Civitillo, Matilde : La scrittura geroglifica minoica sui sigilli. Il messaggio della glittica protopalaziale, pp. 280 con 27 tabelle, 44 figure e 8 tavole in bianco/nero n.t. (Biblioteca di «Pasiphae», XII), ISBN: 978-88-6227-876-8, 160 €
(Fabrizio Serra editore, Pisa-Roma 2016)
 
Compte rendu par Gérard Capdeville, Université Paris Sorbonne
 
Nombre de mots : 538 mots
Publié en ligne le 2017-11-29
Citation: Histara les comptes rendus (ISSN 2100-0700).
Lien: http://histara.sorbonne.fr/cr.php?cr=2904
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         L’ambition proclamée de ce livre est de percer le secret de l’écriture hiéroglyphique minoenne figurant sur des sceaux de l’époque protopalatiale. L’auteur présente d’abord un état des lieux : 136 sceaux et 57 empreintes, publiés par Louis Godard et Jean-Pierre Olivier dans le Corpus Hieroglyphicarum Inscriptionum Cretae [CHIC] (École française d’Athènes, Études Crétoises, 31), Paris, 1996, mais figurant aussi, avec  les autres sceaux crétois, dans le Corpus der minoischen und mykenischen Siegel [CMS] ; elle précise que l’appellation d’ “écriture hiéroglyphique”, due à A. Evans, est conservée  par tradition, mais qu’il n’y a pas de rapport avec l’écriture homonyme d’Egypte.

 

         L’un des premiers problèmes à résoudre est de distinguer les éléments purement décoratifs de ceux qui sont réellement signifiants : la recherche s’inscrit ici dans la voie ouverte par Anna Margherita M. JASINK dans son ouvrage Cretan Hieroglyphic Seals. A new classification of Symbols and ornamenteal/filling motifs, paru en 2009, chez le même éditeur et dans la même collection (Biblioteca di «Pasiphae» • VIII), qui avait déjà “récupéré” plusieurs signes considérés comme  décoratifs par les éditeurs. Il s’agit  ensuite d’analyser la mise en relation des éléments signifiants : avec un grand sens pédagogique, expliquant constamment sa démarche, l’auteur nous conduit pas à pas d’un livre d’images à une mine de contenus variés. Mais il est impossible de résumer ici une méthode aussi complexe, reliée en permanence aux possibilités de déchiffrement. On peut néanmoins en reprendre quelques éléments concrets :

 

- les sceaux proviennent de trois dépôts principaux, un à Cnosos, 2 à Mallia (Quartier Mu et Palais), auxquels s’ajoutent quelques exemplaires isolés (p.ex. à Haghia Triada).

- sur un total d’environ 1600 sceaux connus, 136 présentent une écriture hiéroglyphique ; chronologiquement, ils se situent entre le MM I A et le MM II B (début du second millénaire).

- le système comprend simultanément des signes linguistiques (phonétiques) et idéographiques : 96 syllabogrammes en face de 25 pictogrammes.

- les sceaux peuvent comporter d’une à quatre faces, certaines restant vides ou comprenant seulement des éléments décoratifs ; plus le sceau a de faces, plus son message est complexe et plus son détenteur devait occuper un poste élevé dans la hiérarchie administrative : le sceau est un signe du statut de son propriétaire.

 

         Sur le chemin vers la compréhension, l’auteur étudie la fréquence des signes, leur disposition sur les diverses faces des prismes, leurs associations, leurs groupements, parfois en “formule”, dont la plus évidente est dite “formule d’Archanes”. Son souci de la précision multiplie les incises et les citations – au détriment, parfois, de la limpidité de l’exposé.

 

         L’appareil graphique est impeccable. Les sceaux, les signes sont tous reproduits avec une grande précision, aussi bien dans le cours du développement qu’ils illustrent, qu’à la fin, où ils sont intégralement repris, avec des indications techniques, comme la nature de la pierre ou la technique de la gravure.

 

         Toutefois, on ne peut s’empêcher d’être décu, à certains égards. Car la probité de l’auteur l’amène à s’abstenir de toute interprétation, de toute “traduction”. Le “miracle” qui permit le déchiffrement de la pierre de Rosette ou celui du linéaire B ne s’est pas reproduit pour l’écriture hiéroglyphique crétoise. Il reste que ce livre marque une nouvelle étape dans la voie qui peut y conduire, de manière magistrale.