Schicht, Patrick: Die Festung Hohensalzburg. Der Führer zu Geschichte und Architektur. 114 S., zahlreiche Farbabb. im Text, 22 x 14 cm, broschiert. ISBN 978-3-901232-88-6. 12,50 €
(Phoibos Verlag, Wien 2007)
 
Compte rendu par Alain Salamagne, Université de Tours
 
Nombre de mots : 1075 mots
Publié en ligne le 2009-03-18
Citation: Histara les comptes rendus (ISSN 2100-0700).
Lien: http://histara.sorbonne.fr/cr.php?cr=561
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La ville de Salzbourg est encore de nos jours surplombée par son château-forteresse élevé sur un éperon rocheux culminant à 550 m d’altitude ; entouré de marais jusqu’au Moyen Age, il occupait un site stratégique qui dominait un réseau important de voies de communication.

Dans une première partie (de soixante pages), l’auteur s’attache à retracer son historique depuis l’époque carolingienne jusqu’aux fortifications de l’âge moderne et classique qui, dans le contexte de l’apparition de l’artillerie ou du conflit européen de la guerre de Trente Ans, ajoutèrent au noyau primitif une ceinture de boulevards et de bastions. La seconde partie (de cinquante pages) est consacrée à la description des édifices, description opérée de l’extérieur du château vers l’intérieur, ce qui répond à la finalité de l’ouvrage - d’abord un guide de visite - mais gêne incontestablement la compréhension d’ensemble, à défaut d’une identification précise sur les plans des édifices ou des salles. Le parti adopté amène aussi l’auteur à faire des allers-retours constants avec l’historique ou le contraint à des répétitions inutiles.

 

L’oppidum celte qui s’implanta d’abord sur cette éminence naturelle fut abandonné à l’époque romaine au profit d’une nouvelle cité qui se développa à ses pieds ; les invasions germaniques du second siècle après J-C. entraînèrent au Bas-Empire la remilitarisation du site. Sur la partie supérieure du plateau fut alors fondée une résidence (castrum superioris) - avec en contrebas une église dédicacée à Saint-Martin (à l’emplacement de l’actuelle terrasse Nonnberg) -, puis, sous la dynastie des Agilofinger au VIIIe siècle, un couvent de moniales. L’élévation en 715 de Salzbourg au rang d’archevêché et de siège métropolitain de la Bavière donna un nouvel essor à son développement.

 

L’archevêque Gebhard von Helfenstein (1060-1085) fit construire ou reconstruire en 1077, afin de contrôler les passages des Alpes, un certain nombre de châteaux dont ceux du Hohenwerfen, de Friesach et Pettau et du Hohensalzbourg. Mais de ce dernier, probablement élevé en bois, aucun reste n’a été conservé, si ce n’est une partie des murs de la chapelle. L’archevêque Konrad Ier (1106-1147), qui initia à partir de 1121 une politique de fondations et de reconstructions, pérennisa les fonctions résidentielles du castrum : la partie la plus élevée du plateau fut circonscrite d’une muraille crénelée juchée sur l’arête rocheuse, à l’aplomb de laquelle se trouvait la chapelle agrandie dont de nombreux fragments de peinture murale sont encore visibles. Dans la cour s’élevait une tour maîtresse (« der Hohe Stock »), dont l’accès se faisait par une avant-cour, abritant à l’étage la grande salle dont les murs étaient percés de fenêtres à arcades à décor polychrome. Le château devint alors un édifice symbolique du pouvoir de l’archevêque sur la cité, lieu de représentation de la haute noblesse, alors que la résidence épiscopale dans la ville basse servait à des fins religieuses ou de résidence ordinaire.

 

Sous Eberhard de Brixen (1200-1246) un bâtiment perpendiculaire fut ajouté à la tour et subdivisé en trois pièces d’habitation probablement surmontées à l’étage d’une autre salle ; dans une seconde phase un bâtiment résidentiel (doté d’une fosse d’aisance) fut ajouté à l’emplacement de l’avant-cour qui donna à la tour maîtresse des dimensions voisines de 22 x 33 m. Des aménagements de la fin du XVe siècle transformèrent les niveaux supérieurs : la grande salle dorée (« die Ritterstuben ») conserve encore son lambrissage d’origine (1501), tant sur ses parois murales qu’au plafond (où il est accroché par un système porteur à la charpente), ses panneaux richement décorés comme dans la chambre dorée (« Goldene Stube ») avec son poêle de carreaux de faïence ; une bibliothèque (1504), ou un oratoire dédié à Saint-Georges (1501) achevaient de faire de ces appartements une suite tout à fait caractéristique de la demeure aristocratique des années 1500.

 

C’est à Burghard von Weisspriach (1461-1466) que l’on doit l’adaptation de la forteresse à l’artillerie à feu, avec la construction d’un ouvrage avancé aux murs épais de plus de 3 m devant la Rosspforte, de 4 tours (1465) au rez-de-chaussée ouvert mais au niveau supérieur fermé. Le cardinal Bernhard von Rohr (1466-1481), dans le contexte du conflit qui l’opposait à l’empereur, la fit encore renforcer en 1479. Mais c’est à Johan III Beckenschlager (1481-1489) que l’on doit la rénovation des bâtiments de service (construction de l’arsenal avec au niveau inférieur sa salle à deux nefs) et résidentiels, et à l’archevêque Leonhard von Keutschach (1496-97) la construction du « donjon », enceinte flanquée de deux tours qui à l’intérieur même du château vint renforcer la protection de la tour maîtresse. Sous l’archevêque Matthäus Lang von Wellenburg (1519-1540), les travaux se continuèrent avec la construction en 1526 de nouvelles tours d’artillerie (« Nonnbergbastei »). Enfin une dernière campagne de modernisation fut entreprise entre 1633 et 1681, et d’abord dans le cadre de la Guerre de Trente Ans, dans le même temps où la vieille ville était également ceinturée de fortifications bastionnées. Au château la construction d’ouvrages comme le « Hasengrabenbastei » ou le « Feuerbastei » répondait à la nécessité de ménager des plates-formes de tir pour armes lourdes afin de contrebattre celles que les assaillants pouvaient installer sur les hauteurs voisines.

 

Le château du Haut Salzbourg résume donc parfaitement l’évolution de bien des sites : château de bois puis de pierre, château-fort de la fin du Moyen Âge et du début de l’époque moderne, puis forteresse de l’âge baroque dans le second quart du XVIIe siècle, avant de devenir au XIXe siècle une caserne autrichienne. Dans le même temps où l’on renforçait les capacités militaires de la place ou encore ses possibilités de faire face à un siège (construction par exemple d’un arsenal, d’une citerne de récupération des eaux de pluie en 1502, d’un monte-charge avant 1515, d’étables en 1566, etc.), l’attention accordée au décor attestait qu’on entendait conserver au château devenu forteresse ses caractères de résidence aristocratique pour la haute noblesse.

 

La seconde partie de l’ouvrage aurait mérité d’être développée pour mieux faire apparaître justement ces deux aspects fondamentaux du château, la forteresse symbolique du pouvoir temporel de l’archevêque sur la cité et son territoire, la résidence comme lieu de représentation ; on a noté en particulier la création vers 1500 d’une suite résidentielle complexe (avec la grande-salle et la chambre dorée) au décor soigné, qu’on aurait souhaité voir replacer dans un contexte plus large (on s’étonne de ne pas voir référencés les travaux de Stephan Hoppe).

Il reste que l’ouvrage constitue une bonne introduction à la visite d’un monument d’un grand intérêt architectural, situé dans un paysage admirable, et on peut espérer qu’une édition postérieure puisse combler les quelques défauts relevés.