Olcese, G. - Coletti, C. : Ceramiche da contesti repubblicani del territorio di Ostia, (Immensa aequora), 556 p., 65 €
(Edizioni Quasar, Roma 2017)
 
Recensione di Vincent Jolivet, CNRS
 
Numero di parole: 2827 parole
Pubblicato on line il 2018-10-29
Histara les comptes rendus (ISSN 2100-0700).
Link: http://histara.sorbonne.fr/cr.php?cr=3364
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          Placé sous la double figure tutélaire d'Anna Gallina Zevi, à laquelle il est dédié, et de Jean-Paul Morel, qui l'a préfacé, ce fort volume rassemble les travaux d'une dizaine de chercheurs, archéologues, céramologues et archéomètres. Né de la collaboration féconde nouée en 2004 entre La Sapienza-Università di Roma et la Soprintendenza Speciale per i Beni Archeologici di Roma-Ostia Antica, il se propose de soumettre à une approche multidisciplinaire (notamment archéométrique, particulièrement nécessaire aujourd'hui pour permettre les progrès de la recherche dans ce domaine) le résultat de fouilles, anciennes ou récentes, en partie révélé par les opérations préventives menées à la fin du XXe siècle et au début du siècle suivant dans le secteur de l'aéroport de Fiumicino. Ce volume s'inscrit donc logiquement dans le projet Immensa Aequora, dirigé par Gloria Olcese, qui a pour objectif de "ricostruire i commerci nel Mediterraneo in epoca ellenistica e romana attraverso nuovi approcci scientifici e tecnologici", et dans le cadre duquel a été publié, en 2012, l'important Atlante dei siti di produzione ceramica.

 

         Si le cadre qu'il se fixe d'emblée est celui du territoire d'Ostie à l'époque républicaine, entre le milieu du IVe siècle et la fin du Ier siècle av. J.-C., le volume distingue ce qui serait un "territoire d'Ostie", au sud du Tibre, d'un "ager Portuensis", au nord de celui-ci. On peut s'interroger sur l'intérêt de cette distinction, dans la mesure il n'existe pas de portus dans cette zone à l'époque considérée, et où la victoire sur Véies avait permis de rattacher tout le territoire de la grande métropole étrusque à l'ager Romanus [1] - au sein duquel, à partir de la fondation d'Ostie (dont la date est encore discutée), l'ager Ostiensis s'étendait certainement de part et d'autre du Tibre, de chaque côté duquel se trouvaient des salines : si l'existence d'un ager Ostiensis est attestée aussi bien par Tite- Live (8.12.2, à propos d'un épisode situé en 340 av. J.-C.) que par le Liber Coloniarum (1.8.48), celle d'un ager Portuensis est une création moderne, certes commode pour distinguer la portion septentrionale du territoire d'Ostie (qui a dû confiner vers le nord, à partir du milieu du IIIe siècle, avec celui de la colonie de Fregenae), mais sans pertinence réelle pour l'époque concernée ; les références à la via Portuensis et à l'aqua Portuensis, toutes deux d'époque impériale - l'axe routier qui desservait cette zone était à l'origine la via Campana (du nom, précisément, du campus Salinarum), dont la via Portuensis a repris, au moins en partie, le tracé[2] -, ne s'imposaient pas ici. On peut donc se demander s'il était véritablement opportun, sur le plan historique, de scinder la présentation du contexte territorial en sud (II.1, A. Pellegrino) et nord du Tibre (III.1, C. Morelli), plutôt que de tenter de comprendre globalement, à partir de l'ensemble de ce nouveau dossier archéologique, comment la création du castrum et son développement successif ont influé sur l'occupation du territoire environnant, qui a du reste fait l'objet d'une occupation bien antérieure à la fondation d'Ostie. La situation est en effet d'autant plus complexe ici qu'il faudrait prendre en considération aussi la cité latine toute proche (environ 6 km au nord-est d'Ostie) de Ficana, revitalisée vers la fin du IVe siècle (p. 65), et dans l'orbite de laquelle, probablement, gravitent plutôt les deux sites du sud du Tibre présentés ici. Quoi qu'il en soit, il est clair que les données inédites présentées dans ce volume sont également très importantes en regard de Rome, pour laquelle on commence seulement maintenant, grâce aux fouilles récentes menées sur le Palatin ou le Forum en particulier, à disposer de riches ensembles stratigraphiques d'époque républicaine.

 

         Au niveau de la présentation des données, les deux secteurs géographiques sont donc présentés séparément dans les chapitres II et III, avec un nombre de sites bien plus important au nord (9 sites) qu'au sud du fleuve (2 sites - celui de Dragoncello, figurant sur la carte de la p. 66, n'est pas pris en compte) : indépendamment de ce déséquilibre, qui ne fait sans doute que refléter le phénomène d'urbanisation récente du premier secteur, où se sont déroulées plus de fouilles préventives, il aurait été utile de regrouper l'ensemble des sites et de les numéroter en continu (de 1 à 11, par conséquent), de manière à éviter des références à des numérotations antérieures susceptibles de créer une certaine confusion chez le lecteur - les sites au sud du Tibre ne sont pas numérotés, ceux au nord présentent une double numérotation qui risque d'engendrer des confusions (la deuxième partie du chapitre III renvoie au site 1, etc., jusqu'au site 9 pour la dixième partie). La position de l'ensemble des sites figure sur la carte de la p. 19 (sans échelle), qui aurait pu être allégée des indications relatives à des numérotations antérieures, par ailleurs clairement indiquées dans le texte, et sur laquelle manque bizarrement... le site d'Ostie.

 

         La première partie (p. 13-96) comporte trois chapitres : le premier présente les objectifs, les résultats et les perspectives de la recherche (avec un appendice sur les recherches archéométriques antérieures), le deuxième les sites du "territoire d'Ostie", le troisième ceux du "territoire de Portus". Le mobilier est réparti d'emblée (p. 20-26) en fonction de trois périodes, 350-250 (au vu du mobilier présenté, la date supérieure doit probablement être abaissée d'un quart de siècle environ), 250-200 et IIe-Ier siècles. Cette synthèse préliminaire à l'ouvrage est très efficacement illustrée par des figures comportant systématiquement dessins et photos en couleurs d'une sélection d'objets représentatifs des différentes phases, dont les analyses archéométriques ne permettent guère cependant (hormis pour certaines amphores) de préciser la zone de production au sein de la vaste "mid-republican Etrusco-Latin koiné" (p. 27).

 

         La deuxième partie (p. 97-174) est une synthèse relative aux céramiques républicaines du territoire d'Ostie (ici réunifié), fondé sur l'étude d'un peu plus de 7000 fragments, pour l'essentiel de cuisine (43 %), à vernis noir (38 %) et de table (9,5 %), avec un déséquilibre très marqué entre les trois périodes : 72 % des fragments identifiés se rapportent à la première (dont l'importance est soulignée d'emblée par la couverture du volume), 23 % à la deuxième,  et 5 %, seulement à la troisième - déséquilibre tout à fait surprenant pour un territoire qu'on pourrait imaginer, a priori, progressivement occupé de manière de plus en plus dense en fonction des progrès de la pax romana - on note, à cet égard, l'étonnante absence de vases à parois fines. Le premier chapitre expose les données de la recherche, le second présente les différentes attestations en contexte, illustrées synthétiquement par des tableaux (des planches de profils relatives aux différents sites auraient également été bienvenues ici, mais on trouvera ceux-ci ailleurs dans le volume). Pour une raison qui n'est pas explicitée, ce second chapitre ne comporte plus que dix sites, le site 2 (= III.3=Nuova Fiera di Roma, site 30), qui a livré du mobilier impérial, mais aussi un intéressant ensemble clos d'époque médio-républicaine datable des IIIe-IIe siècles (p. 80-81), n'étant plus mentionné à ce stade (ni dans les tableaux de la quatrième partie). Cette partie se referme (p. 163-174) sur un utile appendice fournissant des données comparatives inédites sur le mobilier du "tempio dell'ara rotonda" de l'aire urbaine d'Ostie.

 

         La troisième partie (p. 175-239) présente, au fil de quatre chapitres, les résultats des analyses de laboratoire effectuées dans le cadre du projet (à rapprocher, par conséquent, de celles plus anciennes présentées aux p. 41-64), classés par groupes de pâtes, fréquents ou occasionnels : 5 pour la céramique à vernis noir ; 8 pour la commune de cuisine ; 3 pour la commune de table/stockage et céramique pesante (dont peu d'échantillons ont cependant été analysés) ; amphores. Pour la céramique à vernis noir, l'analyse chimique permet d'exclure une provenance d'Étrurie septentrionale ou de Campanie, tandis que la situation est moins claire, et l'éventail des hypothèses plus large, pour les autres classes - à l'exception des amphores, pour lesquelles on dispose déjà d'un longue tradition de recherche, et au sein desquelles on trouve, à côté de provenance générique des "complessi vulcanici dell'Italia centrale tirrenica", des exemplaires produits à Minturnes et à Pompéi.

 

         La quatrième partie, qui représente près de la moitié du livre (p. 241-492), se compose de non moins de 8 catalogues regroupant l'ensemble des données, pour chaque classe, par formes : céramique à figures rouges[3] ; à vernis noir, incluant la céramique à décor surpeint, et alimentant deux catalogues distincts, puisque les estampilles sont présentées séparément dans une partie qui vient partiellement combler une lacune de la recherche, dans l'attente de la publication du second volume de la somme de J.-P. Morel, mais dont le répertoire est singulièrement répétitif, la plupart des 149 exemplaires étant reconductibles (le catalogue aurait mérité d'être hiérarchisé par motifs) au type de la rosette[4] ou de la palmette (p. 387-388) ; céramique commune de cuisine ; commune de table et de stockage ; pesante (bassins et dolia) ; amphores ; autres classes de mobilier [5].

 

         L'ouvrage se referme sur 9 utiles planches en couleur des objets (p. 493-502) et de manière plus inattendue, compte tenu de ses objectifs, sur un appendice (p. 503-535) livrant les premières informations sur un contexte d'époque augustéenne fouillé entre 1998 et 2006  à Ostie, complété par un catalogue des amphores qui y ont été retrouvées.

 

         La bibliographie (p. 537-555) regroupe environ 450 titres. Bibliothécaires et bibliophiles auront soin de faire relier l'ouvrage au plus vite, si j'en juge par la rapidité avec laquelle la couverture de mon exemplaire s'est détachée au cours du travail de préparation de ce compte rendu.

 

         Les céramologues, tout comme les historiens de Rome, trouveront donc dans ce volume, édité à un prix honnête, une moisson de données nouvelles, organisées de manière claire et efficace - même si une partie de la documentation, donnée ici sous forme de tableaux, aurait pu être rassemblée dans des annexes, ou déposée dans le volet "database" du site internet du projet (http://www.immensaaequora.org).

 

         Inévitablement, on peut s'interroger sur certains choix de présentation opérés. Il n'était probablement pas nécessaire, en particulier, de dupliquer les notices relatives à chaque site, entre les chapitres II et III de la première partie, d'une part, et le chapitre V de la deuxième partie, d'autre part, d'autant plus qu'il existe parfois des incohérences entre les données fournies dans ces différentes présentations, voire entre texte et notes (le site n. 5 est-il un four, p. 79 et 83, ou non, p. 95, note 107 ?). Le regroupement des données archéométriques, ici divisé entre l'appendice du chapitre I de la première partie et la partie III, aurait permis de mesurer plus directement le progrès des méthodes et des acquis dans ce domaine - même s'il semble encore aujourd'hui difficile de dépasser le stade d'identification d'une aire latiale, au sens moderne du terme, pour situer les ateliers. Dans la succession des classes de céramiques, il aurait été plus judicieux, à mon sens, de présenter ensemble la céramique à figures rouges et surpeinte (ici classée avec le vernis noir), et surtout de faire suivre le vernis noir, plutôt que par la céramique de cuisine, par la céramique dépurée (de table et de stockage), puisque celle-ci, en tout cas au début de la période hellénistique, présente souvent les mêmes pâtes et les mêmes formes que les céramiques décorées et à vernis noir. Enfin, du fait des différents axes privilégiés dans les chapitres du volume, certains objets y sont figurés jusqu'à 7 fois, comme c'est le cas d'un plat de Genucilia (3 photos dont 2 en couleurs aux p. 22, 245 et 494 ; 4 dessins aux p. 21, 100, 243 et 245).

 

         Je doute qu'il soit possible en refermant ce livre, d'affirmer, avec J.-P. Morel (p. 12) qu'il s'agissait d'une "zone ne connaissant (ou en tout cas de connaissant guère) ni ce qui se faisait en Campanie, même septentrionale, ni ce qui se faisait en Étrurie, même méridionale", dans la mesure où rien, dans le volume, ne permet d'exclure, précisément, la provenance d'une partie - indéterminée, faute de moyen de localiser avec précision les ateliers - de ces céramiques de cette dernière région, en tout cas. Pour reprendre ainsi le cas d'un groupe emblématique, à propos duquel rien n'était simple jusqu'à présent, tout se complique aujourd'hui avec la distinction désormais effectuée en milieu italien entre l'Atelier des Petites estampilles et le Gruppo dei Piccoli Stampigli (p. 113), qui ne recouvrent pas les mêmes ensembles, et dont on peut gager qu'elle donnera du fil à retordre aux céramologues de demain. Les différents sous-groupes qui le composent peuvent encore difficilement être localisés avec certitude.

 

         En conclusion, il faut saluer ce travail collectif considérable d'inventaire et d'étude d'un lot inédit de matériel issu d'un secteur stratégique et jusqu'à présent mal connu, en dépit de son importance pour l'histoire de Rome, qui deviendra vite indispensable aux céramologues, mais aussi aux historiens.

 

 


[1] Après la destruction de leur ville, les Véiens n'étaient évidemment pas en mesure de chercher à reprendre le contrôle des salines (p. 71 et 80) : Tite-Live rapporte les tentatives réalisées en ce sens, en 390, aux "Étrusques" (probablement une coalition de cités d'Étrurie méridionale), en 356, aux Tarquiniens et aux Falisques, en 353 aux Tarquiniens et aux Cérites.

[2] Ce territoire était également accessible, sans passer par Rome, par un certain nombre de parcours antérieurs à la conquête romaine et, peu après le milieu du IIIe siècle, par des diverticules de la via Aurelia : voir, en dernier lieu, AA.VV., Entre la terre et la mer. La via Aurelia et la topographie du littoral du Latium et de la Toscane, Rome, 2018.

[3] Il m'est impossible de discuter dans ce cadre une perspective nouvelle ouverte par cet ouvrage, selon laquelle des vases à figures rouges que l'on pense traditionnellement avoir été produits, vers 325, à Faléries ou à Cerveteri, l'auraient été en réalité à proximité d'Ostie, et les conséquences que cette donnée pourrait avoir sur notre approche des ateliers céramiques étrusques du début de l'époque hellénistique : cf. ma contribution, La grande Rome de Quintus Fabius Maximus Rullianus et le Latium, dans F. Cifarelli, S. Gatti et D. Palombi (dir.), Roma & Lazio Medio Repubblicani, Rome (à paraître).

[4] Je tendrais cependant, dans ce domaine, à faire clairement la différence entre la rosette, formée de véritables pétales, et l'étoile, dont les rayons s'achèvent en pointe et qui, au début de l'époque hellénistique, pourrait renvoyer, comme sur les strigiles en bronze, au symbole par excellence de la monarchie macédonienne (c'est le cas ici pour les estampilles n. 40, 44-45, 56-57, 59, 108, 114, 117, 119 et 135). Faut-il y voir, conformément à la doxa, des motifs décoratifs dépourvus de toute signification ou bien, dans certains cas,  des messages subliminaux transmis par le vecteur céramique ?

[5] Dans cette dernière catégorie, on notera l'arula représentant une femme sur un taureau (p. 82 et 489), interprétée classiquement comme une néréide, mais qui pourrait tout aussi bien, et probablement plus vraisemblablement, figurer Europe

 
 

 

SOMMAIRE

 

Préface [J-P. Morel], p. 11-12

 

Parte I. IL PROGETTO DI RICERCA E I CONTESTI, p. 13-96

Capitolo I. Un progetto di ricerca per le ceramiche repubblicane del territorio ostiense [G. Olcese], p. 15-40

            Appendice I. Le ricerche archeometriche pregresse sulle ceramiche di Roma e di alcuni siti del Lazio [G. Olcese], p. 41-63

Capitolo II. I siti repubblicani del territorio di Ostia  [A. Pellegrino, A. Carbonara], p. 65-68

Capitolo III. I siti repubblicani dell'Ager Portuensis [C. Morelli, A. Carbonara, V. Forte], p. 69-96

Parte II. LE CERAMICHE REPUBBLICANE DEL TERRITORIO OSTIENSE, p. 97-174

Capitolo IV. I dati della ricerca, p. 99-130

Capitolo V. Le attestazioni nei contesti, p. 131-162

            Appendice II. Un confronto con l'area urbana di Ostia: i materiali repubblicani del tempio dell'ara rotonda [I. Manzini], p. 163-174


Parte III. I DATI DI LABORATORIO  [G. Olcese, C. Capelli et alii], p. 175-240

Capitolo VI. Ceramica a vernice nera p. 177-192

Capitolo VII. Ceramica comune da cucina, p. 193-210

Capitolo VIII. Ceramica comune da mensa/dispensa e ceramica pesante, p. 211-215

Capitolo IX. Anfore, p. 217-239


Parte IV. CATALOGHI, p. 241-502

Introduzione ai cataloghi, p. 242

Catalogo 1. Ceramica a figure rosse, p. 243-247

Catalogo 2. Ceramica a vernice nera, p. 249-338

Catalogo 3. Ceramica a vernice nera: le decorazioni stampigliate [S. Pisani, I. Manzini], p. 339-388

Catalogo 4. Ceramica comune da cucina, p. 389-413

Catalogo 5. Ceramica comune da mensa e dispensa, p. 415-443

Catalogo 6. Ceramica pesante, p. 445-456

Catalogo 7. Anfore, p. 457-488

Catalogo 8. Altre classi di materiali, p. 489-492

            Tavole a colori delle ceramiche del territorio ostiense [D. M. Surace],  p. 493-502

            Appendice III. Un contesto augusteo ad Ostia (Stazione di Ostia Antica - Binario Morto): primi dati di studio [A. Carbonara, A. Pellegrino, G. Olcese, A. Razza, D. M. Surace],  p. 503-514

            Catalogo delle anfore [A. Razza, D. M. Surace], p. 515-535


Abbreviazioni bibliografiche, p. 537-555