Şenol, Ahmet Kaan : Commercial amphorae in the Graeco-Roman Museum of Alexandria, (Études Alexandrines, 44, CEAlex), ISBN : 978-2-490128-00-6, 40 €
(Editions de Boccard, Paris 2018)
 
Compte rendu par Nairusz Haidar Vela, Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne
 
Nombre de mots : 1099 mots
Publié en ligne le 2019-08-28
Citation: Histara les comptes rendus (ISSN 2100-0700).
Lien: http://histara.sorbonne.fr/cr.php?cr=3495
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          L’ouvrage Commercial amphorae in the Graeco-Roman Museum of Alexandria, publié par Ahmet Kaan Şenol, professeur à l’Université Ege d’Izmir (Turquie), s’inscrit dans la collection Études Alexandrines, du Centre d’Études Alexandrines. De format A4, l’ouvrage compte 618 pages et offre de nombreuses illustrations en couleur. 

 

         L’ouvrage débute par une longue introduction présentant à la fois la nature de la collection et la méthodologie, puis se divise en onze chapitres, chacun d’entre eux étant dédié à une zone géographique productrice d’amphores durant l’Antiquité. Ainsi, le chapitre 1 est celui qui compte le plus d’individus, étant consacré aux amphores provenant d’ateliers égyptiens, du type AE1 au type AE8, auxquels il faut ajouter les amphores à anses de panier et les amphores égyptiennes de type torpedo. Le deuxième chapitre est dévolu aux amphores nord-africaines et présente successivement les amphores tripolitaines, les amphores de tradition punique et les amphores tunisiennes. Le chapitre 3 comprend les amphores produites dans la péninsule italique avec les amphores gréco-italiques, les amphores de Brindisi, les Dressel I, Lamboglia II, Dressel 6A et Dressel 2-4. Le chapitre 4 est dédié aux amphores de Bétique : Dressel 8, Dressel 7 et assimilées ainsi que les amphores Tejarillo, et le chapitre 5 regroupe les amphores tardives de Lusitanie (Portugal). Le chapitre 6 est quant à lui consacré aux amphores égéennes, le chapitre 7 aux amphores de Pamphylie, le chapitre 8 aux amphores levantines, le chapitre 9 aux amphores de Cilicie, le chapitre 10 aux amphores de mer Noire et le chapitre 11 aux formes indéterminées. Enfin, l’ouvrage se termine par une bibliographie, incluant près de 900 titres, constituant un outil précieux pour tout céramologue et archéologue effectuant des recherches sur le mobilier amphorique.

 

         Les premières études concernant les amphores conservées au Musée gréco-romain d’Alexandrie ont été menées par Jean-Yves Empereur, et présentées lors d’un colloque publié en 1998 sous le titre Les amphores complètes du Musée d’Alexandrie : importations et productions locales. Dans cet article, Jean-Yves l’Empereur expose les données statistiques concernant l’origine de 225 amphores complètes, et publie 18 dessins. Depuis cette publication, la collection du musée a augmenté en raison des nombreuses opérations archéologiques et fouilles préventives menées à Alexandrie, et il était donc primordial de mettre à jour les données. C’est ce que propose l’auteur, Ahmet Kaan Şenol qui, au cours de son étude, a étudié le mobilier provenant de 17 dépôts de fouilles afin d’actualiser les inventaires du musée. Désormais, le corpus est constitué de 580 amphores issues des fouilles réalisées à Alexandrie, et de 8 amphores provenant des fouilles maritimes menées sur la côte de la ville. Dans cet ouvrage, 457 individus complets sont présentés, les autres étant fragmentaires. Au sein du corpus, près de la moitié des exemplaires (cat. n°1-165 amphores locales, cat. n°166-457 amphores importées) sont des amphores égyptiennes, les autres individus provenant du pourtour méditerranéen.

 

         À travers cet ouvrage, l’auteur a cherché à souligner la grande variété de denrées agricoles importées à Alexandrie, en raison du pouvoir économique de la ville durant les premières années de l’époque hellénistique. Le musée comprend 210 amphores complètes provenant de centres majeurs de production tels que Rhodes, Cnide, Cos, Thasos et Lesbos en Mer Égée, ainsi que de Tripolitaine et Carthage en Afrique du Nord. Les amphores conservées au musée illustrent également les échanges dynamiques entre la péninsule italique et l’Égypte au cours de la période hellénistique. Les relations commerciales avec la Méditerranée orientale sont quant à elles démontrées grâce aux amphores de Chypre, Crète, Syrie du Nord et Levant.

 

         L’ouvrage offre un classement typologique qui s’appuie sur l’origine des amphores. L’auteur ne propose pas de nouvelle typologie : son classement conserve les classifications déjà existantes, proposées d’une part par Jean-Yves Empereur dans une typologie publiée en 1992, d’autre part par John Riley pour les amphores LR1 à LR8, présentées dans le mobilier de Carthage, ainsi que par Heinrich Dressel. Pour chaque catégorie, l’auteur propose une brève description générale de la production, précisant la forme, le contenu, l’origine et la distribution. Cette description est suivie d’un catalogue présentant chaque amphore conservée au musée, sous forme de fiches. Chaque fiche reprend les éléments suivants : numéro d’inventaire, dimensions, type de l’amphore, origine, datation, description de la forme et parallèles. Une description de la pâte figure également ; néanmoins, aucun prélèvement n’étant possible sur ces céramiques, la description pétrographique n’a pu se faire que d’après la surface et à l’aide d’une loupe à grossissement x20, utilisée sur les cassures. Les couleurs sont quant à elles décrites d’après le code Munsell. Chaque individu a été photographié et les exemplaires complets dessinés ; l’étude inclut également les dipinti et timbres amphoriques. Les illustrations sont de grande qualité, les photographies ont été systématiquement réalisées sur fond noir, généralement à la même échelle, ce qui rend la lecture aisée et permet de pouvoir comparer les individus entre eux. Nous pouvons également apprécier les photographies de détail, que ce soit des marques observables sur la surface, des timbres pour lesquels une photographie du relevé sur papier à cigarette est également proposée, ou encore des dipinti.

 

         Pour conclure, cette publication constitue un bel outil de travail pour tout céramologue s’intéressant aux amphores antiques. Tandis que les catalogues de musée font souvent l’impasse sur les céramiques, cet ouvrage ouvre les portes du Musée gréco-romain d’Alexandrie et présente l’intégralité des amphores complètes conservées, rendant ainsi le mobilier accessible au public. Il demeure regrettable que, parmi les 457 amphores présentées, seules 49 disposent d’une provenance, en raison de leur découverte ancienne. En effet, rares sont les amphores qui ont rejoint les collections du musée avec leur contexte de découverte et d’autres ont malheureusement perdu leur numéro d’inventaire au fil du temps. Un effort de récolement a été effectué, en comparant les amphores de la collection du musée aux céramiques présentées dans les Rapports du Musée gréco-romain (1892-1924), mais également dans Le Musée gréco-romain (1925-1932), dans les Annuaires du Musée gréco-romain (pour les années 1933-1950) ainsi que dans le Bulletin de la Société Archéologique, afin de retrouver leur origine. D’après l’historique des fouilles, il semblerait que la majeure partie des amphores provienne des nécropoles d’Alexandrie. Parmi les contextes de découverte connus, nous pouvons également citer les nécropoles de Gabbari, de Chatby, de Hadra, de Kôm el-Chougafa ou encore le Sarapeum. Ainsi, en dépit des lacunes que l’on ne peut pas imputer à l’auteur, cette publication est un très bon catalogue qui permettra à tout céramologue de disposer de parallèles et d’accéder aux informations de la majorité des amphores complètes d’Alexandrie, en un seul et même ouvrage.