Behling, Claudia-Maria: Kinderdarstellungen in der Spätantike und im frühen Christentum. Untersuchung der Bildtypen, ihrer Entwicklung und Verwendung, (Phoibos Humanities Series 5), 243 S. mit 44 Farb- u. SW-Tafeln, 29,7 x 21 cm, ISBN : 978-3-85161-142-7, 69 €
(Phoibos Verlag, Wien 2016)
 
Compte rendu par Lucas Michaelis
 
Nombre de mots : 1180 mots
Publié en ligne le 2018-05-31
Citation: Histara les comptes rendus (ISSN 2100-0700).
Lien: http://histara.sorbonne.fr/cr.php?cr=3414
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          Rares sont les publications sur les représentations d’enfants dans l’Antiquité romaine, notamment durant le Bas-Empire. C’est pourquoi la publication de Claudia-Maria Behling est particulièrement appréciable car elle couvre une époque dont les sources littéraires et surtout artistiques sont plus rares que pour le Haut-Empire. Comme l’indique l’auteur dans l’introduction, l’ouvrage représente une version légèrement modifiée de sa thèse, soutenue en 2014 à l’Université de Vienne, en Autriche. Selon lui, ces changements ont surtout porté sur le nombre et la qualité des illustrations. Or, on ne peut que le féliciter sur ces deux points, si l’on considère le prix du volume.    

 

         La publication de Behling est structurée en cinq chapitres principaux, dont le premier couvre le monde des enfants « die Welt der Kinder », le deuxième, les enfants dans la vie privée « Kinder der vita privata », le troisième, les enfants de la famille impériale « Kinder der Kaiserfamilie », le quatrième, l’enfant Jésus « Jesuskind » et le cinquième, d’autres enfants de l’Ancien et du Nouveau Testaments «  Weitere Kinder aus alt- und neutestamentlichen Schriften ». Avant de conclure, l’auteur rajoute encore un court chapitre de 4 pages sur les enfants martyrs.

 

         L’intérêt de cet ouvrage réside surtout dans l’époque examinée, comme cela est souligné par l’auteur dans l’introduction (p. 10). En effet, avec l’arrivée du christianisme, une nouvelle façon de considérer la vie humaine et la position de l’enfant dans la société marque profondément le monde romain. C’est pour cela que l’auteur commence – de façon très universitaire – par définir le terme d’ « enfance ». Cette définition s’appuie sur nombre de sources écrites, qui illustrent dès le début la rigueur de l’auteur (p. 12 – 13). Un aspect particulièrement intéressant est traité par l'auteur dans le sous-chapitre sur les naissances indésirables (p. 21 – 22). De notre point de vue moderne, il semble évident que le monde romain a fait une évolution vers une société plus humaine avec l’abandon du paganisme en faveur du christianisme. Néanmoins, l’auteur nous montre, grâce à des sources écrites, que même jusqu’au VIIIe siècle, les autorités de l’Église ne parvenaient pas à mettre fin à la pratique de l’abandon d’enfants non désirés (p. 24 – 25).

 

         Dans le deuxième chapitre, l’auteur insiste sur le fait que le nombre limité de tombeaux et sarcophages d’enfants ne doit pas être considéré comme le signe du peu de valeur accordée à la vie de l’enfant dans la société. Ici, elle démontre que les sarcophages préservés ne représentent qu’une petite partie de l’ensemble existant pendant l’Antiquité (p. 31). Pourtant, c’est vraisemblablement le cas aussi pour les sarcophages des adultes, de sorte que l’équilibre est rétabli. C’est pourquoi l’auteur nous doit une autre explication sur ce paradoxe. Par la suite, l’auteur nous indique d’autres détails intéressants relatifs à la durée de production des sarcophages et à d’autres aspects des funérailles qui sont très bien soutenus par certaines sources ainsi que par la littérature (p. 32 – 36). C’est également le cas pour le sous-chapitre sur la mort des bébés, bien qu'il reste très descriptif (p. 36 – 41). Quoi qu’il en soit, la description détaillée des œuvres d’art funéraire demeure l’un des points forts de cet ouvrage (p. 42 – 48). L’existence de portraits modifiés (« Umarbeitungen ») est également indiquée par l’auteur (p. 49), bien qu’il s’agisse d’une situation courante – surtout à partir de l’époque des Empereurs Soldats, durant le règne de Constantin – élément connu de tous les chercheurs travaillant sur les portraits antiques. Au sujet d'un médaillon funéraire qui se trouve à Linz (p. 56), l’auteur aurait pu préciser la datation (« welches man dem 3. Jahrhundert zuwies »), car la femme porte clairement une « Helmfrisur » de Iulia Domna (193 – 217 après J. – C.) et une stèle funéraire de Savaria sur laquelle la défunte est représentée avec une coiffure de Julia Mamaea (222 – 235 après J.-C.).  Un « Zwischengoldglas » - un verre portant une image dorée – est daté par l’auteur du règne de Gallien (253 – 268 après J. – C.) en raison des coiffures du fils et de la mère.  Pourtant, la coiffure féminine sur cette image date plutôt du règne de Constantin Ier (306 – 337 après J. – C.). Dans le sous-chapitre 4 du deuxième chapitre, Behling traite des activités du temps libre comme la conduite des chariots, le jeu de noix, des exercices athlétiques et d’autres jeux (p. 62 – 78). Le sous-chapitre « Mädchen beim Spiel » nous décrit comment le fait de jouer à la poupée préparait la fille à son futur rôle de mère et de femme au foyer, ce qui n’est pas vraiment une découverte (p. 64).

 

         Le troisième chapitre commence avec la reprise du fameux tondo à Berlin montrant l’Empereur Septime Sévère et sa famille, qui fut certainement fabriqué lors de leur voyage en Égypte en 200 après J.-C. Il n’y a certainement aucune nécessité pour l’auteur de remettre cette datation en doute, (p. 92), et celle-ci est même confirmée par la suite (p. 97).

 

         Le début du chapitre 4 sur le « Jesuskind » traite de faits historiques et archéologiques déjà bien connus (p. 99 – 101). Puis, Behling présente les 5 différents types de scènes de Nativité, évoluant durant les siècles et commençant à l’époque Constantine (p. 101 – 107).

 

         Le chapitre 5 sur les enfants dans les textes de l’Ancien et du Nouveau Testaments (p. 125 – 135) est particulièrement intéressant. L'auteur a bien su montrer les exemples importants de représentations d’enfants dans l’art paléochrétien, notamment ceux qui se trouvent dans les catacombes romaines (p. 126), en les comparant avec la même scène biblique (sacrifice d’Abraham) sur un sarcophage de la même époque à Rome.    

 

         La bibliographie de 35 pages est très vaste, mais tout-à-fait cohérente avec les notes du texte. L’auteur a pris soin de justifier ses positions avec des citations et des argumentations scientifiques, qui vont exactement dans le sens d’une thèse universitaire. Des ouvrages écrits dans les quatre grandes langues de l’archéologie, allemande, anglaise, française et italienne, se retrouvent dans la bibliographie, ce qui montre clairement que Behling ne se limite pas à des publications allemandes.

 

         Pour finir, il convient de s'interroger sur le type de lecteur auquel le livre s'adresse. L'ouvrage est très technique et universitaire dans sa façon de décrire les œuvres d’art. Ses argumentations sont étayées et chaque étudiant en histoire de l’art ou archéologie qui s’intéresse à la représentation de l’enfant dans l’Antiquité tardive ou son rôle dans la société devrait trouver ici une très bonne base pour ses recherches. C’est également le cas pour les chercheurs, car la rigueur et la précision avec laquelle l’auteur a traité ce sujet sont remarquables. Néanmoins, aux yeux du chercheur, il manque dans ce livre un peu d’originalité et des découvertes vraiment nouvelles, ceci étant peut-être dû au sujet. À la décharge de l’auteur, les sources tant écrites qu’artistiques pour cette époque sont relativement limitées et de ce fait, il est toujours difficile pour des études portant sur la fin de l’Empire romain de surprendre le lecteur avec des informations vraiment novatrices. Malgré tout, le livre rassemble des aspects importants du sujet et pourra nourrir toute étude sur l’enfant dans l’Antiquité.