|
||
Compte rendu par Franck Wojan, Université de Rouen Nombre de mots : 2226 mots Publié en ligne le 2019-02-27 Citation: Histara les comptes rendus (ISSN 2100-0700). Lien: http://histara.sorbonne.fr/cr.php?cr=3497 Lien pour commander ce livre
Après la parution en 2011, dans la même collection, d’un volume intitulé Nomisma. La circulation monétaire dans le monde grec antique (BCH – supplément, 53), la numismatique est à nouveau à l’honneur dans les publications de l’École française d’Athènes. Ce – double – volume n° 57 des Suppléments du Bulletin de Correspondance hellénique (BCH) publie les Actes de la Sixième Rencontre scientifique des Amis du Musée numismatique d’Athènes, organisée à Argos du 26 au 29 mai 2011. Ce colloque international avait été organisé à la fois pour faire un bilan des connaissances sur la monnaie dans le Péloponnèse et pour rendre hommage au numismate belge Tony Hackens, disparu en 1997. Entre temps, le décès en 2015 de Mando Oikonomidou, directrice honoraire du Musée numismatique d’Athènes et auteure de la Préface, a été l’occasion pour les éditeurs d’associer ces deux grands savants, que le Péloponnèse avait scientifiquement réunis. Chacun d’eux fait l’objet d’une nécrologie dans les premières pages du tome I.
Six ans après la tenue de la Rencontre scientifique, et au terme d’un suspense intenable autant pour les auteurs (!) que pour les lecteurs potentiels, l’École française d’Athènes propose, dans un beau volume double de facture soignée, pas moins de 51 articles, 37 dans le tome I (528 pages) et 14 dans le tome II (288 pages). L’arc chronologique s’étend de l’Antiquité (37 articles) à l’époque moderne (1 article) en passant par le Moyen Âge byzantin (12 articles) ; un autre article englobe ces deux dernières périodes à la fois. Traditionnellement publiées par la seule revue Ὀβολός, ces Rencontres scientifiques ont visiblement, vu leur ampleur, nécessité des partenariats.
Entièrement consacrée au Péloponnèse, région située au cœur du monde grec antique et, dans une moindre mesure, du monde byzantin, cette publication montre – s’il fallait encore le prouver – la vitalité de la recherche numismatique et les perspectives nouvelles qui se dévoilent au gré des pages. Avec des articles qui associent des numismates, des archéologues, des historiens et des historiens de l’art, on comprend très vite que la numismatique n’est plus – comme on l’affirmait naguère – une discipline “auxiliaire” de l’Histoire, mais qu’elle est une science à part entière, nécessaire à la bonne compréhension des événements historiques autant que des phénomènes économiques, monétaires et financiers.
Faute de place dans les limites imparties à ce compte rendu (cf. l’ampleur de la table des matières ci-dessous), il m’a semblé préférable de proposer une présentation thématique des différents aspects abordés (les numéros en caractères gras renvoient aux articles cités dans la table des matières).
Le premier volume, riche d’articles souvent courts, est donc entièrement consacré à la période antique. Il débute par des synthèses générales qui couvrent successivement la période classique (2), hellénistique (3) et romaine (4). Quelques articles mettent l’accent sur un point particulier, qui ont en commun de concerner surtout la seconde moitié du IIe siècle avant J.-C. (29) et le Ier siècle avant J.-C. : l’époque syllanienne (30) et le passage “de la drachme au denier” à travers l’inscription fameuse de l’ὀκτώβολος εἰσφορά (31). Un article original s’intéresse au lien entre la monnaie et les sanctuaires (7), particulièrement nombreux dans le Péloponnèse.
De toutes les régions qui composent le Péloponnèse antique, l’Argolide (1, 8, 9 et 10) a été privilégiée, ainsi que, dans une moindre mesure, la Messénie (14, 33) et l’Arcadie (11 et 13), mais au détriment, si l’on peut dire, de la Laconie – région d’ailleurs longtemps rétive à la monnaie (32) –, de l’Élide (21) et de l’Achaïe (25). Si les îles situées au large du Péloponnèse (Céphalonie : 17 ; Égine : 20) n’ont pas été négligées, on notera l’absence étonnante de la Corinthie.
L’étude des trésors monétaires a été particulièrement mise à l’honneur (8, 9, 14, 18, 20, 23, 25, 26, 27, 28, 36 et 37). On sait que leur étude rigoureuse permet de faire progresser non seulement nos connaissances, mais aussi – et surtout – la datation de certains monnayages. D’ailleurs, certains d’entre eux sont revus ici à la lumière de recherches récentes (Arsinoé-Méthana : 10, Aléa : 11, Orchomène : 13, et Pylos : 33).
La circulation monétaire en général n’a pas été oubliée (1), avec un exemple local (l’île de Céphalonie : 17) mais les communicants ont surtout insisté sur les monnaies péloponnésiennes ayant circulé hors du Péloponnèse (époque romaine : 4, Macédoine : 8, Crète : 15 et 16, Gitana en Épire : 22).
L’iconographie monétaire a fait l’objet de diverses synthèses (mythes arcadiens : 12, Orchomène d’Arcadie : 13, le Zeus d’Olympie : 19, la déesse sans nom du koinon achaien : 24, Hermès à l’époque impériale : 34 et Apollon : 35).
Des réflexions plus techniques sur les ateliers monétaires péloponnésiens (6), certaines dénominations en bronze (21), le système monétaire éginétique (5), qui règne en maître dans la péninsule, ou le système attique (23), achèvent ce tour d’horizon consacré à la période antique.
Le second volume, avec des articles souvent plus développés mais moins nombreux, se consacre essentiellement au Moyen Âge byzantin (articles 38-39, puis 41-51), les époques moderne et contemporaine se retrouvant finalement réduite à la portion congrue (40 et accessoirement 47).
Chronologiquement, la fin de l’Antiquité et le haut Moyen Âge (avant l’an Mil) sont abordés en 38, 41, 42, 43, 44 et 45 ; le Moyen Âge central (c. an Mil-XVe siècle) en 39, 46, 48, 49, 50 et 51 ; le temps long (plusieurs siècles) en 40 (du XVIe s. à l’indépendance) et en 44 (de la fin de l’Antiquité à l’an Mil).
À la différence toutefois des thèmes abordés dans le volume précédent, les questions économiques, financières et fiscales à l’échelle régionale et/ou locale sont largement débattues (société et économique : 38, vie économique en Élide : 42, monnaie et fiscalité : 45, le prêt privé : 50).
La région d’Argos est une nouvelle fois mise à l’honneur (41, 44, 47, 48 et 49), avec un modeste déplacement en Élide (42 et 51) et en Arcadie (46). L’étude de la circulation monétaire est également à plusieurs reprises privilégiée (40 ; Argos : 41 et 48, Argolide : Acronauplie 47 et Limnes 49 ; Mouchli en Arcadie : 46). On notera pour finir que les articles font la part belle aux Byzantins et aux “Occidentaux”, mais laissent de côté les Ottomans (à l’exception notable du 40).
Ce double ouvrage, en se complétant mutuellement, offre une vue panoramique de la monnaie dans le Péloponnèse. Certes, il ne se veut nullement exhaustif, mais il révèle le large éventail des discussions, débats et autres découvertes sur une région – le Péloponnèse – et d’une science – la numismatique – à propos desquelles on s’imagine parfois que tout a été dit. Il faut donc être particulièrement reconnaissant à l’École française d’Athènes, au Musée numismatique d’Athènes et aux Amis du Musée numismatique d’avoir œuvré contre vents et marées pour assurer la publication de ce beau double volume.
Quatre regrets in fine : l’absence d’indices toujours utiles pour le chercheur pressé ; quelques illustrations bien sombres (mais, en matière de monnaie, cela est parfois inévitable) ; le délai – 7 ans – entre le colloque et la publication des Actes ; et savoir que cette publication est finalement incomplète, car d’autres articles devraient être publiés dans une prochaine livraison du Bulletin de Correspondance hellénique, donnant l’impression d’un éparpillement ou d’avoir des articles traités d’une manière à deux poids, deux mesures.
Table des matières
Afin de faciliter la recherche, j’ai donné les titres des communications en français, mais j’ai précisé entre crochets la langue de l’article si celle-ci était différente du français.
Tome I : Antiquité
1. François de CALLATAŸ, « Tony Hackens et l’humanisme scientifique : Argos et la circulation monétaire dans le Péloponnèse », p. 23-32.
2. Aliki MOUSTAKA, « La monnaie des Péloponnésiens. Remarques sur la production monétaire du Péloponnèse aux époques archaïque et classique », p. 33-42 [en grec].
3. Patrick MARCHETTI, « La monnaie dans le Péloponnèse de 336 à 146 avant J.-C. », p. 43-58.
4. Ioannis TOURATSOGLOU, « Production et circulation monétaire dans le Péloponnèse à l’époque romaine », p. 59-72 [en grec].
5. Véronique VAN DRIESSCHE, « À propos du système monétaire éginétique : mise en perspective des systèmes monétaires grecs », p. 73-84.
6. Christophe FLAMENT, « Les conditions de la production monétaire dans le Péloponnèse durant l’Antiquité : ateliers civiques ou ateliers “indépendants” ? », p. 85-95.
7. Alexandros ANDREOU et Panagiotis TSELEKAS, « Monnayage et sanctuaires grecs dans le Péloponnèse », p. 97-107 [en grec].
8. Christos GATZOLIS, « Argos en Macédoine. Un petit trésor en provenance de Pydna et contenant des monnaies en argent d’Argos et en bronze de Philippe II », p. 109-118 [en grec].
9. Stamatoula MAKRUPODI, Milia GIANNAKOULI, « Un trésor de la haute époque hellénistique à Argos », p. 119-131 [en grec].
10. Andrew MEADOWS, « Le monnayage d’Arsinoé-Méthana », p. 133-149 [en anglais].
11. Dimitrios A. KOUSOULAS, « Le monnayage d’Aléa (c. 400-146 avant J.-C.) », p. 151-158 [en anglais].
12. Dimitra I. TSANGARI, « Les monnaies arcadiennes, témoignages sur la mythologie locale », p. 159-166 [en grec].
13. Panagiotis GALANIS, « Contribution à la typologie et à l’iconographie des monnaies de l’antique Orchomène d’Arcadie », p. 167-185 [en anglais].
14. Eva APOSTOLOU, « Un trésor hellénistique de Messénie », p. 187-203 [en grec].
15. Maria SKORDOU, « Circulation de frappes péloponnésiennes en Crète occidentale », p. 205-216 [en grec].
16. Manolis I. STEPHANAKIS, « Du Péloponnèse à la Crète : circulation monétaire et influences iconographiques », p. 217-234 [en grec].
17. Helena BONELOU, Andreas SOTIRIOU, « La circulation monétaire à Céphalonie aux époques classique et hellénistique », p. 235-245 [en grec].
18. Mando OIKONOMIDOU, « Contribution à l’étude de la circulation des pégases. Le trésor monétaire de Céphalonie (IGCH 140) », p. 247-258 [en grec].
19. Lilian de ANGELO LAKY, « Les monnaies d’Olympie et l’établissement de l’iconographie de Zeus en Grèce classique », p. 259-268 [en anglais].
20. Hélène NICOLET-PIERRE, « La circulation des monnaies d’Égine à l’époque hellénistique et le trésor de Mageira (Élide) 1950 », p. 269-287.
21. Franck WOJAN, « Les “très grands bronzes” éléens. Réflexions autour d’un module singulier dans le monnayage éléen à l’époque hellénistique », p. 289-295.
22. Kalliopi BEKA-ALEXANDRI, Giannis STOGIAS, « Traces de contacts entre Gitana et le Péloponnèse : le témoignage des monnaies et des sceaux », p. 297-309 [en grec].
23. Panagiotis TSELEKAS, « Le trésor Ougri 1892 (IGCH 121). Monnaies de poids attique en or et en argent à la haute époque hellénistique dans le Péloponnèse », p. 311-324 [en grec].
24. Mairi GKIKAKI, « La déesse sans nom du koinon achaien », p. 325-334 [en anglais].
25. Andrea G. VORDOS, Giovanni GORINI, « Un petit trésor de bronzes d’Antigone Gonatas trouvé à Trapeza d’Aigion », p. 335-343 [en anglais].
26. Maria LAKAKIS, « Le trésor Dymè I », p. 345-377 [en grec].
27. Antonia NIKOLAKOPOULOU, « Trésor de monnaies de bronze provenant de Dymè », p. 379-389 [en grec].
28. Efterpi RALLI, « Deux trésors péloponnésiens et la datation des divisionnaires d’argent », p. 391-398 [en grec].
29. Charikleia PAPAGEORGIADOU, Sophia ZOUMBAKI, « Économie et frappe monétaire des cités du Péloponnèse au Ier siècle avant J.-C. : le facteur romain », p. 399-410 [en grec].
30. Pierre ASSENMAKER, « La frappe monétaire syllanienne dans le Péloponnèse durant la Première Guerre mithridatique. Retour sur les monnaies “luculliennes” », p. 411-424.
31. Charles DOYEN, « De la drachme au denier : retour sur l’ὀκτώβολος εἰσφορά de Messène », p. 425-443.
32. Stavros GIANNOPOULOS, « La production monétaire et l’évergétisme d’Euryklès en Laconie », p. 445-458 [en grec].
33. Théodoros KOUREMPANAS, « La production monétaire de Pylos sous l’Empire romain », p. 459-465 [en grec].
34. Christina TSAKALIA, « L’iconographie d’Hermès sur les monnaies péloponnésiennes d’époque impériale : Hermès au bélier sur les monnayages coloniaux de Corinthe et de Patras », p. 467-478 [en grec].
35. Maria Daniela TRIFIRÒ, « Apollon dans le Péloponnèse. Commentaires iconographiques », p. 479-488 [en grec].
36. Stavroula ROZAKI, Aphroditi MALTEZOU, Athanasios THEMOS, Eleni ZAVVOU, « Trésor monétaire provenant d’un monument funéraire de antique Akriai (Kokkinia Glykovrysis de Laconie). Une première approche », p. 489-502 [en grec].
37. Maria TSOULI, Aristeidis PAPAGIANNIS, « Trésor monétaire de l’Antiquité tardive trouvé à Karavostasi d’Oitylon de Laconie et le séisme du 21 juillet 365 après J.-C. », p. 503-522 [en grec].
Tome II : périodes byzantine et moderne
N.B : la numérotation des pages recommence à 1.
38. Vasiliki PENNA, « Société et économie dans le Péloponnèse à l’époque byzantine (Ve-XIIe siècles) », p. 17-62 [en grec].
39. Julian BAKER, Mina GALANI-KRIKOU, « Moyen Âge occidental dans le Péloponnèse », p. 63-90 [en grec].
40. Panagiotis KOKKAS, « Circulation monétaire dans le Péloponnèse à l’époque moderne », p. 91-107 [en grec].
41. Vangelis MALADAKIS, « Argos à l’époque protobyzantine. Le témoignage des monnaies provenant des fouilles du Gymnase national », p. 109-132 [en grec].
42. Hanna I. LAMBOPOULOU, « Aspects de la vie économique des habitants de l’Élide (fin VIe-début IXe siècles après J.-C.) : l’apport de la recherche archéologique », p. 133-155 [en grec].
43. Ioanna KOLTSIDA-MAKRI, « Le témoignage de la sigillographie dans le Péloponnèse à l’époque des âges obscurs : une première approche », p. 157-168 [en grec].
44. Panagiotis GIANNOPOULOS, « Argos mésobyzantine : évidences historiques et circulation monétaire », p. 169-179 [en grec].
45. Maria GEROLUMATOU, « Monnaie et fiscalité dans le Péloponnèse durant la période médiobyzantine », p. 181-192 [en grec].
46. Konstantinos LAGOS, Photios KARUANOS, « Mouchli : données économiques et circulation monétaire au cours de la période tardobyzantine », p. 193-202 [en grec].
47. Mina GALANI-KRIKOU, « Acronauplie : témoignages numismatiques de la présence byzantine et “occidentale” », p. 203-223 [en grec].
48. Angeliki KOSSUBA, « Argos médiévale : le témoignage de deux trésors monétaires », p. 225-237 [en grec].
49. Julian BAKER, Georgios TSEKES, « Monnaies médiévales de la région de Limnes en Argolide », p. 239-248 [en anglais].
50. Konstantina D. PAPAKOSMA, « Amoris et dilectionis causa, pro prode et/ou loco pignoris. Le prêt privé dans le Péloponnèse à l’époque de l’occupation latine (XIIIe-XVe siècles) », p. 249-261 [en grec].
51. Dimitris ATHANASOULIS, « Bulle de plomb des Hospitaliers trouvée au château de Chloumoutzi (Clermont) », p. 263-279 [en grec].
|
||
Éditeurs : Lorenz E. Baumer, Université de Genève ; Jan Blanc, Université de Genève ; Christian Heck, Université Lille III ; François Queyrel, École pratique des Hautes Études, Paris |