique d’un changement de format, p. 259-268. Susanna Caviglia, Eléna Duprez et Bertrand Rondot. La restauration du Cabinet des Fables de l’hôtel Dangé. Objet d’exposition et objet d’histoire, p. 269-296. Claire Barbillon et Catherine Chevillot. La couleur de l’œuvre monochrome. À propos de La Tuerie de Préault, p. 297-312. Gilles Barabant et Pauline Helou de la Grandière. Pierre Soulages. L’art et le métier, la restauration de Peinture, 130 x 165 cm, 18 avril 1959, p. 313-331.
Troisième partie : Histoire de l’art et théorie de la restauration Catherine Périer D’Ieteren. Restauration des peintures et diagnostic de l’historien d’art, p. 335-353. Étienne Jollet. Le double regard. Analyse technique, approche poétique de l’œuvre d’art visuel de la « querelle du coloris » à Cesare Brandi, p. 355-363. François Trémolières. Le faux comme problème pour une théorie de la restauration, p. 365-378. Michel Lefftz. Statues recyclées. Adaptations d’images anciennes à leur nouvelle fonction cultuelle (xiiie-xviiie siècle), p. 379-392. Béatrice Sarrazin. Restaurer une ruine ? Le cas du Saint François mourant dans les bras d’un ange (Paris, musée du Louvre), p. 393-406. Les auteurs, p. 407. Résumés (français, anglais et flamand), p. 419. Index, p. 453.
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Herausgeber: Lorenz E. Baumer, Université de Genève ; Jan Blanc, Université de Genève ; Christian Heck, Université Lille III ; François Queyrel, École pratique des Hautes Études, Paris |