Nicoloso, Paolo: Mussolini architetto. Propaganda e paesaggio urbano nell’Italia fascista, XXXIV-315 p., 80 ill., 14 x 22 cm, ISBN: 9788806190866, 32 euros
(Turin, Einaudi 2008)
 
Reseña de Antonio Brucculeri, Ecole nationale supérieure d’architecture et de paysage de Bordeaux
 
Número de palabras : 2854 palabras
Publicado en línea el 2010-03-29
Citación: Reseñas HISTARA. Enlace: http://histara.sorbonne.fr/cr.php?cr=756
 
 


          “Nella prima metà del Novecento nessuno Stato ha investito politicamente nell’architettura pubblica come l’Italia fascista”. Cette affirmation qui ouvre l’introduction de l’ouvrage de Paolo Nicoloso, résume les raisons de cette publication qui aborde le thème de la légitimation de l’idéologie politique dans le cadre exemplaire de l’Italie des années 1922-1943, à travers une analyse ponctuelle de la politique architecturale du chef du fascisme.

 

          Après avoir consacré une importante étude au milieu pédagogique et professionnel des architectes italiens à l’heure du régime fasciste (Gli architetti di Mussolini. Scuole e sindacato, architetti e massoni, professori e politici negli anni del regime, Franco Angeli : Milan 1999), Nicoloso relance son enquête à partir de l’intervention du Duce lui-même dans le domaine de l’architecture : sous l’impulsion de Mussolini, de nombreux projets à l’échelle architecturale et urbaine façonnent l’image du pouvoir dans l’Italie fasciste tout en essayant d’en modeler la société.

 

          Le travail de Nicoloso s’inscrit dans le cadre de contributions récentes qui ont abordé l’aspect de la propagande et de l’expression du politique par l’architecture du « ventennio », notamment au travers du cas exemplaire de la capitale (Border W. Painter, Mussolini’s Rome. Rebuilding the Eternal City, Palgrave MacMillan : New York 2005 ; Emilio Gentile, Fascismo di pietra, Laterza : Rome-Bari 2007). L’auteur réussit avec succès dans son objectif de relier pleinement deux champs d’enquête, l’histoire politique et l’histoire architecturale et urbaine, dont il constate jusqu’à ces dernières années l’absence de croisements explicites dans l’historiographie sur le fascisme et sur l’architecture et la ville à l’époque du fascisme depuis les travaux fondateurs de Renzo De Felice et de Giorgio Ciucci. Dès l’introduction, Nicoloso annonce sa thèse historiographique : sans néanmoins échapper aux contradictions, Mussolini a eu une véritable stratégie pour l’architecture, celle-ci a évolué au fil des années du régime et a fini par occuper une place de choix dans l’action politique du Duce lors de la transformation totalitaire du régime.

 

          Cette thèse est savamment développée au fil des pages du livre. L’ouvrage fait progressivement découvrir au lecteur l’intervention du Duce, à la fois visible et invisible, dans le domaine de l’architecture et décompose cette intervention dans les multiples facettes à travers lesquelles Mussolini s’empare de l’architecture comme outil de propagande et de gouvernement.

 

          Deux phases sont ainsi repérées par l’auteur : d’abord celle de la légitimation du pouvoir, surtout depuis les débuts du régime, en 1922, jusqu’au milieu des années 1930 ; ensuite, celle de l’éducation des masses parallèlement à la conquête d’une plus forte stabilité par le régime. Ce double temps de la politique de Mussolini par l’architecture est bien lisible dans le plan de l’ouvrage, articulé en sept chapitres, suivis d’un épilogue : I. I viaggi tra le architetture, II. La Roma mussoliniana, III. A Palazzo Venezia, IV. Nei panni dell’architetto, V. Piacentini e Mussolini, VI. Architetture verso uno stile, VII. L’accelerazione totalitaria e l’architettura.

 

          Tout au long de ces chapitres, les usages de l’architecture en tant qu’outil de légitimation du régime sont interprétés comme phénomène global, capable d’engendrer « plusieurs centaines de bâtiments », ne se bornant pas aux programmes strictement liés à l’image du nouveau régime (case del fascio, case dell’Opera nazionale Balilla, palais du gouvernement et du parti, sièges d’institutions parastatales), mais concernant plus largement l’architecture publique : écoles, bureaux de poste, palais de justice, gares, équipements sportifs…

 

          Dans l’ouvrage de Nicoloso, l’architecture apparaît comme un véritable baromètre de l’évolution politique. Dans les premières phases du régime, elle s’avère comme un outil essentiel de propagande. Mais l’auteur montre aussi comment l’architecture devient ensuite un domaine d’excellence pour la définition d’un style fasciste. Ce style, loin d’être visiblement imposé par le haut malgré le contrôle exercé par le Duce, est présenté par le régime comme un aboutissement naturel, résultat d’une vision unitaire qui découle de la cohésion de la culture architecturale nationale et qui exprime une volonté populaire.

 

          C’est un projet politique de large envergure que l’auteur met en évidence, qui emploie l’architecture pour manipuler les références identitaires du peuple italien. Le Duce veut d’abord une architecture nationale. Sa modernité doit s’exprimer par la reprise des sources de cette tradition classique qui a eu son berceau dans la péninsule italienne, et notamment dans la civilisation romaine, ce qui lui permet de recomposer son illustre passé artistique avec la nouvelle autorité politique émanant du régime. Mussolini saisit donc la capacité de l’architecture à laisser des marques permanentes et envisage des réalisations capables de survivre au régime lui-même. L’Exposition universelle prévue à Rome en 1942, ce qu’on appellera les « Olympiades de la Civilisation », aurait dû ainsi allier, dans le dessein du Duce, le triomphe du régime – elle aurait financé une entrée en guerre qu’on n’attendait pas aussitôt – avec sa célébration architecturale.

 

          Echappant à toute présentation simplificatrice, Nicoloso s’attache à enquêter et à restituer les modalités par lesquelles Mussolini poursuit cette mise en valeur du fascisme par l’architecture. Sa célèbre affirmation auprès du critique d’art Ugo Ojetti lors de la visite à la Biennale de Venise en 1934, « Io mi intendo di architettura », est passée au crible afin d’illustrer dans ses multiples détails le rapport que Mussolini entretient avec la discipline architecturale.

 

          Ce rapport est documenté tout au long de l’ouvrage sous des formes variées. Cette attention à l’architecture n’est pas un intérêt formel lié aux rituels du régime. Mussolini est dévoilé en véritable interprète, voire arbitre de questions architecturales, comme l’attestent les nombreux documents inédits sur lesquels le travail de Nicoloso s’appuie. L’auteur associe à la consultation de fonds d’architectes représentatifs (Foschini, Piacentini, Terragni…) et de fonds d’archives officielles tels que ceux de la présidence du Conseil, du ministère de l’Intérieur, de la Sécurité publique et du Parti national fasciste, le dépouillement même de la correspondance du Duce et de celle de son secrétariat personnel.

 

          La lecture croisée de l’ensemble de ces sources restitue à Mussolini son statut d’acteur principal d’événements de premier plan dans l’histoire de l’architecture italienne du début des années 1920 aux premières années 1940, en liaison avec la place non négligeable que l’architecture occupe dans le système de propagande et d’autoreprésentation du régime.

 

          Un premier volet de l’enquête de Nicoloso est consacré au rôle d’inaugurateur de chantiers et de bâtiments que le Duce recouvre. On apprend ainsi que l’un des prétextes par lesquels Mussolini sillonne le territoire de la péninsule par de nombreux voyages, est la « fièvre constructive » à travers laquelle le nouveau régime se met en scène dans les villes italiennes.

 

          De façon à la fois innovante et convaincante, l’ouvrage de Nicoloso permet de comprendre que, surtout dans les années 1930, cette politique de déplacements sur les sites des chantiers et des bâtiments achevés, est pour le Duce une manière essentielle de rencontrer les protagonistes de la culture architecturale italienne et de se faire une connaissance directe, bien que sommaire, de l’architecture qu’ils conçoivent. Les réalisations imposent souvent les itinéraires des voyages, ce que l’auteur montre et explique. En même temps, l’auteur montre bien que c’est l’affirmation du mythe du Duce et de sa politique “révolutionnaire” qui est en jeu à travers ces visites architecturales, comme l’atteste l’amplification de leur impact par la presse et par les ciné-journaux, mise en évidence dans le livre.

 

          Dans l’arc temporel qui va de 1929, année de consolidation plébiscitaire du pouvoir, à 1940, année dans laquelle l’Italie entre en guerre, Nicoloso montre que toutes les régions d’Italie (du moins « 70 chefs-lieux de province sur 89 » écrit-il) ont été concernées par les visites du Duce, tour à tour liées à la pose d’une première pierre, à la vérification d’un avancement de chantier ou, encore, à l’inauguration d’un bâtiment. De manière foisonnante, le livre évoque l’enchaînement de ces visites. L’évocation du discours de Mussolini à la foule réunie dans la piazza della Vittoria à Gênes le 14 mai 1938, du haut d’une estrade en forme de proue de navire, est exemplaire : le Duce exalte le récent renforcement du lien avec l’Allemagne nazie alors qu’il est venu célébrer les dernières réalisations dans la ville, telles que le bâtiment de Piacentini pour l’Istituto nazionale fascista della Previdenza sociale, sur la même place. Le cliché immortalisant cet événement occupe même à juste titre la première de couverture du livre.

 

          A travers la géographie des déplacements de Mussolini, Nicoloso restitue une véritable géographie architecturale du régime fasciste, ce qui permet de saisir l’ampleur du programme de consolidation du pouvoir par l’esthétique des bâtiments. Pour le dictateur, l’architecture est en fait un « moyen de communication avec les foules » – Nicoloso le déclare dès l’introduction de l’ouvrage –, de la même façon dont le régime se saisit de la radio et de la cinématographie.

   

          Dans ce contexte de visites et de déplacements, le cas de Rome est réinscrit en tant que lieu à la plus haute charge symbolique. Nicoloso présente la capitale en chantier du nouveau régime, Troisième Rome après la Rome impériale de l’Antiquité et la Rome capitale des papes, en tant que plus nette expression du lien entre le programme politique de Mussolini et l’architecture. Le Duce peut y exercer davantage son contrôle, de la conception aux détails des réalisations. Ainsi, le voit-on aux prises avec les grands plans de transformation de la ville (les propositions de Brasini et de Piacentini au milieu des années 1920 ainsi que le plan régulateur de 1931 et sa variante générale en 1941), mais aussi avec les projets ponctuels de démolition et de construction, de l’ouverture de la via de l’Impero aux projets pour le Palazzo del Littorio ou pour le Foro Mussolini.

 

          Mais le livre de Nicoloso se fonde aussi sur un deuxième volet d’enquête, éclairant davantage la compréhension de la démarche de Mussolini : il s’agit de l’analyse de son rapport avec les architectes. Le regard, exploité par maintes recherches, sur le parcours professionnel d’un architecte ou, plus largement, sur le milieu architectural à l’heure du « ventennio », est ici réorienté.

 

          L’ouvrage atteste de rencontres nombreuses et diverses entre Mussolini et un grand nombre de professionnels de l’architecture. En fait, ce n’est pas tout simplement par la prise en compte des déclarations ou des discours de Mussolini que Nicoloso reconstruit ses positionnements, mais plutôt à travers l’analyse des modalités par lesquelles il participe au travail des architectes, parfois par des résolutions formelles, mais souvent aussi par des prises de position déterminantes. Ceci est un champ d’enquête essentiel du livre, par lequel l’auteur reconstruit l’action du Duce bâtisseur, à plusieurs reprises calé dans le rôle de l’architecte, lui qui dans sa jeunesse avait même expérimenté le métier de maçon.

 

          Les architectes écrivent à Mussolini, ils lui envoient des livres, des propositions de projets. Ils se font aussi recevoir dans son bureau à Palazzo Venezia : dessins de projet et dessins exécutifs, maquettes et photographies de maquettes, cahiers des charges, lui sont directement soumis pour discuter des propositions et de leur éventuelle réalisation. La présentation de ces envois et de ces rencontres restitue le profil d’interlocuteur averti du Duce. Ce dernier exprime son point de vue sur les projets, suggère des modifications, fait lui-même des croquis, impose le cas échéant ses choix concernant même la localisation du bâtiment. Ses positions et ses décisions se définissent face au travail de dizaines d’architectes dont le passage à Palazzo Venezia a laissé des traces dans les archives et parmi lesquels on signale des présences qui vont depuis les conviés assidus tels que Brasini, Calza Bini, Muzio et Piacentini, jusqu’à Bazzani et Del Debbio, mais aussi Terragni, et avec lui Lingeri, Figini et Pollini, et encore De Renzi, Foschini, Libera, Moretti, Palanti, Ponti, Samonà, Spaccarelli, Vaccaro… Les architectes sont convoqués au sujet de l’élaboration de projets d’architecture prenant souvent en compte la dimension urbaine : c’est le cas lorsque le groupe de Piccinato discute avec le Duce des projets pour la ville de Sabaudia ou Morpurgo, s’entretient à propos de l’aménagement du site du Mausolée d’Auguste à Rome.

 

          La fréquence par laquelle Mussolini rencontre Piacentini s’impose. Le livre – dans lequel tout un chapitre est consacré aux rapports entre le dictateur et l’architecte – montre que les origines de ces rencontres interceptent la phase fondatrice du régime, bien avant qu’aux débuts des années 1930 Piacentini se signale par des interventions majeures, que ce soit le nouvel aménagement du centre de Brescia ou le projet du Palais de Justice à Milan, voire la définition du plan régulateur de Rome ou la direction de l’équipe qui conçoit, dès 1932, la Cité universitaire de la capitale. La commande d’un bâtiment marqué par la toute nouvelle symbolique du faisceau, l’Arc de la Victoire à Bolzano, que le Duce confie à Piacentini en 1925, consacre dès cette époque, le lien spécifique entre le dictateur et celui que l’auteur définit dans ce contexte comme l’« architetto dell’ordine littorio ».

 

          Au-delà du récit de ces rencontres, l’ouvrage de Paolo Nicoloso pose une question primordiale en s’interrogeant sur les options de Mussolini dans le panorama architectural italien. La position du Duce semble, au moins dans les années 1925-1934, relativement ouverte à des tendances diverses, dans l’idée que chacune d’entre elles peut s’avérer utile au soutien du pouvoir. Mussolini paraît accorder le label fasciste à une architecture aux tendances multiples, aux formes classicistes ainsi que rationalistes, conçue par des architectes traditionalistes, mais aussi par des architectes modernes. Dans cette phase – Nicoloso le montre bien –, ce n’est pas une question de choix esthétiques, mais plutôt d’instrumentalisation au sens plus large de l’architecture comme outil de propagande et de légitimation. L’engagement de Mussolini pour la définition d’une architecture au style fasciste univoque ne se manifestera qu’à partir de 1936 : le régime consolidé et l’empire proclamé après la guerre d’Ethiopie (1935-36), il sera alors question de forger à la fois l’image d’une nouvelle puissance politique et d’une nouvelle civilisation. Le livre montre comment cet engagement du Duce s’affirme parallèlement au durcissement du régime dans la conjoncture de la fin des années 1930. L’auteur met en avant de façon éclairante le parallélisme entre la guerre d’Ethiopie, occasion pour forger l’« homme nouveau » fasciste, et l’architecture qui participe à plein titre au même processus. C’est ce binôme – combat et construction – que le travail de Nicoloso introduit pour la première fois dans l’interprétation historiographique de l’action politique de Mussolini.

 

          Un grand chantier romain, auquel l’auteur s’intéresse dans l’avant-dernier chapitre de l’ouvrage, prend la valeur de spécimen de cette approche de l’architecture maintenant devenue le terrain de la définition du style de l’époque fasciste : il s’agit de l’E42 (1937-1943). C’est d’ailleurs au sujet de l’élaboration des projets pour ce site que l’auteur nous illustre davantage le rapport privilégié du Duce avec Piacentini, qui dans d’autres villes aussi (Milan d’abord, mais aussi Gênes, Bologne, Trieste, Livourne, Naples) permet à Mussolini de contrôler la conception et les résultats d’importants projets. Mais c’est également dans ce cadre qu’il démentit le topos de Piacentini architecte officiel du régime. Ce dernier n’est en réalité lui-même qu’un rouage dans le complexe mécanisme de contrôle manœuvré par le Duce. Nicoloso montre, à travers la manipulation des phases de concours poursuivie par Mussolini, notamment au sujet des projets de l’E42, son objectif de superviser toute réalisation et d’en faire le résultat apparent de l’affirmation d’une approche collective de la création du style fasciste en architecture.

 

          Il s’agit d’un style susceptible d’évoquer le passé, tout en étant l’expression de son époque ; il s’agit par ailleurs d’un style tout à fait capable de communiquer, figuratif plutôt qu’abstrait : dans cette perspective s’inscrit le changement apporté à travers les bâtiments conçus pour l’E42.

 

          A Rome, l’E42 a aussi son pendant : Nicoloso présente de la sorte le dernier grand projet pour le Foro Mussolini sur les dessins de Luigi Moretti. Dès les premières pages du livre, il affirme en fait que le programme de l’E42 n’était que l’épisode majeur d’une série d’interventions visant à définir le paysage urbain de Rome capitale de l’Empire fasciste au seuil des années 1940 sous le contrôle direct de Mussolini : les aménagements de via della Conciliazione, du corso del Rinascimento, du largo Augusto, les projets de la Stazione Termini ou du Palazzo del Littorio, s’inscrivent tous dans ce dessein.

 

          Au lieu de voir à priori dans l’E42 l’épilogue architectural d’un régime destiné bientôt à disparaître, Nicoloso y souligne la vision ambitieuse du fascisme et de son chef : ce projet n’était, dans son esprit, que l’amorce d’un processus de transformation à la fois monumentale et fonctionnelle, concernant la capitale, mais aussi tout le pays, destiné à se développer tout au long de quelques décennies. Ce processus devait forger l’esprit fasciste des Italiens : ce n’est que le déroulement des événements historiques qui a soudainement interrompu cette action de longue haleine.

 

          Dès le chapitre consacré à Rome, la comparaison menée à plusieurs reprises avec les projets de Speer en Allemagne et leur place dans la politique de Hitler, éclaire par ailleurs une diversité de moyens, mais non pas d’objectifs : comme dans le régime nazi et pourtant selon une « voie italienne », le fascisme, annonce Nicoloso dès l’introduction du livre, « si affida contemporaneamente alla guerra e alle opere di architettura in tempo di pace per modellare il carattere del popolo ».

 

          C’est ainsi que le livre jette finalement une lumière éclairante sur la véritable bataille de civilisation que le régime de Mussolini engage avec le Troisième Reich, le rayonnement et la future suprématie du nouveau style fasciste dans le monde étant fondés et à prévoir de par son héritage, en ligne directe, du classicisme romain.

 

          Si une faiblesse doit être mise en évidence dans le travail de Nicoloso, elle est liée à la mise en perspective limitée de la réception de cette approche du projet architectural et des transformations urbaines au-delà des frontières de l’Italie fasciste. Alors que le livre privilégie à juste titre la comparaison avec l’Allemagne hitlérienne, la réception que l’action de Mussolini architecte et bâtisseur a eu ailleurs en Europe reste plutôt dans l’ombre. Et pourtant, ce retentissement existe, notamment vis-à-vis des transformations imposées à la capitale : on peut en trouver des exemples même en France, avec l’attention que Gaston Bardet porte en 1937 à la Rome de Mussolini, expression d’« une nouvelle ère romaine sous le signe du faisceau ».

 

          Cela n’amoindrit pas en tout cas la qualité d’un ouvrage qui se distingue non seulement pour son intérêt et sa richesse, mais aussi par l’agrément de sa lecture, avec la contribution d’un appareil iconographique de quatre-vingt documents photographiques, qui proviennent à la fois de fonds d’archives et d’imprimés de l’époque et qui complètent l’appareil documentaire du livre.