|
||
Reseña de Catherine Dousteyssier-Khoze, Durham University Número de palabras : 1199 palabras Publicado en línea el 2009-07-20 Citación: Reseñas HISTARA. Enlace: http://histara.sorbonne.fr/cr.php?cr=476 Enlace para pedir este libro Il s’agit là d’un ouvrage
monumental, à tous les sens du mot, les huit kilos de papier venant à leur
façon refléter les dimensions titanesques du cirque. Edité par Noel Daniel avec
des notes et légendes de Dominique Jando, Linda Granfield et la collaboration,
sur le plan historique, de Fred Dahlinger Jr., The Circus est un livre trilingue (anglais, allemand, français) qui
retrace et documente l’histoire du cirque américain depuis son expansion à la
fin du XIXe siècle jusqu’à son déclin dans les années 1950.
Il est le
fruit d’une vaste enquête de Noel Daniel qui, pendant plus de deux ans, a
sillonné les Etats-Unis à la recherche d’archives sur le cirque. Pour elle,
l’avènement du cirque coïncide avec la naissance de la culture populaire
américaine. Elle décrit la mise en place d’une formidable machine à divertir
qui annonce les techniques modernes de l’industrie du grand spectacle :
« Le cirque était à la fois le Super Bowl, les Jeux Olympiques et le
dernier film à grand succès d’Hollywood (p. 15) ». Sur les 30 000
images rassemblées, elle en retient 900 dans ce livre, qu’il s’agisse de photos
inédites, de posters et affiches de / sur le cirque. C’est le grand attrait du
livre, véritable spectacle, ultime régal visuel. On ne peut que louer l’immense
variété et la très grande qualité de l’appareil iconographique, des
photographies de Frederick Whitman Glasier ou Edward Kelty aux posters des lithographes Strobridge. L’une des photos qui représente peut-être le mieux l’essence
chaotique et le gigantisme du cirque à son apogée occupe une double page (p.
170-171) : « Ringling Brothers and Barnum & Bailey, Madison
Square Garden, NY City, 1931 ». Le livre est
divisé en huit chapitres. Le chapitre 1, « Les origines mondiales du
cirque » (Dominique Jando), propose un bref historique du cirque, à
commencer par les premières représentations d’acrobates et jongleurs en Egypte
(3000 ans avant J.C.), puis en Grèce, dans l’Empire romain ou encore en Chine. A
partir du Moyen Age, les artistes itinérants (acrobates, jongleurs et montreurs
d’animaux) bénéficient d’une reconnaissance professionnelle en se produisant
lors d’immenses foires, d’Europe en Asie. Cependant, le cirque moderne n’apparaît
véritablement qu’au XVIIIe siècle, souligne Jando, grâce aux
voltigeurs à cheval anglais (premier cirque fondé par Philip Astley dans
les années 1770). Le même Astley établit le premier cirque français sur le
boulevard du Temple avant de laisser la place à la célèbre famille d’écuyers
italiens Franconi, qui régna sur le monde du cirque parisien à travers tout le
XIXe siècle (voir notamment la très belle gravure du dompteur de
fauve Henri Martin, p. 102). Le cirque américain, auquel l’essentiel des chapitres
suivants seront consacrés, fit quant à lui sa première apparition en 1793 à
Philadelphie. Les multiples illustrations offrent de précieux aperçus sur
l’évolution du cirque à travers les âges et les continents. Dans le chapitre
2, « Les merveilles du monde vous attendent », Dominique Jando
souligne le rôle unique du cirque comme spectacle vivant avant l’avènement des
médias modernes du XXe siècle. Fortement influencé par les
techniques commerciales de Barnum, le cirque américain est présenté comme un
spectacle sain qui peut distraire, voire instruire, toute la famille. En
associant la ménagerie et les multiples parades et défilés aux jongleurs,
clowns et acrobates, le cirque américain, qui connaît son âge d’or à l’époque
victorienne, cherche avant tout à s’ouvrir sur l’exotisme. Les sideshows ou « galeries des
phénomènes » popularisés par Barnum présentaient de multiples
« sauvages » issus de tribus africaines ou asiatiques qui
renforçaient la dimension mystérieuse et onirique du cirque. L’Ouest américain occupe
également une place privilégiée dans l’imaginaire du cirque. Les nombreuses
affiches et photographies reproduites dans ce chapitre font état de cette quête
effrénée d’« exotisme » (cf. à titre d’exemple l’affiche de Ringling
Bros and Barnum & Bailey, vantant sa tribu d’« authentiques sauvages
Ubangis » issus de « l’Afrique la plus sombre et profonde », p.
179). Le chapitre 3,
« Vénus de l’époque : l’émancipation de la femme artiste » (Dominique
Jando), met l’accent sur le rôle clé de la femme dans le monde du cirque. Outre
ses prouesses techniques en tant qu’acrobate, écuyère, jongleuse ou encore
dresseuse, la femme apporte une dose de sensualité et d’érotisme qui constitue
l’un des attraits implicites du cirque. Mais, respectées pour leurs qualités
professionnelles, les artistes féminines de cirque sont source d’inspiration et
ouvrent la voie à l’émancipation de la femme. Le chapitre 4,
intitulé « Des bêtes étranges venues de pays lointains » (Dominique
Jando), met en évidence la place qu’occupent fauves et éléphants dans
l’imaginaire du public — le célèbre Jumbo, exhibé à Paris en 1861 et racheté en
1882 par Barnum, devint « la plus grande attraction que le cirque [eût]
jamais connue » (p. 302-303). La variété des animaux ne cessa de
s’accroître au cours du XIXe siècle : Jando cite l’exemple du
cerf Coco dressé par les Franconi au Cirque Olympique de Paris au début des
années 1810, dont une gravure est d’ailleurs montrée au chapitre 1 (p. 118).
L’expansion des empires coloniaux européens, suivie par de nombreuses explorations,
ne fit que renforcer la fascination du public pour les animaux exotiques et
sauvages et donna naissance à un véritable commerce. Certains dompteurs
devinrent des stars internationales, à l’instar de Van Amburgh qui affronta un
tigre du Bengale lors d’une représentation en 1833. Et lorsque le visionnaire Barnum
décida de mettre le cirque sur les rails en 1872, tout un zoo itinérant fut
créé. Le chapitre 5
porte un titre qui pourrait fort bien s’appliquer à l’ouvrage lui-même : « Les
numéros de cirque : un chaos organisé pour le plaisir des sens ».
Dominique Jando évoque dans ce chapitre l’atmosphère de frénésie et magie qui
caractérise le cirque (et notamment les tours de force de certains acrobates et
voltigeurs). Dans le chapitre
6, « Cracheurs de feu et lanceurs de couteaux : les monstres et
merveilles des attractions du sideshow »,
Linda Granfield explore les « galeries de phénomènes » rendues
célèbres par Barnum. Ces sideshows,
qui fonctionnent parallèlement aux représentations, sont composés de trois
éléments : des nouveaux numéros relevant du surhumain, de l’exotique ou de
l’extraordinaire ; des créatures empaillées ou conservées dans des bocaux
et, enfin, des monstres ou phénomènes humains (p. 453). C’est ainsi tout un
monde étrange, effrayant et mystérieux que découvre le public durant l’âge d’or
du cirque itinérant américain (voir en particulier la double photographie du
« Congrès des monstres » du Ringling Brothers and Barnum and Bailey
Combined Circus, p. 464-465). Le chapitre 7,
« La ville sous la tente : les coulisses du cirque » (Linda
Granfield) évoque à travers de multiples photographies les dessous du cirque,
le montage du ou des chapiteaux et la vie quotidienne des artistes itinérants.
Enfin, le chapitre 8, « Les casse-cou : risquer le tout pour le tout
pour le public » (Dominique Jando) souligne l’essence même du cirque, qui
joue avec les limites humaines, et conclut
en rappelant que, bien avant les émissions de télé-réalité, « le cirque
présenta des cascades périlleuses et spectaculaires à une échelle sans
précédent » (p. 615). On peut noter
certaines redondances d’un chapitre à l’autre ainsi qu’une absence parfois
gênante de liens entre iconographie et texte (voir l’exemple, cité ci-dessus,
du cerf dressé par les Franconi, mentionné dans le chapitre 4, mais sans
qu’aucune mention ne soit faite de la gravure du chapitre 1) et une approche
chronologique aurait sans doute donné une plus grande cohérence au matériel
présenté. On aimerait aussi en savoir davantage sur la réception du cirque et
son influence sur la culture de son temps (ses liens avec les autres arts du
spectacle, notamment la pantomime ; son influence sur le roman au XIXe
siècle). Rappelons cependant que l’ouvrage, en dépit de sa taille, n’a aucune
prétention à l’exhaustivité. Et malgré ces réserves mineures, on ne peut
qu’être fasciné par ce livre extraordinaire, trilingue et multicolore : The Circus is the « Greatest Show on
Earth ». |
||
Editores: Lorenz E. Baumer, Université de Genève ; Jan Blanc, Université de Genève ; Christian Heck, Université Lille III ; François Queyrel, École pratique des Hautes Études, Paris |