| AA.VV.: (Macias, J.M. - Fiz, I. - Piñol, Ll. - Miró, M.T. - Guitart, J.), Planimetria arqueològica de Tarràco (Documenta, 5), 2 vol : 273 p./30 cm + 26 p., 29 cm ; 46 plànols ; ISBN 9788493469849. (Institut català d’arqueologia clàssica, Tarragona 2007)
| Compte rendu par Cécile Dufau, Inventaire du patrimoine, Pau Nombre de mots : 1211 mots Publié en ligne le 2011-11-14 Citation: Histara les comptes rendus (ISSN 2100-0700). Lien: http://histara.sorbonne.fr/cr.php?cr=693
Cet ouvrage, portant sur la ville antique de Tarragone,
est le fruit d’une démarche globale mettant en perspective les résultats
scientifiques obtenus à partir de fouilles archéologiques passées ou présentes,
leurs possibles incidences sur le projet urbain et les actions de recherche et
de valorisation qui peuvent en être dégagées. L’ouvrage se présente comme un
outil de recherche, tant par une présentation détaillée de la méthodologie dont
il est issu, que par les diagnostics, écrit et visuel, qu’il dresse sur la
ville de Tarragone, sa morphogénèse, ses aménagements et ses équipements. Les
auteurs ciblent dès le départ les limites de cette publication : le
renouvellement perpétuel des données fait que ce point d’étape et de
présentation ne peut être exhaustif.
L’ouvrage est publié par l’Institut Catalan d’Archéologie
Classique. Il est rédigé en catalan et est totalement accessible aux
hispanophones. Il compte un volume de texte (276 pages), présentant la
démarche, les outils (base de données, cartographie historique), l’étude de
développement urbain et les restitutions possibles, les fiches recensant les
vestiges découverts, une bibliographie et des index. Il convient de noter que seule
une trentaine de pages présentent l’outil et les premières pistes de
recherche ; celles-ci sont traduites en anglais à la fin de l’ouvrage. 150
pages environ sont réservées aux fiches des vestiges et à leurs références
cadastrales. Une trentaine de pages est consacrée à la bibliographie. Un index
thématique et un index planimétrique viennent aider à la consultation des deux
volumes. L’ouvrage compte également un volume de 23 plans détachés en couleurs
qui, à différentes échelles (1/5000 ; 1/1250 ; 1/1500), retrace la
chronologie du développement urbain et la planimétrie des vestiges rencontrés
par quartiers, sans omettre les hypothèses de restitution attachées.
Le constat à l’origine de la démarche est simple :
Tarragone ou Tarraco, ville romaine
capitale de la province de Tarraconnaise, est une ville qui, sous la pression
foncière actuelle, continue de livrer des vestiges de son passé classique,
ibère, romain, wisigoth. La création du Système d’Information Archéologique
présenté a pour vocation de rassembler les informations archéologiques issues
de fouilles passées, présentes et futures dans une même base de données, en
rattachant ces vestiges à la parcelle cadastrale concernée. A terme, le SIA
pourra être consulté, via internet ou intranet, par tous les acteurs du projet
urbain intéressés. Des conventions de représentations graphiques ont été mises
en place, en parallèle avec l’établissement de fiches normalisées. Les quelques
800 fiches accompagnant la présentation de la démarche et les nouvelles pistes d’étude
sont classées par adresse et comptent trois champs. Le premier, définition,
sert à nommer le type de vestige et le repérer sur les plans. Le deuxième est
réservé à la documentation et bibliographie. Le dernier champ est descriptif et
sert tant à préciser le contexte de découverte des vestiges que leur
description plus ou moins succincte, suivant leur nature. Leur est associée,
quand c’est possible, une chronologie de construction et d’occupation. Une
trentaine de photos et relevés viennent illustrer ce catalogue.
Tout en vectorisant les données indispensables de la
planimétrie des XIXe et XXe siècles, force a été de
reconnaître que les prouesses des techniques de topographie actuelles et les
corrections qu’elles ont pu apporter rendent l’outil d’autant plus performant.
En découlent une cartographie et une restitution de la topographie antique de
la ville de Tarraco : naissance
de la ville, adaptation topographique, fortifications, réseaux de
communication, monuments publics, topographie funéraire, habitat font l’objet
d’un géoréférencement, avec en corollaire les hypothèses de développement qui
leur sont associées. L’outil a permis de grandement préciser ces hypothèses
comme par exemple, l’implantation exacte de monuments publics importants :
muraille romaine, nécropole paléochrétienne, théâtre romain ou basilique
wisigothique. En outre, la cartographie des vestiges permet également de saisir
les logiques, voire les modules ayant orienté la répartition de ces monuments
et leur implantation dans un réseau : distribution des voies, modules des insulae… Sont également traitées, dans
cette analyse spatiale, la relation entre la ville, les terres cultivées et le
port, la répercussion sur la mise en place du parcellaire et son adaptation
orographique. Les évolutions entre la ville tardorépublicaine et la ville
impériale sont repérées à la faveur des cardo
et decumanus correspondants,
liées à un glissement des aires résidentielles.
Des lacunes sont signalées dans cette recherche par les
auteurs. Par exemple, les formes et situations de l’occupation ibère sont
toujours sujettes à controverse, étant donné le déséquilibre entre la zone de
peuplement qui lui est généralement attribué et le peu de vestiges
archéologiques avérés. S’il existe un doute raisonnable, le peuplement ayant pu
disparaître, détruit par la Tarragone tardorépublicaine, il ne permet pas de
trancher sur d’autres hypothèses, entre autres celle d’un déplacement du
peuplement depuis les environs de Tarragone. Le niveau d’équipements urbains
(ressources en eau et système d’évacuation) apparaît comme amplement documenté.
Il apparaît que les ressources en eau de la ville sont naturellement
importantes et que les méthodes d’approvisionnement ont rapidement été
adaptées, dès le VIe siècle avant Jésus-Christ. Les puits sont
plutôt concentrés en partie basse de la ville, au plus près des nappes
phréatiques. Leur chronologie, comme celle des citernes, ne peut souvent être
précisée, ces structures ayant continuellement été remployées. De même, il a
été difficile de déterminer à quels usages ils étaient précisément liés,
artisanal ou domestique, tout en privilégiant l’hypothèse d’une utilisation
ancrée dans le quotidien. Le nombre relatif de citernes de la partie haute de
la ville, qui se multiplient à l’époque tardorépublicaine, est liée aux espaces
religieux qui y étaient implantés, mais illustre également l’éloignement des
sources naturelles. Aqueducs et château d’eau, implantés sur la montagne,
assuraient l’arrivée depuis l’extérieur de la ville. En guise de conclusion,
les auteurs reviennent sur la forma
tarraconensis et soulignent comment l’actualisation des données
cartographiques a, en outre, l’intérêt de permettre une meilleure visualisation
des différents vestiges recensés, et partant la reconnaissance des patrons
topographiques qui régirent la planification de la ville. Sont ainsi analysés
plus en détail la partie haute de la ville et son développement, le métrage qui
y a présidé ainsi que la schématisation géométrique de son développement
ultérieur.
L’ouvrage recense un volume important de données
historiques, archéologiques et cartographiques. La constitution et
l’exploitation de la base de données en question, le Système d’Information
Archéologique de Tarragone, ne peuvent qu’améliorer la compréhension du développement
urbain à une telle échelle et avec une telle masse d’informations, qu’elles
soient archéologiques, historiques ou topographiques. La publication de ce type
d’outil, pourtant indispensable pour qui veut travailler sur le développement
de la ville, ne peut faire oublier que la consultation seule de l’outil SIA ne
peut faire avancer les recherches. Le rendu cartographique de l’ouvrage, la
présence des fiches sur les vestiges recensés ou l’émission de nouvelles
hypothèses de recherches portant sur le développement de Tarragone durant
l’Antiquité et le Haut Moyen Âge aident à une compréhension synthétique et
rapide du processus d’adaptation à la topographie et de l’expansion urbaine.
Cet ouvrage ne peut se substituer à la publication des monographies des
vestiges concernés ou d’une réelle synthèse des données et illustre bien la
difficulté qu’il y a à publier des outils certes performants mais destinés à
rester des médias dans le rassemblement des données et l’élaboration de la
recherche scientifique. L’inventaire des données par le biais du SIA est à
l’origine de grandes avancées, le géoréférencement permettant autant la mise en
réseau des découvertes archéologiques qu’un rendu graphique immédiat de très
grande qualité. Cette publication reste une étape sur le temps de l’analyse du
développement urbain de Tarragone, études et publications qui s’annoncent
pourtant aussi nécessaires que passionnantes, au vu des nouvelles pistes
d’études annoncées dans l’ouvrage, tant sur l’architecture ou l’histoire que sur
l’essor urbain de Tarragone durant l’Antiquité. L’ouvrage, par la présence des
plans, offre un support d’analyse comparative indispensable pour tout chercheur
travaillant sur la construction et l’expansion des villes antiques. La démarche
est on ne peut plus intéressante et pourrait être adaptée à toute étude urbaine
quelle qu’en soit la chronologie.
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