Ferrandes, A. F. - Pardini, G. (curato): Le regole del gioco. Tracce, archeologi, racconti. Studi in onore di Clementina Panella (Lexicon Topographicum Urbis Romae - Supplementum VI), 752 p., 18x22, ISBN:978-88-7140-712-8, 60 €
(Edizioni Quasar, Roma 2016)
 
Compte rendu par Yves Perrin, Université de Lyon-Saint-Etienne
 
Nombre de mots : 2129 mots
Publié en ligne le 2017-07-26
Citation: Histara les comptes rendus (ISSN 2100-0700).
Lien: http://histara.sorbonne.fr/cr.php?cr=2855
Lien pour commander ce livre
 
 

 

          Ce joli et gros livre de 752 pages publié dans la série des suppléments du Lexicon topographicum Urbis Romae rassemble 46 contributions écrites en l’honneur de Clementina Panella par ses amis, collègues et disciples italiens et européens. C’est un juste hommage à une personnalité scientifique dont les travaux de terrain et les publications aussi rigoureuses que claires ont marqué l’archéologie romaine et nourri le renouvellement de la connaissance historique. On songe notamment aux chantiers exemplaires qu’elle dirigea à l’angle nord-est du Palatin et dans la dépression du Colisée. C’est aussi indissociablement l’illustration de ses talents de pédagogue et de chef d’équipe qui a su susciter des vocations et préparer la relève et la reconnaissance de sa haute conscience des responsabilités sociales qu’a l’archéologue. Le titre de l’ouvrage est heureusement formulé pour annoncer ces compétences scientifiques et l’humanisme qui va de pair. Sa structuration en quatre parties reflète les champs qu’elle a défrichés ou ouverts : pratiques et réflexion méthodologiques, archéologie de terrain, histoire de la culture matérielle, de la société et de l’économie, conservation et valorisation du patrimoine.

 

         En ouverture figurent comme il se doit les hommages institutionnels et amicaux des directeurs du département de l’archéologie de son université de La Sapienza, E. Lippolis et A. Carandini, puis une biographie et une bibliographie de C. Panella.

 

         1. Les sept contributions de la première partie « Questions de méthode » portent sur les méthodes de fouille et sur l’art d’en exploiter les résultats. A. Ferrandes réfléchit sur l’établissement des séquences stratigraphiques, E. Giannicheda sur les modalités de l’identification et du classement du matériel, S. Zeggio sur les problèmes de terminologie en prenant l’exemple du matériel votif, E. Brienza et M. Fano sur l’exploitation numérique et la modélisation en 3D des découvertes archéologiques. Plus historiques sont les textes d’A. Carandini qui propose une réflexion théorique sur la méthode historique et de G. Rizzo qui s’interroge sur l’articulation de la culture matérielle et l’histoire.

 

         2. Consacrée aux travaux archéologiques de terrain, la deuxième partie « Rome, l’Italie, la Méditerranée » est la plus longue. En adoptant des critères de topographie et de géographie historiques, on peut y distinguer trois groupes de contributions : le premier traite du Palatin et de la dépression du Colisée, le deuxième des autres quartiers de Rome, le troisième de l’Italie et du monde méditerranéen. Les unes font le point sur des investigations récentes et en cours ou développent des analyses centrées sur tel édifice ou tel mobilier, d’autres proposent des synthèses archéologiques et historiques.

 

         Un livre d’hommages à C. Panella compte naturellement plusieurs contributions sur les aires dont elle a renouvelé la connaissance, la dépression du Colisée et les pentes septentrionales du Palatin. L. Saguì et M. Cante font le point sur les « thermes d’Élagabal » et M. Barbera étudie deux portraits sévériens qui en proviennent ; M. Medri revient sur le complexe des salles souterraines proches de l’arc de Titus et R. Volpe pose la question de l’alimentation en eau de la Meta augustéenne (une dérivation de l’Aqua Marcia traversant l’Esquilin). F. Coarelli reprend le dossier de l’aire des Curiae Veteres en établissant une corrélation avec les Sacraria Argeorum et le Sacrarium Divi Augusti, M. Torelli analyse la signification idéologique et l’imaginaire de la Meta Sudans.

 

         Les autres contributions nous emmènent sur les aires nord-est et sud-ouest du Palatin. F. Villedieu, F. Guibal et N. André font le point sur le complexe sévérien monumental de la Vigna Barberini, E. Lippolis propose une nouvelle restitution et esquisse une nouvelle lecture du fronton identifié en général à celui du temple de Fortuna Respiciens. P. Pensabene et E. Gallocchio rouvrent le dossier des substructions de l’aire sud-ouest. R. Mar et C. Aranegui se penchent sur le palais de Juba II à Lixus pour en décrypter les parentés avec le modèle palatial augustéen, S. Tortorella exploite une série de reliefs pour approfondir la question du sanctuaire de Vesta de la domus Augusti.

 

         Le Palatin n’est pas la seule zone de Rome dont C. Panella a contribué à renouveler la connaissance, cinq contributions en témoignent. Celle d’A. Arnoldus-Huyzendveld traite de la question aujourd’hui sensible des paysages et de l’environnement de la région romaine dans leur relation avec la géomorphologie et l’histoire. D’autres s’inscrivent dans le domaine de la topographie historique. D. Manacorda précise les conséquences de l’incendie qui ravage la zone de la crypta Balbi et le champ de Mars sous Titus, M. Ceci et R. Santangeli Valenzani brossent l’état de la documentation sur l’église de S. Lucia de Calcarario disparue sous la voie des Boutiques Obscures. R. Rea expose les résultats des fouilles liées à l’aménagement de la station de la ligne de métro C à Saint-Jean de Latran : la stratigraphie révèle une occupation continue de l’époque archaïque à l’époque tardive (une villa du IIIe s. av. J.-C. atteint son plein essor à l’époque augustéenne). Enfin C. Conti procède à une étude paléographique de l’inscription de la colonne Trajane.

 

         Le troisième groupe de contributions porte sur l’Italie. A. Guidi brosse une synthèse sur les centres proto-urbains étrusques, P. Carafa et M.T. D’Alessio précisent les apports (et les difficultés) d’une approche stratigraphique au renouvellement des connaissances de l’histoire de Pompéi, C. Pavolini présente l’état des connaissances sur l’Ostie tardo-antique. P.G. Guzzo étudie le riche trousseau d’une femme trouvé dans une tombe d’Atella datable du IIe ou du Ier s. av. J.-C. Complète ces exposés archéologiques une étude de F. Catalli sur les monnaies antiques que les décorateurs du palais Chiericati de Vicence ont pris fidèlement pour modèles au XVI e s.

 

         3. La troisième partie « Culture matérielle, société, économie » illustre l’impact des travaux de C. Panella sur les amphores, la société et les supports matériels et artistiques des idéologies. Les récipients et le vin sont à l’honneur : A. Martin étudie les amphores d’Empoli dans l’aire Rome-Ostie du IIIe au Ve s., D. Nonnis commente éruditement une inscription mentionnant la gens Atinia sur une amphore gréco-italique de Lavinium, G. Bartoloni et V. Acconcia s’intéressent aux tasses à vin italiennes, C. Capelli et M. Bonifay mènent une étude archéométrique des amphores africaines, F. Laubenheimer exploitent les sites où ont été retrouvées des « gauloises 4 » pour cartographier les exportations du vin du midi gaulois dans l’empire et au-delà.

 

         Dans le domaine des activités artisanales, G. Pardini, M. Piacentini, A.C. Felici, M.L. Santarelli et S. Santucci étudient les moules trouvés au nord-est du Palatin qui sont destinés à l’ornementation des tessères de plomb, S. Martin-Kilcher présente le mobilier italique de la lointaine Syène, J. Ramon Torres un pendentif punique d’Ibiza. Dans une analyse à la fois archéologique, métrologique et historique de leurs fers, N. Parise confronte les instruments du châtiment des débiteurs à Syracuse et à Rome.

 

         Les autres textes abordent des problématiques sociales et politiques. M.H. Crawford s’interroge sur les esclaves et la démographie, G.L. Gregori sur les femmes dans la vie des cités méridionales du Latium. P. Matthiae examine les antécédents assyriens des symboles du pouvoir à Rome, S. Panciera décrypte la politique d’Auguste à Carthage et la « romanité » de la cité, V. Morizio la réduction d’Agrippine au silence.

 

         4. La quatrième partie « Entre passé et futur : recherche, conservation et valorisation » est consacrée aux responsabilités collectives de l’archéologue. M. Ranieri Panetta met la question en perspective en esquissant la vision qu’a le grand public de Pompéi du « Grand tour » aux reconstructions virtuelles actuelles. M. Serlorenzi formule la question de savoir si restituer et valoriser les sites fouillés est un devoir ou une option. R. Panella expose le grand projet romain dont il a été maître d’œuvre d’un « musée de la cité » articulant sites patrimoniaux, musées, « musées laboratoires » et institutions scientifiques pour mettre en valeur de manière intelligible et commode un patrimoine exceptionnel. G. Volpe défend l’intérêt d’une archéologie globale des paysages sous marins.

 

         Le volume est agréable à lire, les photographies, illustrations, planches et graphiques - en noir et blanc - sont nombreux (mais de qualité inégale). Chaque contribution donne une bibliographie. Il est dommage qu’aucun index ne facilite une consultation thématique et curieux que les contributions soient données selon l’ordre alphabétique des auteurs (leur regroupement selon des paramètres topographiques ou thématiques eut sans doute été scientifiquement plus judicieux).

 

         Sur le fond, il est impossible de discuter ici chacune des contributions. Qu’elles émanent de savants internationalement réputés - que les textes d’un grand nombre d’éminents chercheurs se trouvent réunis dans un même volume mérite d’être remarqué – ou de chercheurs d’autres générations, toutes sont de haute qualité. D’une grande richesse et d’une grande variété, qu’elles apportent des informations inédites ou brossent des synthèses, elles donneront du grain à moudre aux spécialistes des questions qu’elles traitent. Leur réunion fournit s’il en était besoin la preuve du dynamisme scientifique de l’archéologie romaine et, au-delà, de l’archéologie dans nos sociétés. Cet hommage à Clementina Panella est dans le fond un éloge de l’archéologue contemporain et ce n’est pas étonnant.

 

 

Sommaire

 

Omaggio a Clementina Panella
E. Lippolis, L’Archeologia di Clementina Panella: un’esperienza di ricerca e la ricerca di una funzione sociale, 11
A. Carandini, Tina Panella e la nostra scuola, 15
Clementina Panella. Nota biografica, 17
Bibliografia, 23

Questioni di metodo
E. Brienza, Elettronica e digitale in archeologia: considerazioni metodologiche, 31
A. Carandini, La storia ha un metodo?, 53
M. Fano, Informatica e archeologia, 57
A.F. Ferrandes, Sequenze stratigrafiche e facies ceramiche nello studio della città antica. Il caso delle pendici nord-orientali del Palatino tra IV e III secolo a.C., 77
E. Giannichedda, Identificare e classificare, 113
G. Rizzo, Archeologia, cultura materiale e storia: alcune riflessioni, 129
S. Zeggio, Riflessioni per una terminologia dei contesti votivi di Roma, 147

Roma, l’Italia, il Mediterraneo
A. Arnoldus-Huyzendveld, Aspects of the landscape environment of Rome in antiquity. Changes of land scape, shift of ideas, 177
M. Barbera, Due ritratti imperiali dalle “Terme di Elagabalo” sul Palatino, 203
P. Carafa, M.T. D’Alessio, Pompei: stratigrafia, ricostruzioni e storia della città, 215
F. Catalli, Tipi monetali nella Sala del Firmamento di Palazzo Chiericati a Vicenza, 227
M. Ceci, R. Santangeli Valenzani, La chiesa di s. Lucia de Calcarario. Nuovi dati dalle indagini a via delle Botteghe Oscure, 235
F. Coarelli, Curiae Veteres, Sacraria Argeorum, Sacrarium Divi Augusti, 249
C. Conti, Colonna Traiana: ordinatio dell’epigrafe, 263
A. Guidi, Le prime città dell’area medio-tirrenica, 271
P.G. Guzzo, Un corredo di età repubblicana dalla necropoli di Atella, 283
E. Lippolis, Il sacrificio ‘rappresentato’. Iconografia e rituale nel frontone di via San Gregorio, 293
D. Manacorda, Tra le macercie dell’incendio di Tito, 321
R. Mar, C. Aranegui, De la casa de Augusto en el Palatino al Palacio de Juba II en Lixus: los palacios imperiales de Roma vistos desde África, 337
M. Medri, L’edificio ipogeo di fronte all’Arco di Tito, pendici settentrionali del Palatino: alcuni aggiornamenti, 357
C. Pavolini, Per un riesame del problema di Ostia nella tarda antichità: indice degli argomenti, 385
P. Pensabene, E. Gallocchio, Il sistema sostruttivo nell’area sud-ovest del Palatin, 407
R. Rea, Archeologia nel suburbio di Roma. La stazione S. Giovanni della Linea C della metropolitana, 425
L. Saguì, M. Cante, Pendici nord-orientali del Palatino: ultime novità dalle “Terme di Elagabalo”, 443
M. Torelli, Meta Sudans. Ideologia e immaginario del monumento, 463
S. Tortorella, Il Palladio, Vesta e Augusto,473
F. Villedieu, F. Guibal, N. André, Observations et réflexions sur la réalisation de fondations du complexe monumental sévérien de la Vigna Barberini, 489
R. Volpe, Acqua alla Meta di Augusto, 509

Cultura materiale, società, economia
G. Bartoloni, V. Acconcia, Un brindisi per Tina Panella. Ancora sul vino in Italia: le tazze-attingitoio, 521
C. Capelli, M. Bonifay, Archeologia e archeometria delle anfore dell’Africa romana. Nuovi dati e problemi aperti, 535
M.H. Crawford, Damned slaves and demography, 559
G.L. Gregori, Tra Minturnae e Tarracina: donne e vita cittadina nel Lazio meridionale, 563
F. Laubenheimer, Le vin gaulois du Midi, aux frontières de l’Empire et au-delà, 569
A. Martin, L’anfora di Empoli nell’area romano-ostiense, 579
S. Martin-Kilcher, Du mobilier italique à Syène, la ville la plus méridionale de l’Empire romain, 591
V. Morizio, Il silenzio di Agrippina, 599
P. Matthiae, Sui simboli del potere nell’impero d’Assiria. Una nota sugli antecedenti delle insegne imperiali di Roma, 613
D. Nonnis, Un graffito nominale su un’anfora greco-italica dall’area centrale di Lavinium, 623
S. Panciera, Augusto Roma e Cartagine, 639
G. Pardini, M. Piacentini, A.C. Felici, M.L. Santarelli, S. Santucci, Matrici per tessere plumbee dalle pendici nord-orientali del Palatino. Nota preliminare, 649
N. Parise, In ceppi e catene a Siracusa e Roma, 669
J. Ramon Torres, Note à propos d’un pendentif punique en or, avec représentation divine, trouvé dans l’acropole d’Ibiza, 673

Tra passato e futuro: ricerca, tutela e valorizzazione
R. Panella, Una Città Museo e un Museo-Laboratorio della Città per Roma, 679
M. Ranieri Panetta, Pompei: nascita e sviluppo di un mito. Dal Grand Tour alle ricostruzioni virtuali, 701
M. Serlorenzi, Restituire e valorizzare i siti indagati: un dovere o un optional?, 723
G. Volpe, Per un’archeologia globale dei paesaggi (terrestri e) subacquei, 745